Un exemple pour l'industrie du jeu-vidéo
Je crois que j'aime les jeux-vidéos autant que je les déteste.
Je les aime car ils proposent des expériences plus transcendantes que les films, les livres ou la musique ; avec eux nous ne sommes plus spectateurs, lecteurs ou auditeurs : nous sommes la cause, nous sommes ceux qui faisons progresser l'expérience et sommes au centre de ce que le soft nous propose.
Je déteste les jeux-vidéos car ils sont l'antithèse de l'épanouissement humain : ils provoquent directement ou indirectement obésité, insomnie, malbouffe, asociabilité, appauvrissement intellectuel, addiction et j'en passe ; je les déteste aussi car 90% d'entre eux sont des produits fades : fades il y a déjà 25 ans car trop limités techniquement pour proposer une expérience enrichissante ; fades aujourd'hui car victimes des éditeurs qui se lancent à la course de "qui a la plus grosse", avec prouesses graphiques mais pourtant creux ; enfin, je ne parlerai même pas du marché du casual-gaming.
Pour simplifier : j'aime Silent Hill et Metal Gear Solid, je déteste GTA et Call of Duty.
Et dernièrement, je me suis mis à aimer un jeu qui n'a rien pourtant pour plaire, et c'est celui dont je fais la critique actuellement.
Ma deuxième pensée, c'est que l'intuition personnelle domine tout influence extérieure, et mon petit doigt ne m'a pas leurré quand il m'a dirigé vers Deadly Premonition : 10/20 sur Jeuxvideo.com, Logan qui crache généreusement sur la forme du jeu d'un côté, et 16/20 en moyenne parmi les lecteurs de l'autre côté, un déchirement entre adulation et dégoût, je me dis : "fichtre, voilà qui est bizarre, et moi qui adore les Survival en plus, je devrais l'essayer !" Et quel bonheur de l'acquérir pour cinq petits euros à deux pas de chez moi... bref ! allons à l'essentiel.
Les tests encyclopédiques ne sont pas mon "truc", je favorise la concision par crainte de lasser et de perdre le lecteur qui cherche seulement à savoir s'il fait bien d'investir temps et argent dans un produit culturel, aussi avec le cas si particulier de Deadly Premonition je vais être simple :
Inconditionnels de claques graphiques, passez votre chemin : DP aurait été tout juste satisfaisant s'il était sorti 5 ans plus tôt (2005, donc) ; l'aliasing et le clipping se font sans arrêt du coude pour savoir lequel des deux ira plus loin dans le massacre pour un rendu visuel absolument hideux et antique, seuls les personnages sont (à peu près) correctement modélisés.
Même constat pour la jouabilité : curieux mélange à partir des Resident Evil(s) premier(s) du nom et des Resident Evil nouvelle formule, entre la rigidité genre balai dans les fesses lors des déplacements et caméra à l'épaule durant les phases de combat, c'est-à-dire : pas-du-tout-convaincante ; et le pompon c'est la conduite des voitures, calvaire des calvaires et purge des purges, parcourir 5km est une rude épreuve, sans compter la visée très approximative et tout le reste.
Quant à la bande-sonore, c'est nuancé : des thèmes excellents mais fichus un peu n'importe comment pour un résultat WTF, on dirait que le mixage a été fait par des sourds quand on entend une musique de carnaval lorsqu'un médecin nous explique en détail comment un meurtrier a sauvagement assassiné sa victime...
Mais pourtant, ce jeu est un diamant véritable, une pépite rare, un trésor absolu. Mais zut quoi ! pourquoi n'y a-t-il pas plus de softs comme ça en circulation ? Moi qui suis friand de jeux à scénario, je suis servi avec ce travail titanesque effectué, car tout y est à son paroxysme : ambiance, histoire, personnages, dialogues, rebondissements, final merveilleux... Je ne suis pas certain d'avoir été autant bluffé par Silent Hill 2 ou MGS 3, c'est dire ! Deadly Premonition est une œuvre intelligente, mature, réfléchie, qui ne laisse pas indemne quiconque outrepasse la forme afin de se délecter du fond...
L'un des dix meilleurs jeux auxquels j'ai pu jouer, tout simplement.