ECHO est le premier jeu développé par le tout jeune studio Ultra Ultra, dont plusieurs membres de l'équipe ont déjà travaillé sur la série de jeux Hitman.
Et ça c'est beau.
ECHO nous met dans la peau de En, une jeune femme ayant passé 1 siècle en hibernation dans son vaisseau qui débarque dans un gigantesque palais créé par une antique civilisation alien, dans le but apparent de ramener à la vie un certain Foster dont l'âme est contenue dans un mystérieux cube écarlate. Seulement, le palais n'est pas que grand, il possède aussi son système de défense : les Echos, des sortes d’androïdes prenant l'apparence d'En, et qui pourront reproduire les mêmes mouvements que cette dernière.
ECHO se présente donc comme un jeu d'infiltration avec une mécanique simple, mais géniale : On arrive dans une salle où patrouillent çà et là des Echos, le palais "enregistre" nos mouvements spéciaux (s'accroupir, ouvrir une porte, activer un ascenseur, tirer au pistolet,...), puis survient un black-out, une petite fenêtre durant laquelle l'on est libre d’effectuer toutes les actions que l'on souhaite sans pouvoir se faire "enregistrer", puis, quand les lumières reviennent, les Echos ont été réinitialisés (ceux tués lors du tour précédent sont ressuscités) et sont capables de reproduire tous les mouvement de En enregistrés jusqu'au prochain black-out : On ouvre une porte, ils sauront le faire aussi, on marche dans l'eau, ils le feront, on tire au flingue laser (ne faites jamais ça !), ils nous abattent comme un chien !
Le but du joueur devra donc être de passer de salles en salles en évitant à tout prix de se faire repérer (les Echos tuent en 2 coups voire en 1 en difficulté supérieure), et en jouant habilement avec la mécanique de "reboot" des ennemis. L'IA des ennemis, sans être exceptionnelle, fait très bien son boulot : Les environnement étant très ouverts, les Echos nous voient de loin, et sont d'ailleurs très nombreux à chaque salle, sans compter qu'à chaque reboot, tous ceux que vous aurez tué sont ressuscités, ce qui fait que même si l'on se fraye un chemin vers un objectif, il faudra également penser à la retraite.
Un savant mélange d'infiltration, de tactique, d'observation et de skill. Et c'est trop bien !
Les développeurs ont conçu un système très intelligent qui demande beaucoup de réflexion et de planification au joueur pour passer les différents niveaux. Surtout que ceux-ci ne sont jamais linéaires, les salles à passer sont immenses et les possibilités de déplacement et d'actions sont très grandes. On sent bien là la patte Hitman imposée par les développeurs, ce qui confirme au passage ma théorie que tout ce qui touche à Hitman rend le jeu-vidéo meilleur !
Cette immensité des environnements est renforcée par une direction artistique magnifique, les lieux que l'on visite sont très vastes, on se sent minuscules à l’intérieur de ces immenses corridors, de ces salles si richement décorées telles les salles d'un palais royal du 17ème siècle, ou de ces sombres parties en extérieur dont les décors tortueux rappellent le travail de Giger sur la saga Alien. On a vraiment l'impression d'être un intrus souillant par notre présence impure un lieu jusqu'alors inaltéré et hors du temps. Le jeu est vraiment très beau, les développeurs ont poussé les détails au point d'ajouter les reflets de lumières sur la combinaison de l’héroïne, c'est fou.
L'histoire de ECHO est un peu plus mise en retrait. Il n'y a pas de flash-backs, de notes à collecter pour en apprendre plus sur le background du jeu, tout passe par les dialogues entre En et l'IA London, qui nous apprennent brièvement comment ils en sont arrivés là et ce qui motive l’héroïne à sauver ce Foster. Cela donne à l'univers de ECHO un coté un peu perméable, car on ne comprend pas tous les tenants et aboutissants de l'histoire, mais je trouve que ça donne aussi l'impression d'un univers qui a son propre vécu, qui n'a pas attendu que le joueur arrive pour se créer lui-même, et c'est une chose que j’apprécie. On s'attache d'autant plus à l’héroïne quand on se rend compte de son parcours, des épreuves qu'elle a dû traverser pour se libérer du joug de ses proches et de sa destinée, mais qui l’amèneront au final à accomplir exactement ce pourquoi elle a été entrainée pour réparer se erreurs : Explorer et percer les mystères de ce fameux palais. Ironie, quand tu nous tiens.
J’apprécie aussi l'idée de nous donner en voix-off un personnage qui ne cesse de railler les actions de l’héroïne, qui conteste ses décisions et se moque de ses croyances. Cela change pas mal de tous ces jeux où la voix-off est systématiquement un compagnon de route compatissant, toujours du coté du héros et qui ne remet rien en cause, c'est bien vu.
Le jeu traite de l'humanité, de sa petitesse face à des forces supérieures, et aussi de sa capacité à se dépasser pour surmonter tous les obstacles. Un jeu qui nous dit que l'Homme ne devient pas plus fort par la fortune ou l'influence politique, mais par sa capacité à toujours aller plus loin et à franchir toutes les limites. Un aspect merveilleusement en phase avec l'immensité du terrain de jeu.
Cela m'a même rappelé Dark Souls, cette idée de surmonter les épreuves les plus dures malgré notre fragilité de petite âme humaine.
Et la musique crée vraiment une ambiance unique, à la fois douce, calme, apaisante, mais aussi dure, mélancolique, frappante.
Alors oui, je sais ce que vous me direz.
Vous me direz que ECHO ne possède que 3 formes de niveaux : Le passage d'une salle à l'autre en esquivant les Echos, la collecte d'orbes de lumière dispersées dans les salles pour ouvrir l'accès à un ascenseur et la collecte de sceptres permettant d'ouvrir une porte. Certes, c'est peu. Mais le jeu étant court, ce n'est jamais redondant.
Vous me direz aussi qu'au final, la mécanique principale du jeu n'offre pas de grandes variations dans le gameplay, et que les développeurs ont été trop ambitieux pour un premier jeu, indé qui plus est. Et je vous répondrai oui, mais à mes yeux cela ne gâche pas l’expérience de jeu. Et c'est le genre de problèmes que l'on peut améliorer dans une suite. Beaucoup de bons jeux ont eu leurs mécaniques peaufinées, améliorées grâce à une suite (la licence Diablo, Dishonored,...). Regardez la saga Hitman, par exemple, entre le premier épisode et le reboot sorti en 2016, la progression a été immense : Chaque jeu a apporté son lot d'innovations, de nouvelles mécaniques. Ce que je veux dire, c'est qu'un jeu peut avoir des mécaniques fébriles, mais qu'il est toujours possible de les améliorer.
Et vous me direz également, parce que vous êtes quand même bien bavards, que la fin est un trop rapide et débarque sans que l'on se rende compte que l'on arrivait au bout. Eeeeeet... C'est vrai. La fin est un peu trop rapide, mais pas dénuée d'émotion. Et si suite il y a, je me demande ce qu'ils pourraient imaginer comme nouvelle histoire. J'aurais par contre bien vu un combat de boss à la fin façon Batman Vs Mister Freeze dans Arkham City : Un combat où l'on doit s'approcher discrètement de l'ennemi pour lui porter une attaque, et ce dernier s'adapterait alors à notre assaut de sorte à ce qu'on ne puisse plus le refaire. Je pense qu'avec le gameplay du jeu, ça aurait eu de la gueule.
Et vous me direz au final, petits malins que vous êtes, que je ne suis pas vraiment exigeant vis-à-vis de ce jeu qui ne tient pas vraiment toutes ses promesses. Et c'est vrai, je ne suis pas exigeant. Déjà parce que le jeu est vendu 20 euros, ce qui est raisonnable, mais surtout parce que ce jeu m'a offert exactement ce que je voulait : Une expérience. L’expérience d'être dans la peau d'une jeune femme parcourant un vaste palais futuriste traquée par de vils androïdes reproduisant ses actions, en quête de rédemption et d'un moyen de réparer une terrible erreur.
Une expérience que j'ai trouvée fort plaisante, sensorielle même.
ECHO n'a pas pour vocation d'être un chef-d’œuvre, à mes yeux, mais si les développeurs pouvaient avoir la chance de créer une suite, et qu'ils arrivent alors à être à la hauteur de leurs ambitions, je pense que la série ECHO pourra marquer durablement l'univers du jeu-vidéo.
On en est pour l'instant à un jeu au gameplay fébrile et à la courte durée de vie, mais très prometteur.
All this time, I questioned the world
And all this time it did not reply
All my life, in search of the answer
I needed only to ask myself
Why am I here?
- Once Human, "Gravity"
Critique du reboot Hitman (parce que l'auto-pub, c'est bien) : https://www.senscritique.com/jeuvideo/Hitman/critique/70547851