(Attention, c'est très long, ça spoile un peu, et c'est issu d'un test vieux de 2007. Pour savoir ce que j'en pense maintenant, scrollez tout en bas.)
Au risque de passer pour un hérétique, je dois avouer que je n'ai jamais vraiment aimé Final Fantasy. Du moins, pas ce que la série était devenue depuis la transition sur PlayStation. Final Fantasy VII était un bon jeu, à la rigueur le XIX aussi, mais bon difficile pour ma part d'accrocher au concept du jeu-cinématique. Dans des conditions pareilles, je n'attendais pas Final Fantasy XII avec une énorme impatience. Jusqu'à l'annonce de Yasumi Matsuno aux commandes. Et ça, ça claque, comme disent les jeunes.
Matsuno, c'est le géniteur génial de Vagrant Story sur PSOne, mais aussi et surtout de Final Fantasy Tactics (et à l'occasion producteur sur l'épisode Advance). Avec trois jeux pareils, on tape dans la cour des grands, pas à côté du Paris-Marseille Racing de Davilex, autrement dit le sieur était attendu au tournant en bossant sur un nouvel épisode de Final Fantasy. Défi relevé haut la main, serais-je tenté de dire, malgré le retrait du projet du sieur en 2005. Premier point: une refonte quasi-totale du système de jeu. Si l'introduction reste d'un certain classicisme (avec cinématiques et bla-bla à foison), le premier combat change la donne. En effet, il n'y a désormais plus de distinction opérée entre la zone d'exploration et le terrain de combat. Les rencontres aléatoires le sont toujours autant, mais cette fois-ci les monstres apparaissent directement sur le terrain et vous pouvez choisir de les attaquer ou de passer votre chemin, sans aucun temps mort. A mon sens, il s'agit ici de l'innovation majeure de cet épisode, puisque la décision de ne plus discriminer combat et exploration apporte un dynamisme sans précédent. Exit les temps de chargement avant d'entrer en combat (sous la forme d'animations plus ou moins lassantes sur le long terme), tout se fait sans transition, de manière très fluide. De fait, les monstres à portée peuvent vous attaquer directement, et même vous suivre pendant un certain temps si vous décidez de fuir comme un lâche. Du coup, les personnages ne sont plus placés sur un plan fixe, puisque l'on peut se déplacer librement, il faut donc prendre en compte des facteurs nouveaux comme la portée de l'arme (symbolisée par une flèche de couleur), ou la possibilité, en plein combat de se faire attaquer par d'autres monstres passant dans le coin (un système appelé ADB, en référence à l'ATB de Final Fantasy VIII, D pour Dynamic ou Dimension). On peut donc par inattention se retrouver à combattre en infériorité numérique, ou au contraire attirer un maximum de bestioles vers soi afin de lancer un sort de zone dévastateur. Dans les faits le système de jeu rappelle davantage un mmorpg qu'un Final Fantasy de facture classique, mutation de la série opérée depuis le onzième épisode.
Il ne faut donc pas compter passer dans le dos d'un ennemi pour esquiver son attaque, puisque les actions restent régies par l'ancien précepte du pourcentage de réussite. Dans les faits, la seule possibilité d'esquiver une attaque ennemi est de courir se mettre hors de portée, mais évidemment le joueur ne peut alors plus attaquer. Avec trois personnages sur le terrain (plus un invité selon les circonstances), les combats peuvent donc rapidement se transformer en joyeux bordel. Heureusement le système de gambits permet de pallier dans une certaine mesure à ce problème, puisqu'il est possible de définir différentes routines qui caractériseront un personnage. Une espèce de grammaire du comportement en quelques sortes, qui dictera les actions à effectuer selon certains facteurs. Par exemple, le plus simple reste d'ordonner à un personnage de soigner un allié si ses points de vie descendent en-dessous de 30%, ainsi se mettra-t-il à soigner tous les alliés répondant à cette caractéristique. Le système reste simpliste, puisqu'il n'est possible de définir qu'une cible et qu'une action à effectuer par ligne de gambit, mais rapidement il sera nécessaire de mettre en concordance les gambits entre eux, par ordre de priorité et de personnages, afin de pouvoir effectuer des actions plus complexes. Deux exemples plutôt simples: vous pouvez ordonner à un personnage de voler les ennemis à portée, mais le problème est que dans ce cas il volera en permanence et sera donc incapable de se défendre face aux attaques. Le cas échéant, il est possible de lui ordonner de ne voler que les ennemis qui possèdent encore la totalité de leurs points de vie, puis de les attaquer, et en parallèle de charger un autre personnage d'attaquer ces mêmes ennemis afin qu'ils n'aient plus la totalité de leur vie. Sur le même principe, il est possible d'envoyer le sort huile sur les ennemis vulnérables au feu avec un personnage, son allié se chargeant quant à lui d'envoyer un sort de feu sur tous les ennemis atteints de l'altération d'état huile. Effet garanti, encore plus sympa qu'un barbecue entre amis. Pour autant, le système de gambits n'est pas totalement parfait, puisqu'il oblige à prévoir absolument tous les cas de figures, ce qui se révèle généralement extrêmement complexe pour certains cas épineux. En effet, si une routine de combat se révèle efficace dans 80% des cas (avancer, taper, soigner, recommencer), certaines situations coincent un personnage dans une action spécifique, enrayant toute la fragile mécanique. L'exemple le plus courant est celui d'un personnage se soignant en permanence plutôt que d'attaquer (le temps que le sort de soin se prépare, le personnages encaisse de nouveaux dégâts, l'obligeant à se soigner à nouveau, et ainsi de suite), ce qui bloquera un second personnage bloqué sur l'action de vol des ennemis (voir plus haut). Dans des circonstances pareilles, il est heureusement possible de désactiver les gambits et reprendre entièrement le combat en main, mais il est clair que combattre avec des alliés dont le niveau d'initiative frôle celui du lemmings (sorti du contexte des gambits) se révèle particulièrement troublant au départ. Heureusement les invités (qui agissent de leur propre chef, impossible de les contrôler) seront d'une aide précieuse sur certains combats. De même il est possible de composer son groupe à sa guise, de une à trois personnes sur le terrain, avec un leader. Le leader est chargé de guider les autres, pour simplifier il s'agit donc du personnage que l'on contrôlera directement, mais qui aura aussi tendance à se faire attaquer en priorité par les ennemis. Son rôle reste cependant cantonné au simple personnage jouable, sur ce plan-là il s'agira donc de simplement choisir son préféré parmi toute la troupe.
En outre, le système d'évolution de l'équipe a été lui réaménagé, au risque de faire grincer quelques dents. Final Fantasy XII instaure en effet le principe du "tout payant", puisque rien (ou presque) ne sera acquis d'avance. C'est là qu'intervient la grille de permis. Similaire au sphérier de Final Fantasy X, cette grille permet de débloquer les différentes compétences disponibles dans le jeu, au prix de précieux points de permis. Dans la pratique, pour pouvoir lancer un simple sort de soin, il faudra acheter (avec des Gils) la compétence en question auprès d'un marchand, par la suite seuls les personnages ayant débloqué (avec des points de permis) la case correspondante sur leur grille seront en mesure de lancer un sort de soin. Et évidemment la totalité des actions du jeu (de l'utilisation de certains types d'armes aux techniques, en passant par le port d'accessoires ou de protections adaptées) est régie par ce système de grille, ce qui signifie qu'il faudra gagner énormément de points pour commencer à avoir un personnage puissant, et, a posteriori, de bien gérer vos troupes pour que celles-ci soient complémentaires. Complexe? Certes au début, mais une fois venu le réflexe d'économiser les points pour parer à toute éventualité, le système s'avère très efficace, même si avancer à tâtons au milieu de la grille (chaque permis débloqué dévoile l'ensemble des cases adjacentes, de fait tous les permis ne sont pas accessibles dès le départ) peut être perturbant par moment. Tout dans le jeu passe par cette grille de permis, jusqu'aux différentes invocations que vous pourrez invoquer. Des invocations toujours présente, mais sous une fois différente cette fois-ci. Les habitués seront certainement déçus de ne pas retrouver les piliers de la série, puisque Shiva, Ifrit et autre Léviathan seront affectés au titre des vaisseaux de la flotte coloniale. Les invocations, ou plutôt éons, se nommeront désormais Bélias ou Mateus, et une fois vaincus ceux-ci se retrouveront sur les grilles de permis, attendant d'être affecté à un seul personnage. Du coup seul ce personnage pourra appeler son petit protégé, là encore pas pour lancer une attaque dévastatrice, comme il est de coutume, mais obtenir un soutien actif au sein-même de la bataille. Concrètement, une fois invoqué, votre éon remplace vos deux compagnons sur le terrain, et vous assiste durant le combat. Au même titres que les invités, chaque invocation agit selon son propre chef, mais peut tout de même balancer une puissante attaque si certaines conditions sont réunies. L'intérêt de combattre avec un éon est multiple, puisque cela permet déjà de laisser souffler deux personnages en difficulté au sein de votre groupe, mais aussi de gagner facilement de l'expérience. Les premiers éons deviennent cependant rapidement obsolètes par leur manque de puissance contre les monstres avancés (et inutile de les appeler contre un boss, si ce n'est pour se ravitailler), d'où l'intérêt de rechercher des invocations plus puissantes, cachées un peu partout dans le monde d'Ivalice (toutes ne s'obtiennent pas au cours du déroulement de l'histoire). Parallèlement aux éons, les personnages accédant aux impulsions, proches des limit breaks des précédents épisodes (du moins les vieux) et qui correspondent à des attaques plus ou moins puissantes selon leur niveau. Une fois une attaque lancée, il est possible d'enchaîner d'autres impulsions avec vos deux autres personnages (pour peu qu'ils en aient débloqué sur leur grille), le but étant d'atteindre un combo suffisant pour lancer une attaque de concordance qui infligera des dégâts supplémentaires. Le point noir vient du fait que ces attaques sont très coûteuses en points de magie (la totalité pour une attaque de niveau 3), il est donc nécessaire de ne pas les utiliser n'importe quand, les bosses et autres monstres coriaces restant le meilleur moyen de dépenser utilement la magie. Le système est mine de rien plutôt complexe à appréhender, mais là encore tout est question d'entraînement.
Qu'on se le dise, cette nouvelle orientation de la série est très audacieuse, peut-être un peu trop, au point que les intégristes de Final Fantasy (du moins du VII au X-II, la nouvelle vague dira-t-on) pourraient ne pas s'en remettre. Sur le même plan, fini l'assistanat scénaristique, pour apprécier l'histoire il va falloir se plonger dedans, car de toutes manières ce Final Fantasy frise l'anorexie de cinématiques. Je le rappelle, on est ici pour jouer, pas étonnant donc de se retrouver complètement paumé au début du jeu, au milieu de ce sombre complot politique visant à asservir le monde d'Ivalice (que les amateurs des Tactics seront d'ailleurs heureux de retrouver par le biais de multiples références croisées). Il faudra attendre une petite dizaine d'heures de jeu pour que la psychologie des personnages et la trame principale se dévoilent peu à peu, là encore loin de la boulimie japoniaisante des précédents épisodes. D'aucuns reprocheront donc au jeu la difficulté à s'identifier aux personnages, là où justement tout est prévu pour faire carburer l'imagination du joueur. Une excuse facile, certes, mais relativement efficace puisque les différents personnages que vous contrôlerez seront suffisamment stéréotypés et "creux" psychologiquement parlant pour s'identifier rapidement à l'un d'entre eux. Bien évidemment les habitués risquent de ne pas s'y retrouver au milieu de toutes ces coquilles vides, mais c'est un risque à prendre. En parlant de l'histoire, il faut bien avouer, au vu des différentes critiques disponibles sur le Web, et de ce que j'en ai ressenti, que les dix premières heures sont repompées jusqu'à un point difficilement imaginable sur le célèbre Star Wars, peut-être est-ce cela qui rend les personnages facilement reconnaissables. En tout cas ce manque d'inspiration (on ne peut pas parler de référence affichée en l'occurrence, ou alors maladroite) est dommageable au jeu, heureusement l'histoire décolle rapidement pour nous laisser voyager à notre guise dans ces somptueux décors.
Somptueux est en effet de bon aloi ici, car si Final Fantasy XII n'est pas le jeu le plus impressionnant de la PS2, on assiste à une véritable prouesse technique pour la série. Les décors sont cette fois-ci calculés en temps réel (le joystick droit est donc affecté aux rotations de caméra) et, s'il faut faut avouer que certains manquent d'originalité, on ne peut nier leur beauté certaine, apportant une touche d'onirisme par le biais de décors rappelant Final Fantasy X (côté exotisme on a vu pire). Aussi, si le level design se révèle parfois peu inspiré (jungles en couloirs, donjons sur rails), les villes, ainsi que la majorité des terrains d'exploration font montre d'une recherche digne d'un travail d'orfèvre. Comment ne pas tomber sous le charme de Rabanastre, ville de départ de jeu, inspirée par l'architecture espagnole, ou par les déserts qui l'entourent, peuplés de créatures belliqueuses mais aussi de villages cachés entre deux canyons? L'univers de jeu mis à disposition est véritablement énorme, et si certains passages ne se débloqueront a priori que par l'impulsion d'un évènement scénaristique majeur, il reste tout à fait possible de flâner sur l'ensemble de la planisphère, pour peu d'avoir un niveau suffisant (dans les contrées sauvages les monstres ont tendance à être chiants à abattre). Bon, c'est pas GTA, mais il est pour une fois appréciable de remarquer que le monde vit même en dehors des villes (même si la part des choses est faite entre les monstres à éliminer et les personnages à qui parler, c'est-à-dire que vous ne verrez jamais les deux dans un même tronçon). L'abandon du pré-calculé se répercute de même sur la taille des tronçons à explorer, qui, s'ils restent tout de même enchaînés à des contraintes de chargement, amènent un souffle d'air frais et surtout une fluidité (déjà évoquée) bien appréciable. La référence évidente pour le coup reste Monster Hunter (ou l'épisode Freedom sur PSP), puisque le déplacement et l'exploration entre zones est organisé similairement.
Les atouts graphiques du jeu ne sont eux aussi pas en reste. Outre une modélisation des personnages plus que convaincante, notamment concernant le travail sur les expressions faciales, le jeu fourmille, Final Fantasy oblige, d'effets de lumières et de détails chatoyants. Difficile de ne pas penser aux impulsions, qui tapent directement dans la surenchère gratuite d'effets spéciaux à s'en décoller la rétine, ou aux conditions climatiques, gérées de façon dynamique (cela a d'ailleurs une incidence sur les rencontres que vous ferez, dans une certaine mesure, et sur les conditions de combat, à l'instar de Tactics Ogre), là aussi très convaincantes. Du côté du character design, on oscille entre le très bon (Fran, la Viera qui vous accompagnera) et le moins bon (Vaan, look androgyne perturbant au possible), d'une manière générale les personnages que vous rencontrerez auront tous un look différent, principale répercussion d'une charte graphique très dispersée (la deuxième partie de l'aventure, par exemple, est diamétralement opposée à la première). On notera que Square Enix a fourni un effort tout particulier pour la version Pal, puisqu'à défaut de proposer (enfin) un mode 60hz, on devra se contenter d'un mode 50hz très bien optimisé: pas de bandes noires sur les côtés, mais aussi une vitesse d'animation légèrement augmentée. Pour autant l'ensemble n'apparaît pas totalement écrasé et difforme, même si, évidemment, l'aliasing (déjà beaucoup présent à la base) se fait trop cruellement ressentir (essayez donc d'y jouer sur un téléviseur HD). Le seul problème vient des cinématiques qui apparaissent avoir gagné un léger flou, ainsi que des effets de scintillement lors de l'incrustation de textes. Rien de bien grave cependant. On notera enfin que le titre propose un mode 16/9 de bon aloi pour éviter le massacre sur les téléviseurs récents (enfin, récents à l'époque où le jeu est sorti). Un point noir pour finir: la caméra, perfectible comme on pouvait s'y attendre, oblige à jouer du stick en permanence afin de bien recentrer l'action. On passera sur sa relative lenteur au recentrage automatique, mais l'exercice tient de la migraine permanente dans les environnements exigus, où il faudra faire une choix entre admirer les textures des murs ou les pieds de vos personnages. En outre, les commandes sont inversées (sans possibilité de les remettre à la normale), ce qui nécessite tout de même un certain temps d'adaptation pour les non-initiés (dont je fais partie). Rien d'insurmontable cependant.
Comme nous l'avons vu plus haut, le scénario apparaît plutôt diffus, mais prend de la consistance après quelques heures. Dans les grandes lignes, nos héros sont placés au centre d'un conflit entre les royaumes de Dalmasca et d'Archadia. Après la mort du roi Rasler, Dalmasca se voit logiquement sous le joug de l'empire d'Archadia, c'est sans compter sur une poche de résistance cherchant à renverser le pouvoir à tout prix. Au milieu de ce conflit de grande se retrouve entraîné le jeune Vaan, jeune branleur (une habitude) rêvant de devenir pirate. Une chance, puisqu'il fera la connaissance de Batlhier, accompagné par son acolyte Viera Fran, tous deux pirates, à la recherche de trésors de valeurs. Une troupe tout ce qu'il y a de plus banal à la base, sauf que les péripéties qui leur arriveront le seront un peu moins. Si le character design (par Akihiko Yoshida) fait des merveilles sur certains personnages, chacun y verra midi à sa porte, puisque que selon le système de leadership en vigueur, il est possible de s'attacher certains personnages plus qu'aux autres, selon les préférences personnelles. Si certains préfèreront voir Vaan comme le héros en toute logique de cette histoire, d'autres seront attachés au charisme et à l'impertinence de Balthier, ou encore à la classe de Fran ou la bravoure de Basch. Evidemment avec une telle orientation il est parfaitement normal de constater certains personnages en retrait (c'est mon cas avec Penelo, même si en combat ce personnage s'avère être d'une utilité formidable), alors qu'il s'agit en fait d'une simple différence de point de vue d'un joueur à l'autre. Un système que l'on aimerait voir plus souvent dans un jeu, puisque les personnages sont ce qu'on en fait, même si leur rôle dans l'aventure principale reste inchangé. Du côté de l'univers, ceux qui se sont plongés avec délectation dans Final Fantasy Tactics et Tactics Ogre seront heureux de retrouver les terres d'Ivalice. Evidemment tout n'est pas exactement pareil (pour rappel il était possible dans FFTA de placer les lieux à sa guise sur la carte), mais certains passages comme les plaines d'Ozmone ou les Jagd (où les juges ne peuvent pas intervenir) sont bien présents, et on se surprend même à trouver quelques similitudes bien senties. Le monde mélange toujours magie et technologie, avec une inspiration orientale au niveau des petits villages et des plaines, et occidentale pour ce qui est de l'architecture des grandes villes. Cinq races y cohabitent, les classiques Humes (humains), les Mogs, les Vieras (créatures mystiques aux oreilles de lapin vivant reclues dans les bois, en accord avec la nature), les Vangaas (créatures aux gueules d'alligator, douées pour le combat) et les Seeqs (gros porcs versés dans la construction et le commerce). L'aspect sonore n'est pas en reste, la musique de Hitoshi Sakimoto (Final Fantasy Tactics, Vagrant Story, Radiant Silvergun, Gradius V) remplit parfaitement son office, en se montrant particulièrement oppressante quand il le faut ou au contraire très guillerette l'instant d'après, histoire de bien souffler. Les bruitages sont de facture classique pour la série, et les voix américaines sont comme à leur habitude très respectueuses de la version originale (je préfère d'ailleurs ces mêmes voix aux voix japonaises, question de goût), en plus de dégager une certaine classe. Le tout servi par une excellente traduction française, comme toujours (même si les équivalents français-anglais sont parfois difficile à cerner). Du côté de l'enrobage, on a droit à une version irréprochable, ou presque, puisque les cinématiques accompagnant les apparitions ou attaques finales des invocations sont impossibles à passer. C'est un détail, certes, mais leur longueur casse franchement le rythme en plein combat.
Côté durée de vie on se retrouve en terrain connu ici, avec une bonne soixantaine d'heures pour finir la quête principale (en prenant ses aises) et pratiquement le double avec les quêtes annexes et le remplissage de la grille des personnages. Il faut toutefois préciser que si cet épisode apparaît plus linéaire que ses prédécesseurs (la chemin le plus court entre deux objectifs est bien souvent la ligne droite, par le biais d'indications très précises sur le lieu où aller et sur ce qu'on doit y faire), tomber aussi facilement dans le piège serait une erreur. En effet, les différents donjons à explorer sont régis par des contraintes de niveau, et se ramener devant un donjon avancé du jeu avec un misérable niveau 20 sera bien souvent synonyme d'une mort certaine et pathétique. Pour remédier à cela, il est absolument vital de s'exercer, entre deux passages importants, à du grinding sauvage. Comme quoi Final Fantasy XII n'a pas emprunté aux mmorpgs que leur système de combat. Le système paraît certes archaïque pour un jeu sorti en 2007, mais les plus allergiques ne pourront pas y couper puisque tout a été pensé dans cette optique dans le jeu: les gambits permettent de défourailler du monstre sans trop se soucier de ce que l'on fait, la seule façon d'obtenir des points de permis et de l'expérience étant justement le combat pur et dur. Dans la même optique, les coffres apparaissent aléatoirement mais se révèlent généralement bien chiches en Gils (la monnaie locale, pour ceux qui n'auraient jamais joué à un Final Fantasy de leur vie). Pour se faire de la caillasse, il n'y a pas trente-six solutions, revendre son équipement inutile, économiser comme un véritable grippe-sou ou tout simplement casser de la bestiole à la chaîne. Lassant, certes, mais cela reste toutefois un passage quasi-obligé si l'on veut progresser en toute tranquillité au sein de passages plutôt tendus à la base. Là encore, côté cassage de monstres, deux choix s'offrent à vous: farmer ou chasser. La chasse des monstres consiste simplement à lire des petites annonces, y répondre, aller tabasser la bête incriminée, et recevoir un petit pactole en retour. Les missions avançant, il est possible de se constituer un véritable tableau de chasse et surtout d'intégrer un clan de chasseurs (dirigé par un certain petit Mog... nommé Montblanc) afin d'engranger un petit pécule et surtout économiser sur certains articles grâce au fournisseur officiel. Autant dire que ces missions de chasse constitueront le plus gros des quêtes alternatives à la quête principale, ce qui est d'ailleurs dommage car cela nous confronte au nombre finalement assez réduit de quêtes annexes dans le jeu (sans compter l'absence de mini-jeux). Le farming quant à lui consiste à se placer dans un coin, et tuer un maximum de monstres du même type. Durant votre génocide, vous atteindrez certains paliers en fonction du nombre d'ennemis tués d'affilée, ces mêmes paliers correspondant à des objets d'importance plus ou moins grande (du simple caillou à la queue de phénix) laissés sur les dépouilles de vos ennemis. Le principe est simple à saisir: plus l'on tue, plus l'on gagne, que ce soit en Gils, en potions diverses, ou en butins à revendre aux commerçants. Sachant qu'à un niveau élevé le concept peut se révéler très lucratif, le farming est un élément à ne pas négliger, malheureusement tourner en rond et taper sur les mêmes ennemis pendant une heure peut rapidement se révéler rébarbatif.
Reste que si le jeu est d'une longueur tout à fait conventionnelle pour un Final Fantasy, sa difficulté pourrait en surprendre plus d'un. En effet, comme nous l'avons vu plus haut, il est absolument vital de profiter du moindre temps libre pour gonfler les compétences de ses personnages, car si le début de l'aventure reste magnanime avec le joueur dilettante, un dur retour à la réalité s'effectue après quelques gros combats: le jeu est très exigeant, mais surtout peut se révéler très frustrant. Outre les monstres capables de vous tuer en un coup un seul, il n'est pas rare de se retrouver dans des donjons pendant une heure (voire deux) sans avoir la possibilité de sauvegarder, mais surtout en enchaînant les combats contre des hordes d'ennemis (comprendre 9 à 10 ennemis attaquant simultanément un même personnage, les fourbes) ou contre des bosses (oui, au pluriel). Au final le guerrier complètement dézingué que je suis s'est régulièrement retrouvé dans des situations délicates, là où le bouton 'Fuite' aurait suffi pour traverser (presque) sans encombre un niveau. Avis à la population: les level designers sont de vrais sadiques et ont décidé de vous en faire baver, à vous de prendre les devants. Si le jeu propose finalement un faible nombre de mini-quêtes, et aucun mini-jeu (sauf si l'on considère la pêche comme un mini-jeu, mais on reste loin des jeux de cartes de Final Fantasy VIII et XIX), l'ensemble des quêtes alternatives, en fil rouge durant l'aventure, arrivent à accrocher un certain moment. Outre les différents types de chasses (déjà évoquées plus haut), il est possible de se déplacer sur toute la contrée pour remplir son bestiaire (qui se transformera progressivement en véritable encyclopédie) ou la galerie des exploits (qui se remplit de figurines à l'effigie des personnages), mais surtout de partir en quête d'affaires juteuses. Les affaires représentent en fait des objets rares ou puissants qu'il est possible d'acheter aux commerçants contre la revente de butins. Evidemment, plus les butins sont rares et précieux, plus les affaires seront bonnes pour vous, d'où l'intérêt de chercher les monstres peu communs et les dépouiller de tous les objets. Au fil de l'aventure, un collectionnisme aigu s'installe, malheureusement la revente des butins ne doit pas être prise à la légère, puisque certains objets ne se débloquent que si l'on revend un nombre exact de tel butin. Sur ce plan, la revente est un point carrément obscur du jeu, et à moins de s'en sortir avec le guide du jeu sous la main on se retrouvera bien souvent à tout revendre sans état d'âme. D'une manière générale, la richesse du jeu est telle qu'il est impossible de le finir à 100% sans ce fameux guide, mais on reste en terrain connu pour un Final Fantasy.
Voilà ce que je disais à propos du jeu en février 2007 (ouh, ce recyclage éhonté), et aujourd'hui, quatre ans plus tard, je reste toujours d'accord avec cette version jeune con de moi-même. Final Fantasy XII est un de mes jeux préférés et le restera à jamais (l'espoir d'un remake ou d'une adaptation dans les années à venir n'est pas exclu), et le fait qu'un certain nombre de joueurs le traînent dans la boue ne fait que renforcer cette conviction chez moi. Malgré un Final Fantasy XIII absolument merdique, son grand frère continue d'être considéré comme le vilain petit canard de la série, mais qui se révèlera être un majestueux cygne finalement.
Car FF XII, c'est l'aboutissement de l'oeuvre de Matsuno, une oeuvre qui s'affranchit allègrement des cinématiques et des effets de mise en scène tapageurs des précédents Final Fantasy pour se concentrer sur l'aventure. Cette aventure qui est omniprésente, que l'on vit en permanence, pas seulement au travers de combats ou de cut scenes envahissantes. Chaque décor traversé est grandiose, souligné par cette simili-impression de liberté apportant une bouffée d'air frais face aux couloirs de Final Fantasy X. Certes, il n'y a pas grand-chose à faire dans le monde d'Ivalice (parler à quelques personnes, effectuer quelques micro-quêtes), mais celui-ci est vivant et semble fonctionner de son propre chef, même quand on le quitte. Même s'il n'est pas parfait de ce côté-là, le jeu est très proche d'un RPG occidental dans son approche, où les personnages sont créés pour vivre dans un univers existant, et non pas l'inverse. Evidemment faire passer le background avant les personnages est inconcevable pour un Final Fantasy, ce qui explique la haine généralisée des fans envers cette épisode, mais personnellement je trouve que l'alchimie fonctionne extrêmement bien.
Ceci dit, je peux comprendre que ce soit un mauvais Final Fantasy (et encore, il y a eu bien plus mauvais dans la série), mais que ce soit un mauvais jeu, non. En enlevant ce gênant patronyme, il reste tout de même une oeuvre-maîtresse du jeu vidéo, effectivement imparfaite et inachevée, mais empreinte d'une énorme sincérité. C'est la création la plus personnelle à ce jour de Matsuno, petit gars à part de la bande Square-Enix, qui a toujours pensé qu'un univers cohérent et l'imagination du joueur suffisaient pour raconter des aventures bien plus épiques que n'importe quel scénario, aussi bons soient l'histoire et les personnages. La psychologie en creux des personnages est évidemment directement liée à cet état d'esprit, puisque c'est au joueur de décider à qui va-t-il s'attacher, et non pas à un quelconque script de lui prendre la main (Tactics Ogre dans une certaine mesure, et surtout Final Fantasy Tactics laissaient déjà transparaître cette sensibilité de la part du game designer).
Le résultat? Un jeu qui remet la notion de Role Playing d'actualité dans le RPG, et qui invite le joueur à s'impliquer dans une histoire (qui parfois la dépasse totalement) plutôt que de rester simple spectateur. Si l'on rajoute un univers grandiose et un système de combat non-intrusif, on tient là une des aventures les plus ambitieuses que le jeu vidéo ait à offrir.