C’est sans grande excitation et un peu par hasard que je me suis lancé dans l’odyssée de Ghost of Tsushima, un action-aventure développé par Sucker Punch et édité par Sony dans cette période de fin de vie de la PS4 et de lancement de la neuvième génération de consoles de salon. Il semble néanmoins à partir de mes premières heures de jeu que cette épopée, dans un Japon médiéval inconnu du grand public et peu traité dans la fiction, réussit là où tous les opus d’Assassin’s creed ont pendant longtemps échoué : un monde ouvert à la beauté saisissante, à l’aventure exaltante et aux combats dynamiques et brutaux. Mais nous y reviendrons plus tard.
Tout d’abord, il faut préciser que le cadre historique dans lequel les développeurs du jeu nous plongent a pour le moins été très peu utilisé de manière générale dans les œuvres de fiction. L’invasion mongole du Japon en 1274 n’est effectivement pas un événement historique majeur constitutif de l’histoire de la civilisation occidentale de laquelle, nous joueurs européens, sommes abreuvés habituellement à longueur de films ou de séries. Bref, ce sujet est très peu traité et c’est ce qui peut expliquer en première instance la curiosité, l’engouement initial et dorénavant le succès incontestable de cet open-world même si quelques libertés, et ce de manière assumée par les développeurs, ont été prises dans la retranscription historique et culturelle des événements. Le Japon féodal de l’époque de Kamakura qui constitue une des huit subdivisions traditionnelles de l’histoire nippone est donc le cadre du jeu lui-même circonscrit géographiquement à l’île de Tsushima, aux premières loges des invasions provenant du continent. La carte du jeu divisée en trois zones est gigantesque rappelant les derniers opus de la franchise Assassin’s Creed tels qu’Odyssey avec la reconstitution des îles de la Grèce antique ou encore les ergs à perte de vue d’Origins. La largeur de la map est un des principaux atouts du jeu. Bien que certains joueurs puissent trouver cela assez copieux, les quêtes à réaliser sont suffisamment nombreuses et diversifiées pour y trouver tout de même son compte. De plus, le jeu apporte son lot d’innovation notamment en matière de « géolocalisation ». Ce n’est plus simplement un curseur, placé au préalable sur la carte du menu, à suivre par le joueur mais l’orientation du vent qui indique à ce dernier la direction du prochain objectif.
Au-delà de cette innovation de gameplay, on retrouve les grands classiques des jeux d’action-aventure qui veulent se donner un côté un tantinet RPG avec la personnalisation de son personnage ou l’amélioration de son équipement. Mais le grand bouleversement de ce Ghost of Tshushima, c’est bien son système de combat très dynamique et présentant plus de difficultés de prises en main que ses pairs. A mesure que le joueur progresse, son personnage gagne bien sûr en puissance : cela n’altère pas, cependant, l’immersion dans les combats et la nécessité d’adopter une stratégie d’approche spécifique via le choix d’une posture de combat en fonction du type d’ennemi, chose dont on pouvait allègrement se passer dans les jeux similaires antérieurs (la totalité des Assassin’s Creed jusqu’à Origins). La réactivité et la retenue sont de mise pour venir à bout méthodiquement de tous ses adversaires parfois largement en surnombre et ne souffrant pas trop du syndrome du « j’attends que mon pote ait attaqué le héros avant de tenter ma chance ».
Les décors sont magnifiques et c’est un vrai plaisir de déambuler à cheval dans les vastes plaines de hautes herbes, les rizicultures, les plages ou les forêts. Même si certaines animations ne sont pas convaincantes comme l’eau des cascades ou les ombres des personnages, l’ensemble produit un visuel réaliste et un environnement plaisant avec lequel interagir.
Finalement, l’histoire est intéressante et parvient avec une certaine justesse à reprendre des thématiques constitutives du cinéma japonais jusqu’à permettre au joueur d’activer le mode Kurosawa s’il choisit de s’immerger complètement dans l’atmosphère des films japonais des années 50: un mode en noir et blanc et à la pellicule vieillissante. Sans aller jusqu’à activer ce mode pour l’ensemble du jeu, je recommande évidemment de jouer au moins en VO sans quoi toute l’intrigue et les interactions entre les personnages perdent de leur saveur. L’intrigue, parmi les thématiques reprises, met en exergue la remise en question du héros-guerrier partagé entre deux voies : agir selon le code d’honneur des samouraï dont il est l’héritier ou suivre un chemin plus sombre, plus discret, celui du fantôme, mais c’est l’alliance des deux qui s’avère en fin de compte indispensable pour survivre et prendre sa revanche dans un pays occupé par un ennemi organisé et largement supérieur en nombre.
Un excellent divertissement qui vous tiendra en haleine de longues heures et qui n’a rien à envier aux classiques du genre.
Fourchette de notes: 7-9/10 à affiner d'ici la fin du jeu