J'ai longtemps recherché dans un jeu vidéo ce qui, enfant, me touchait tant dans quelques-uns de mes livres préférés : Jim Bouton et Lucas le chauffeur de locomotive, ou Petzi, parmi d'autres. Dans un genre similaire, The Legend of Zelda : The Wind Waker avait réussi à ranimer en moi cette passion de l'aventure simple et naïve, pleine de découvertes innocentes et d'émerveillement purement gratuit. Brothers est un de ces jeux-là.
Une telle fraîcheur s'obtient au prix de la liberté et de la durée de vie, mais, étrangement, ni l'une ni l'autre ne manquent. J'ai été surpris de découvrir que je n'avais passé que cinq heures sur les routes, cinq heures à peine pour aller jusqu'au bout du monde, à guider ces deux frères si différents et si complémentaires, alors que j'étais parti si loin. Brothers est une expérience complète, sans autres temps morts que ceux aménagés pour que le joueur puisse s'émerveiller de ce qui l'entoure. Regarder passer un chariot, jouer dans l'eau, parler dans une langue étrange à une fillette, Brothers n'est pas bâti pour autre chose que la contemplation tranquille et l'émerveillement tout simple de voir ces deux frères se compléter si bien l'un et l'autre. Le jeu est linéaire, mais il l'est de la bonne façon : la linéarité du jeu est rassurante, parce qu'elle confirme qu'il y a un but, et c'est le plus important.
Les quelques puzzles soulignent toujours parfaitement à quel point le Petit et le Grand ne peuvent se passer l'un de l'autre, ce qui ne rendra que plus forts les moments où ils sont séparés. Il faut laisser au jeu quelques heures pour prendre son envol et, parfois, aller lentement pour contempler l'extraordinaire direction artistique de l'ensemble. Tout doucement, s'attarder sur une aurore boréale... jusqu'à ce qu'enfin, alors que l'on touche du doigt le but, Brothers révèle ses vraies couleurs et apparaisse pour ce qu'il est vraiment : un étrange récit initiatique au goût franc et honnête des contes d'autrefois, sublimé dans un ultime twist de gameplay qui m'a fait rire tout seul par sa force évocatrice.
Le voyage a fait de l'enfant un homme, et face à la douleur, ses larmes ne coulent plus. Non pas parce qu'il est devenu de pierre... mais parce qu'il a déjà pleuré.