Dying Light c'est un top 10 facile pour moi, dans la liste des meilleurs jeux que j'ai pu joué. Le genre dont on voudrait effacer ses souvenirs juste pour le plaisir de le redécouvrir comme une première fois, de se prendre la même claque qu'au premier lancement. Mais on est pas dans Men in Black, alors alternativement, les développeurs nous proposent des suites, censées redonner un coup de neuf à nos doux souvenirs. Des fois, ça marche bien, on en vient à préférer la suite. Des fois, on a envie de se taper la gueule contre un mur en voyant nos rêves se faire arracher les couilles devant nos yeux pendant de longues heures où on s'attache à l'espoir, mais qui mènent inévitablement à l'évidence : Dying Light 2 n'est pas bon.


Dying Light 2 situe l'histoire une vingtaine d'année après le 1, où la situation avec le virus de Harran a dégénéré et mené l'humanité au bord de l'extinction sur toute la planète. Nous ne sommes plus quelque part en Turquie, mais en Europe cette fois, dans la ville fictive de Villedor à la localisation volontairement floue. On ne joue plus Kyle Crane, mais Aiden, un Pèlerin, qui erre dans la pampa entre les quelques poches de résistance où l'humanité se démène pour exister, à la recherche de sa soeur et du gros méchant pas beau de cet épisode : un dénommé Waltz. Maintenant que le cadre est posé, une fois passé l'introduction du jeu, en arrivant dans la grande ville donc, on a un premier problème : passé le tutoriel dans la forêt qui était plutôt plaisant, l'ambiance du jeu ne marche jamais, la faute à une direction artistique qui ne sait pas sur quel pied danser. On alterne entre des situations et des paysages qui laisse penser que la chute de l'humanité a eu lieu à la fois la semaine dernière et il y a deux siècles. Dans le 1, les zones contrôlées par les humains et celles abandonnées au zombie étaient assez claires, avec des zones fortifiées entourées de remparts de fortune, de barricades et autres. Mais dans le 2, on voit des côtoiements bizarres, où dans la même rue on a un groupe d'humain en train de faire ses affaires, puis 20 mètres plus loin une horde de zombie à moitié inertes qui n'y font pas trop attention. De même, on voit en pleine ville des humains habiter (et bien "habiter", pas juste "se réfugier") à l'étage d'un immeuble pourtant envahi de zombies. Les zones supposées être sécurisées sont souvent des vastes blagues, avec deux pauvres lampes UV couvrant vaguement les alentours comme seule protection (non non, pas même une clôture des fois). D'ailleurs, même en plein jeu on se retrouve à voir des zombies rentrer et sortir de ces zones comme si de rien n'était. On a l'impression de jouer à chat perché plus qu'autre chose en échappant aux poursuites. Un chat perché mal branlé en plus, vu que les zombies peuvent malgré tout vous toucher en trichant un peu, par contre vous êtes bel et bien privés de vos armes dans ces zones pour contre-attaquer. L'immersion en prend un sacré coup chaque fois qu'on voit des zombies et des PNJ se côtoyer sans trop se calculer.


Ah, et faudra aussi expliquer aux directeurs artistiques que des frênes, ça pousse pas sur le toit d'un gratte-ciel comme ça, parce que voir une forêt sur la ville, c'est original, mais un peu ridicule dans l'exécution quand on voit des champs de blé à même la tôle en fer. De façon générale, la crédibilité du monde est ratée, on est tout le temps sorti du jeu par des détails à la con, là où encore une fois le 1 avait bien mieux réussi à rendre la situation de Harran crédible. Le coup de poignard final dans l'ambiance visuelle, c'est que le jeu copie-colle beaucoup trop de façon flagrante. Tout les avant-postes alliés sont les mêmes, toutes les bases sont les mêmes, on a l'impression de voir 3 fois le même toit tout les 10 mètres, les intérieurs sont quasiment tous identiques aussi entre deux bâtiments similaires, même des zones qui auraient pu être un peu mieux iconisées, comme les centres du GRE ou les stations électriques, sont des putains de bâtiments entiers réutilisés avec quelques micro-changements. Et c'est pas le niveau de détail dans les décors qui le justifie non plus, que ce soit dans les rues ou dans les intérieurs.


Mais bon, passons cet glissade sur la direction artistique du jeu, à laquelle on finit par se faire malgré tout, parce qu'en soit la grosse nouveauté de cet épisode, c'était la dimension RPG, avec des factions, des personnages marquants, des choix à faire parfois vendus comme radicaux, la totale, avec Chris Avellone qui a mis la main à la patte, ça ne peut que bien se passer ! ... Ou pas. Là aussi c'est une foirade, et pas une petite glissade sur laquelle on peut fermer les yeux, non non, juste un foutage de gueule dans les règles, et j'irais même jusqu'à parler de sabotage vu que de l'aveu même de l'intéressé, aucun des travaux d'Avellone, parti en cours du développement, n'a été conservé, et les quêtes qui restent sont d'une nullité rarement vue pour la plupart, au point de faire revoir les autres jeux de Techland à la hausse à ce niveau ... et Dieu sait que c'était pas gagné. On est vraiment sur le syndrome de la quête fedex qui sert de bourrage pour les open-world modernes nazes, "à la Ubisoft" comme on dit, à base d'un PNJ que tu n'as jamais vu et que tu ne reverras plus jamais qui te donne un truc à faire à un point de la map, que ça soit ramasser quelque chose, tuer quelque chose ou livrer quelque chose, et qui te demande de revenir comme un bon petit toutou, sans la moindre surprise, sans le moindre impact sur le monde et avec une récompense dont tu te fous éperdument dans 99% des cas. Sans aller jusqu'à nous sortir quelque chose du niveau de New Vegas, même dans Dying Light 1 c'était mieux, bordel : on avait des personnages récurrent d'une quête à l'autre auxquels s'attacher un peu, des quêtes en plusieurs étapes pour donner un peu de surprises, qui t'emmenait parfois dans des bâtiments uniques avec une ambiance travaillée ... Et pourtant personne ne l'a jamais vendu comme un chef d'oeuvre de quest design, et à raison, mais c'est dire la catastrophe du 2 à ce niveau alors que c'était pour le coup censé être un argument en sa faveur. Et les dialogues ne rattrapent certainement pas le reste, j'ai rarement autant matraqué le bouton pour passer les dialogues dans un jeu pour en finir le plus vite possible tellement j'étais en aérophagie devant un tel brassage d'air pour habiller vainement les putains de quête en carton.


Et pour les factions, faudra quand même dire aux scénaristes que pour que ça marche, faudrait commencer par les rendre intéressantes, histoire d'avoir au moins un semblant de dilemme moral. Non parce que les Survivants, c'est à la limite de la faction troll à ce niveau. Je veux bien que le jeu a essayé de nous faire le choix entre l'anarchie et la liberté avec eux, ou l'ordre et la surveillance avec les Peacekeepers, mais là les Survivants sont juste dépeints soient comme dangereusement incompétents, soit comme des psychopathes en puissances pas si loin des bandits. On dirait vraiment que les Survivants ou les Peacekeepers ont été écrits chacun par deux scénaristes différents qui ne se sont jamais concertés pendant le développement. Du coup les Peacekeepers sont écrits selon les quêtes comme soit beaucoup plus raisonnables que ce que le jeu essaye de nous vendre, soit comme des clichés de fachos avec la subtilité d'un étudiant en L1 de sociologie. Et tout ça ça rend la prise de décision quand il y a des choix juste gonflante, on a toujours l'impression de faire un pile ou face aux conséquences pas franchement calculables, plus que de prendre une décision mûrement réfléchie. Les choix sont d'ailleurs extrêmement binaires, il n'y a pas vraiment moyen de jouer le double-jeu jusqu'au bout dans une situation afin de glaner un maximum d'information pour prendre la meilleure décision.


Mais le pire, c'est que tout cet aspect n'est même pas intégré dans le scénario, c'est constamment un "à-côté" qu'on nous colle dans les pattes de force. Parce que sa frangine et Waltz, je jurerais que le petit Aiden il les aurait retrouvé en 3 fois moins de temps si on arrêtait constamment de lui casser les couilles avec cette guéguerre de faction dont il est supposé n'en avoir strictement rien à foutre. Et je suis d'ailleurs intimement convaincu que cette histoire de "retrouver sa soeur et se venger de son tortionnaire", c'est un rajout aux forceps, les trailers avant la date de sortie initiale en 2020 ne mentionnait absolument pas tout ça, et tout porte à croire que le Boucher était censé être le véritable antagoniste, et non pas juste un pauvre vieux auquel on parle 2 fois à l'arrache à la fin. Le jeu donne constamment cette impression d'être deux histoires en une qu'on a rattaché vainement au fil de suture barbelé, et le fait que les quêtes secondaires sont pour presque toutes complètement déconnectées de la trame principale n'aide vraiment pas à faire tenir le tout. Et cette histoire de choix est une fumisterie sans nom, le choix mis en avant dans les trailers n'arrive finalement qu'à la fin de l'aventure, et ne permet que de libérer une zone pourrie insupportable à parcourir. L'impact du joueur sur le monde est inexistant, vous pouvez littéralement massacrer des Survivants ou des Peacekeepers au pas de la porte de leur camp sans qu'aucune conséquence ne soit prévue : ils ne vous attaqueront pas en retour, ne vous dénigreront pas, ne vous feront même pas de remarque un peu ronchonne. Vous pouvez jouer le plus grand tueur en série de la ville sans jamais que personne ne vous le reproche.


Et encore si l'écriture et l'ambiance étaient les seuls problème de Dying Light 2, ça serait déjà dramatique, mais même niveau gameplay et design général, alors que le 1 était quasiment irréprochable sur ces niveaux, le 2 se plante en partie. Le parkour est moins pesant, les sensations de Aiden sont beaucoup trop flottantes comparées à Crane où on nous faisait vraiment sentir chaque effort, et une part de la palette de mouvement a disparu. Et c'est valable pour les combats contre les zombies aussi, où les coups ont beaucoup moins d'impact, les zombies volent trop facilement, on a plus l'impression d'incarner Astérix qui donne des baffes aux Romains que d'être un survivant endurci qui massacre du zombie mutant à la machette. Heureusement, le combat contre les humains est un peu plus agréable et diversifié, ça reste pas très glorieux. La nuit a perdu tout son aspect effroyable également, déjà la faute à une ambiance de nuit bien moins oppressante à cause de la luminosité trop élevé, là où le 1 n'hésitait pas à nous plonger dans la pénombre totale à l'exception de notre fébrile lampe torche, la faute à des Rapaces bien plus fragiles que dans le 1, mais surtout la faute à la pire erreur de game design du jeu : le parapente.


Certains trouvaient que le grappin dans le 1 avait tendance à péter le jeu en rendant la grimpette beaucoup trop facile, et c'est parfaitement entendable. Et d'ailleurs le 2 corrige le tir, en rendant le grappin beaucoup moins puissant, et plutôt marrant à utiliser en fait. Sauf que pour une raison qui me fait encore me gratter la tête jusqu'à l'os, le grappin arrive beaucoup trop tard dans le jeu, et à l'inverse le parapente arrive dès l'arrivée dans la deuxième zone, vers à peine 20% de l'aventure principale. Le résultat, c'est que le level design a tendance à largement favoriser l'utilisation de ce dernier, et le grappin n'est dès son obtention déjà plus qu'un outil obsolète qui ne sert que dans des situations précises. Le problème est contre la philosophie même du jeu : pourquoi se faire chier à gambader dans les rues et à grimper aux murs quand on peut simplement voler en partant des bouches d'aérations qui sont toutes à moins de 50 mètres les unes des autres dans la ville ? Pourquoi je me ferais chier à passer à travers les bâtiments, à grimper sur les toits et à me faire ralentir par les zombies quand je peux traverser la map entière sans trop de difficulté ? Pourquoi je me soucierais de me faire poursuivre de nuit alors que je peux tranquillement courir jusqu'à la bouche d'aération la plus proche ou sauter du toit pour ouvrir mon parapente et planer tranquillement hors de portée des Rapaces ? Ajoutez à ça le problème du copié-collé déjà mentionné plus haut, et vous avez le cocktail parfait pour rentre la map inintéressante, d'autant que la variété d'un secteur à un autre ne va clairement pas sauver l'ensemble.


Et pour finir, il faudrait quand même parler du report de 2 ans de la sortie du jeu aussi, soi-disant pour peaufiner le jeu. Je n'ai aucune preuve absolue, c'est de la pure théorie personnelle, mais pour moi il y a eu du sabotage, c'est pas possible autrement. On ne peut pas montrer des trailer de gameplay aussi convaincant entre 2018 et 2020, qui prouvent que les développeurs avaient non seulement les idées, mais aussi tout compris à ce qui était attendu vis-à-vis de leurs promesses, et assister à un tel naufrage deux ans plus tard. Alors on le sait maintenant, l'ambiance chez Techland sur la fin du développement de Dying Light 2, c'était pas trop ça, bienvenue dans le monde merveilleux du développement de jeu vidéo messieurs-dames. Mais là, je suis persuadé que Todd Holland s'est infiltré chez Techland avec une perruque, des lunettes et une fausse moustache pour venir ajouter son ingrédient secret à l'insu de tous : le mensonge. Et autant en finissant le jeu à chaud, j'étais déçu, mais presque prêt à admettre que le jeu était quand même juste moyen, autant retomber sur toutes ces vidéos balancées à l'annonce du jeu, et surtout en refaisant le premier dans la foulée, la réalité de ce qu'on a perdu entre temps me rattrape : Dying Light 2 est juste mauvais et une version coupée à l'eau de ce qu'il aurait du être, qui n'a pas grand chose pour lui.


Le clou dans le cercueil, c'est que même en ayant attendu 2 ans après la sortie, même en ayant mis ma config à jour pour qu'elle soit largement suffisante pour faire tourner le jeu dans de bonnes conditions, le jeu n'est pas propre et a son lot de bug, mais surtout de crash, de lock et de chargements infinis à raison de plusieurs fois par session en coop. C'est peut-être bien le seul point commun avec Fallout New Vegas.

Legeno
3
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Créée

le 16 déc. 2024

Modifiée

le 11 févr. 2025

Legeno

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