Dianshi Mali par Low Energy Idol
L'industrie pirate du jeu vidéo est véritablement un monde à part. Qu'il existe des gens passionnés par l'histoire des Famiclones et autres bootlegs n'est au fond pas si étonnant que ça, quand on voit la profondeur abyssale dans laquelle cet écosystème illégal a pu se développer. Alors, aujourd'hui, plongeons donc dans cette dimension parallèle en nous intéressant à une œuvre iconique issue de l'âge d'or de cette industrie : Dianshi Mali.
Cette perle est sortie en 1989 sur Famicom, mais uniquement à Taiwan. Comme pour la plupart des jeux pirate, on ne sait pas grand chose de son histoire... mis à part qu'il est d'origine chinoise, bien entendu. Le développeur semble être non pas Namco comme le prétend filoutement la cartouche de jeu mais un certain Bit Corporation, pionnier taïwanais du jeu vidéo bas-de-gamme qui a fait ses débuts sur Atari 2600. Qu'ont-ils donc bien produire ici ?
Dianshi Mali signifie plus ou moins "TV Mario", "Mali" étant un diminutif phonétique de "Mario" souvent utilisé dans l'industrie pirate chinoise. Et il s'agit ni plus ni moins que d'un portage console d'une machine à sous apparemment populaire dans les casinos miteux de la République de Chine : Le Xiao Mali, sorte de mélange entre roulette et bandit manchot. Ce n'est pas le premier du genre, mais clairement le... hum... "meilleur". Si si.
Lançons donc le jeu. Nous sommes accueillis par un Mario particulièrement jovial coiffé d'une casquette arborant un "F" comme "Fortran" qui semble impatient de miser ses économies ; ne le faisons donc plus attendre. Après avoir mashé les boutons dans l'espoir qu'une input soit prise, nous atterrissons sur l'écran de jeu principal. C'est le silence. Jusqu'à ce qu'on mashe les boutons une seconde fois ; et là, enfin, quelque chose se passe.
Chaque bouton de la manette Famicom, y compris le D-pad, font un bruit différent et servent à miser sur un logo en particulier. Une fois une certaine mise atteinte, c'est bon. Enfin... je crois que c'est comme ça que ça marche ? Bref, la roulette est lancée. Suspense. Une fois que la machine à sous a fini de tourner, vous remportez un gain si vous avez bien misé, en plus d'être félicité par une version chiptune toute niquée de l'Ode à la Joie, et apparemment des gains supplémentaires peut vous être octroyés si le logo que Mario fait sortir du bloc qu'il percute correspond à ce qu'il faut. Tout du moins... si j'ai bien compris. En tout cas, voilà le cœur du jeu : Vous misez, et avec de la chance vous gagnez. Voilà. Parfois y a une espèce de jeu de cartes qui intervient aussi, mais là par contre j'ai vraiment rien capté ; en plus j'ai perdu, allez vous faire foutre.
Mais ce n'est pas là que le jeu se démarque. Non, ce qui le rend unique, c'est ce bonus qui se déclenche je ne sais comment. Ce pouvoir soudain, au cours duquel Mario devient noir (?!) et pendant lequel vous devez masher A pour obtenir le plus de pièces possibles, est introduit par un message concis mais capable de nous plonger dans l'extase la plus totale.
> PUSH START TO RICH
C'est exact. PUSH START TO RICH putain. Appuyez sur Start pour riche. Et le plus extraordinaire c'est que c'est même PAS sur START qu'on doit appuyer BORDEL. Cette transe vidéoludique n'est que de courte durée, donc profitez au maximum ces quelques secondes. N'en laissez pas s'échapper la moindre miette ; vous le regretteriez amèrement. En fait, Dianshi Mali vaut le coup rien que pour ce petit moment de bonheur éphémère. Avec la pensée émue qu'il y ait eu, il y a une bonne vingtaine d'années, un programmeur chinois probablement sous-payé qui a tenté d'offrir à ceux qui joueraient au fruit de son travail acharné la possibilité, ne fut-ce que pour un instant, de pouvoir entrer dans un autre monde. D'expérimenter d'autres sentiments humains que ne le permettait un pays qui sortait tout juste d'une Loi martiale longue de 37 ans. D'enfin atteindre la si précieuse plénitude. De pouvoir appuyer sur Start pour riche.
BREF. C'est vraiment un jeu de merde. Mais vous vous attendiez à quoi ? C'est un bootleg Famicom avec un jeu de casino Mario les gars, hein. On se revoit pour de nouvelles aventures, à plus.