Every Day the Same Dream par matleouf
Ce qui marque au premier abord dans ce jeu, en plus de la musique très agréable qui sonne comme un vieux road-movie, c'est le graphisme. Tout est dans des tons gris (hormis certaines touches, mais on y reviendra), le dessin est très épuré, géométrique et me fait beaucoup penser à une affiche soviétique, ce qui n'est probablement pas un hasard...
On est aux commandes d'un salarié au sortir du lit, son réveil vient de sonner (en tout cas une lumière rouge clignote) et il attend patiemment que l'on prenne le contrôle. Rien de plus simple, les touches fléchées gauche et droite le font marcher, la barre espace permet d'interagir avec l'environnement. En s'approchant du réveil clignotant, une pression sur la barre espace l'éteint. Un peu plus loin, une pression sur la barre d'espace devant la garde-robe nous habille. Puis nous pouvons enfin nous rendre dans la cuisine, dans laquelle la femme du protagoniste est aux fourneaux, avec laquelle nous pouvons parler grâce toujours à la barre espace...
On se rend vite compte que tout dans ce jeu est question de choix. Ma première journée était très standard et j'ai fait tout ce qui était attendu de moi (m'habiller, aller au travail et me mettre à mon poste). Au réveil de la deuxième journée, j'ai essayé d'autres trucs et c'est là que j'ai réalisé tout le potentiel de ce jeu. Il est tout à fait possible de vivre encore et encore la même journée mais, comme dans le film Un jour sans fin, on a vite envie de "pimenter" un peu sa journée. Et le jeu nous montre alors comment il est facile, en faisant simplement un petit écart dans son train-train quotidien, de vivre quelque chose de nouveau.
L'utilisation de la couleur dans ce titre est également très intéressante, la plupart des objets colorés sont symboles de l'aliénation au système : l'alarme du réveil, le symbole du parking, la courbe de croissance de l'entreprise, le feu stop... Ce sont toutes des choses qui nous rappellent ce que nous devons faire, quels sont nos objectifs. Mais quelques autres sont plus ambigus, comme la seule feuille qui s'accroche désespérément à sa branche, qui représente la singularité, mais qui est très proche de la mort : ce qui est différent ne dure pas, il ne sert à rien d'essayer de changer les choses, tous les matins on se réveillera au même endroit, au même moment... Ou bien le panneau sortie de secours, qui ne mène qu'à une seule chose : le suicide.
On pourra reprocher à ce jeu d'être un peu court, mais je ne pense pas qu'une version plus longue aurait renforcé le message. Et d'ailleurs on s'attache à ce personnage insipide, prisonnier de sa vie quotidienne, peut-être simplement parce qu'il nous rappelle que nous aussi nous sommes, comme lui mais à un degré moindre, prisonniers de notre vie quotidienne...
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