S'il existe bien une série qui sait couper son public en deux depuis des années, ainsi que des top 3 des meilleurs épisodes n'arrivant jamais à mettre deux joueurs d'accord, c'est Final Fantasy. Chaque épisode depuis le X changeant énormément, parfois plus linéaire, parfois plus libre, parfois carrément un MMORPG, s'il y a bien une chose que l'on ne peut pas reprocher à Square Enix, c'est de sortir des épisodes commerciaux à la va vite sans prise de risque. Car au delà de l'aspect linéaire ou ouvert, ce sont toujours des systèmes de jeu entiers qui sont différents, à tel point qu'en dehors d'un nom et d'un tronc commun, chaque jeu n'a presque rien à voir. Final Fantasy XV ne déroge pas à la règle, puisque après un épisode XIII ferme un et épisode XIV MMORPG, cet opus lorgne du côté du monde ouvert tout en étant non plus un RPG tour par tour mais un action RPG. Si les dix ans de développement ont fait scandale, il n'en sera pas sujet dans ce test. Quiconque connait le milieu du jeu vidéo sait que Final Fantasy XV n'a que trois ans de développement, et que le scandale des joueurs est en retard de plusieurs années puisque c'est l'annulation de Final Fantasy Versus XIII qui aurait dû faire parler. Beaucoup de tests étant déjà sortis, positifs comme mitigés, ce test donnera un avis sur des points parfois oubliés et pourtant à mon sens cruciaux.
Quiconque connait Hideo Tabata connait ses talents et ses défauts. Certes, Final Fantasy XV n'a pas le même budget que Final Fantasy Type-0, mais pourtant ces deux jeux se ressemblent sur bien des points puisqu'ils partagent exactement les mêmes qualités et défauts, même si ces derniers sont beaucoup moins graves dans Final Fantasy XV (l'expérience, sûrement). Si beaucoup de mondes ouverts ont pour défaut principal d'avoir un gameplay au mieux fonctionnel, beaucoup n'arrivent pas à se séparer d'un système de jeu trop commun et vite lassant. La première force de cet épisode, c'est d'avoir un système de combat à la fois novateur et génial qui est en plus doublé d'un système de préparation (cuisine) réussie contrairement à tous les autres J-RPG qui en général échouent sur ce point là (qui s'en est déjà servit dans un Tales Of ?). En clair, le système d'ellipse qui permet de se téléporter d'ennemis en ennemis ou en hauteur pour se régénérer est extrêmement réussi puisqu'il donne une pêche incroyable aux combats en plus de réserver une part plus stratégique que prévue. Ainsi, vous serez capables de faire, au fur et à mesure de la progression de vos compétences mais aussi de votre propre skill, des enchaînements salvateurs juste jouissifs. Tabata sait faire des systèmes de combats, puisque c'était là la grande force de Type-0 (premier point commun). En guise de défauts, il faudra malheureusement faire avec une caméra capricieuse, voire parfois imbuvable sur certains boss, et une magie qui frappe nos alliés systématiquement, même si cette dernière est surpuissante et peut dévaster la moitié de la vie d'un boss en un seul coup, pour peur qu'elle ait été améliorée au niveau des compétences et que la case Magie +3 par niveau ait été activée. La cuisine quant à elle permet de booster ses statistiques selon le plat cuisiné et selon les ingrédients trouvés ici et là. Elle est importante puisque de manière automatique le joueur cherchera un coin pour se poser avant d'entrer dans un donjon ou de faire une chasse complexe, là ou d'autres JRPG passent totalement à travers.
Le deuxième point important du monde ouvert qui a été critiqué est bien entendu celui des quêtes annexes, qui sont, il est vrai, pas vraiment intéressantes. Mais plutôt que la quête en elle même, c'est la recherche de pouvoir (monter de niveau, gagner des compétences, faire évoluer son chocobo) qui pousse le joueur à déambuler dans un monde très joli et très réussi. Au final, certaines quêtes sont intéressantes, et pour les autres, elles ne poussent finalement pas à la lassitude comme je pouvais le craindre au départ. La première partie (ouverte) de Final Fantasy XV n'est pas mise en avant pour son scénario mais plutôt pour sa découverte et son exploration, et cette partie est plutôt réussie. Prendre la voiture et mettre la radio tout en profitant du paysage, descendre et grimper sur son chocobo puis aller à la castagne, tel est le train train quotidien de ce début d'aventure. Et il est cohérent et réussi, puisqu'il se conjugue parfaitement avec l'idée d'un groupe de quatre potes en voyage qui prennent du plaisir à être ensembles. Toutes les interactions et dialogues vont d'ailleurs en ce sens et proposent quelque chose de tout à fait cohérent. Là ou pas mal de jeux tombent dans une certaines platitude voir silence narratifs une fois sortis du scénario, Final Fantasy XV essaie à chaque instant de faire garder à l'esprit au joueur qu'il est toujours dans ce monde avec ses amis et toujours impliqué. Ainsi, Prompto prendra toujours des photos, ce qui parait débile à première vue mais qui est au final vite accrocheur et en plus relié au scénario. Les personnages se plaindront de la fatigue la nuit, ils se lanceront quelques remarques en voiture, bref, Final Fantasy XV est vivant. Rajoutons que le cycle jour nuit est pour une fois important et en terme de gameplay et en terme de scénario (sur lequel on ne spoilera pas). Sachez juste que lorsque la nuit tombe, les gros monstres sortent, et Ignis vous conseillera systématiquement de ne pas prendre la voiture de nuit, qui sera stoppée par un ennemi bien plus puissant que vous. De ce fait, le joueur même, voyant la montre afficher 18h, se dira qu'il vaut mieux rentrer et n'essaiera pas (en tout cas en début de jeu) de faire le fou. Encore un charme propre au jeu dont il est difficile de décrocher.
Ensuite, toujours dans la comparaison avec Type-0, Final Fantasy XV connait deux choses communes. Le jeu a un scénario et des personnages hors du commun (on y reviendra) mais le titre subit des coupures de scènes béantes. Heureusement, on en arrive pas au point de ne rien comprendre au jeu contrairement au jeu preécédent de Tabata. Si la première partie du jeu est ouverte, c'est aussi parce que le scénario est beaucoup moins présent, à tel point que l'on se demande parfois ce que l'on fait. Mais cette question est vite sauvée par un quator de personnages qui va au delà des espérances. Je crois que c'est probablement une des équipes de personnages les plus marquantes que j'ai vues à ce jour. Si on premier coup d'oeil on pourrait se dire que ces personnages sont clichés, il faut se rendre compte que la multitude de dialogues ultra cohérents et changeants entre eux rend le tout extrêmement crédible. Ainsi, le défaut principal d'un personnage sera critique par son partenaire, et ce personnage lui même en viendra à expliquer l'origine de ce comportement ce qui le rend extrêmement attachant. De plus, l'évolution des héros est marquante (à l'instar de Type-0 qui a surpris beaucoup de monde sur sa fin), et surtout surprenante. La deuxième partie du jeu, narrative, sera une succession de scènes poignantes absolument pas prévisibles, et ce jusqu'à la fin même du jeu. Il arrivera parfois d'avoir des dialogues tout simplement incroyables en dehors même d'une vraie cut scene, comme ça. On se demande même si cela a été fait exprès ou pas mais tout ce que l'on peut dire, c'est que Final Fantasy XV est unique sur ce point là. Si les trous scénaristiques pouvaient être comblés, et si certains passages un peu trop rushés pouvaient être refaits avec un rythme plus lent pour que le joueur ait le temps de comprendre tout ce qu'il se passe et s'attarder plus longtemps sur certains événements (car oui, Tabata prévoit de changer beaucoup de choses), on pourrait avoir là sans doute l'épisode le plus remarquable à ce niveau. Car à l'heure actuelle, le soucis ne vient pas de la narration qui est remarquable (dialogues géniaux, scènes poignantes et bien écrites) mais de sa fréquence avec des élipses bien trop nombreuses.
Dans tous les cas, Final Fantasy XV, dans un même jeu propose énormément de choses différentes et innovantes. Peu de jeux peuvent vous faire passer des heures tranquilles à flâner et prendre votre temps dans un monde ouvert sur un ton plutôt léger pour ensuite vous mettre tout à coup des combats incroyables et des scènes qui vous foutent des claques dans la gueule, comme ça sans prévenir. Et ce n'est pas le chapitre 13 qui y changera grand chose. Car oui, ce fameux chapitre qui fait scandale par sa longueur et sa chiantise qui, selon beaucoup de personnes, a détruit tout le reste du jeu, dure en réalité une heure. Sur trente heures de jeu, une seule heure, nulle il est vraie, ne peut pas détruire tout une expérience. Cela dit, l'idée de le modifier par Tabata ne me déplaît absolument pas, en vue d'un seconde partie lorsque tout aura été modifié.
En résumé, Final Fantasy XV va diviser, décrié comme une arnaque ou jeu pas fini pour certains, ou jeu unique pour d'autres. Pour ma part, j'ai été touché par cet épisode qui certes, empile des défauts à vitesse grand V, mais qui propose de l'autre côté des choses absolument folles que je ne retrouverai dans aucun autre titre. Un jeu ne se jugeant pas sur une simple soustraction entre le total des qualités et le total des défauts, j'ai parcouru cette aventure de bout en bout sans jamais décrocher, sans lassitude, et nul doute que cet épisode fera parler de lui pendant très, très longtemps. Dans tous les cas, chapeau à Tabata d'avoir en trois ans réussi à pondre un jeu aussi ambitieux en partant sur des ruines et aucune expérience significative sur un gros épisode. Il n'y a plus qu'à espérer que les défauts les plus génants du titre seront corrigés pour offrir un jeu encore meilleur. Faites vous votre propre avis, car c'est un jeu à faire absolument si vous aimez les JRPG.