9 heures. Assis dans un amphithéâtre aux strapontins désagréables depuis une heure, je me force à décerner l'important dans l'énième cours-divagation du conférencier de Droit Administratif. A vrai dire, j'ai levé le drapeau blanc depuis longtemps, car ma fenêtre de Crusader Kings 2 possède alors le monopole de mon attention. Je me dis que j'ai vraiment besoin d'un manuel si je veux réussir mes partiels.
10 heures vingt. Deuxième pause du cours. Mon meilleur ami et moi filons à l'anglaise de l'amphithéâtre a demi rempli, juste pour un jeu attendu depuis sans doute trop longtemps : Dishonored.
Et dieu que nous pensions qu'il le méritait : les éloges fusaient de toutes part, clamées en place publique par des journalistes dont nous étions envieux. Leurs descriptions de l'univers et de la jouabilité chantaient en canon avec les bandes-annonces , les carnets de développeurs et les différents aperçus. "Est-ce possible à ce point ?", me demandai-je. Ce a quoi je répondait que cette fois, je ne pouvait plus faire demi-tour.
11 heures 15. Nous arrivons dans une de la demi-douzaine de boutiques yonnaises spécialisées dans le jeu vidéos, celle que je trouvait la plus honnête et encline à recevoir le jeu assez tôt, mais surtout l'une des rares à vendre des jeux PC (Dock Games pour ne pas la nommer). Le vendeur, confus par notre demande, répondit dans un premier temps qu'il ne l'aurait pas aujourd'hui. Cependant, dans une salvatrice vérification de ses commandes, il ressort que 3 exemplaires PC arriveront "d'ici une quinzaine de minutes". Nous nous installons alors dans cette boutique serrée et sans chaise, pour ce qui sera sans doute l'attente de gamin la plus intense de ma vie
11 heures 30 : Pas de nouvelle de la livreuse. Mon ami consolophobe et footophobe se force à apprendre les bases de Fifa 13 (Dont le professionnalisme et l'honnêteté du vendeur ne vante pas les qualités, bien au contraire) sur un Sochaux-Lens alors que mes 130 kilos commencent à se faire ressentir dans mes mollets, PS Vita d'essai en main.
11 heures 40 : Mon ami discute jeux vidéos avec une fille qui travaille dans le magasin. C'est le premier spécimen de gameuse réel que je croise. Si j'avais un Pokédex...
11h45 : Lyon 4, Saint-Etienne 1. Pendant ce temps, mon ami se socialise toujours. Chienne de vie
11h50 : Bruit de camion, mais c'est en façe.
11h51 : Je cours retirer de l'argent, de peur de ne pas pouvoir payer le jeu. Quand on sait que le magasin est affilié à Micromania, il faut prévoir au moins 70€.
Ce n'est que vers 12h20 qu'un utilitaire se gare devant le magasin, prêt à être vidé de ses cartons.Trépignant sur le comptoir comme un gamin de 3 ans à la boulangerie, billets et carte de fidélité en main, je suis en première ligne. Non je ne prends qu'un seul exemplaire. Voilà vos 53 €, et rien à faire si on le trouve 2 fois moins cher en dématérialisé sur certains sites. Oui, j'ai la carte du magasin.Non je ne veut pas faire garantir mon jeu pour 3€ de plus. Merci, bonne journée, au revoir.
Après les problèmes usuels des bus de la Roche sur Yon, me voilà enfin arrivé chez mon ami (qui contrairement à moi a une connexion débridée). j'active le jeu, l'installe, attends les patchs, lance le jeu, règle les options et clique sur Nouvelle Partie.
Et là vous vous dites "Mais si tu me raconte tout ça, tu vas me dire que le jeu est une énorme déception, une véritable arnaque overhypée, et tout ça en trois lignes, dire que t'as mis 10 pour le LOL, publier la critique et troller tous les forums qui en parle, en reprenant l'histoire du streamer américain qui l'a fini en 4 heures en rushant comme un porc en mode bourrin + téléportation, c'est ça ?"
Eh bien non. Je vous dis qu'une attente comme la mienne, celle qui se prolonge et qui sait se rendre tellement inconfortable, presque imprévisible, ça vaut le coup.
Et que ceux qui rabâchent que le voyage est parfois largement plus beau que la destination n'ont pas toujours raison. Parfois, les deux se concurrencent.
Mais il ne fait aucun doute que le voyage vers Dishonored n'aura seulement été qu'agréable. La destination, elle, surprend la carte postale dans l'humilité de cette dernière.
Il n'y a guère que l'attente a évoquer, car nul besoin de critique constructive : Ce que le jeu promet, il le fait. Point Barre.