C'est difficile pour moi de commencer cette critique. Pour deux raisons.
La première est l'influence que ce jeu a eu sur ma personne. Mon point de vue sur les FPS, et même les jeux en général. Peu de jeux ont autant influencé ma manière de jouer, de profiter, et celui-ci l'a fait.
La deuxième est l'influence qu'il a eu sur les autres jeux. Elle est très grande. Doom a créé le genre, Half-Life l'a scénarisé.
Pourquoi Half-Life est-il aussi bon et influent ? Qu'a-t-il de plus que les autres jeux n'ont pas ? Dans un marché dominé par des jeux hollywoodiens à base de QTE et cutscenes, comment se positionne-t-il, après bientôt 20 ans d'existence ?
On incarne Gordon Freeman, un fraichement diplômé de 27 ans qui est en retard pour aller à son boulot, à Black Mesa. De la même manière que Link dans Zelda, Gordon est un héros silencieux. "Un homme d'action et pas de parole." Vous ne connaissez son visage que grâce à la boîte du jeu, et les menus.
Autant dire que l'introduction du jeu est culte, et n'a pas pris une ride. Vous démarrez dans un wagon vous faisant traverser tout Black Mesa jusqu'au secteur où vous travaillez. Aujourd'hui, on pourrait voir cette scène avec peu d'intérêt, car justement, la plupart des jeux ont pris Half-Life comme modèle concernant la mise en scène. Cette façon de faire, bien faite ou pas, est devenue une norme.
Mais mettez-vous dans le contexte : Vous êtes en 1998, vous venez de finir votre petite run de Quake. Dès la première seconde de jeu vous tabassez des ennemis, vous avez traversé ce niveau labyrinthique à tuer des dizaines d'ennemis, et puis vous trouvez la sortie. vous avez eu votre dose de kills, de satisfaction. Vous êtes content. Qui est votre personnage ? Quel est cet univers médiéval ? Où sommes-nous ? On ne se pose pas la question, ici le scénario, on s'en fout. On est là pour tuer.
Wolfenstein 3D, Doom, Quake : id Software a fait des jeux incroyables, mais la scénarisation dans le jeu vidéo ne correspondait pas à leurs idéologies. Doom étant déjà un modèle, on a pu voir arriver une quantité de Doom-like, tous plus ou moins bien, certains ont même survécu (Salut Shadow Warrior).
Et puis Half-Life arriva. Tandis que tous les autres jeux s'attardaient à faire comme Doom, c'est-à-dire de la boucherie sans se poser de questions, Valve a décidé de faire les choses différemment, tout en s'inspirant. Vous commencez Half-Life et vous vous retrouvez pendant 10 bonnes longues minutes à attendre dans une rame à regarder le complexe de Black Mesa tout autour de vous, sans armes, sans interface. Vous écoutez la voix de la rame qui vous parle, mais vous ne faites absolument RIEN. C'était quelque chose d'extrêmement différent à l'époque. C'était l'immersion.
On ne tue pas un seul monstre le premier quart d'heure du jeu.
Vous allez arriver à destination, et allez procéder à des expérimentations dans la chambre de test. Malheureusement, ça va mal tourner, créant donc une "Resonance Cascade" ouvrant un portail entre la Terre et une autre dimension pleine de monstruosités, envahissant Black Mesa. Votre but sera donc de survivre et de retourner à la surface.
Pour ce scénario, Valve s'est inspiré de films comme "Alien" ou de livres comme "The Mist" de Stephen King. Autant dire que les amateurs de SF/Horreur sont servis.
Je n'en dirai pas plus sur le scénario afin de vous laisser la surprise, pour ceux découvrant Half-Life.
Le gameplay est tout simplement excellent. L'iconique combinaison CEH est un prétexte pour expliquer la résistance de Gordon à son environnement. Sans cette tenue, Gordon ne ferait pas long feu. "Mais que vaut un bouclier sans une épée ?"
La toute première arme du jeu qui vous aidera un minimum à survivre est symbolique. Le pied-de-biche, à la base un outil, est devenu l'icône de la franchise, voire même une véritable icône du jeu vidéo.
Dans Half-Life, vous aurez souvent besoin d'utiliser la bonne arme au bon moment et au bon endroit. À la différence de Doom où on constate surtout une hiérarchie entre les armes.
Le jeu est très linéaire, vous n'êtes pas dans un niveau labyrinthique. Le jeu a un chemin tracé du début à la fin. Sauf qu'ici, c'est voulu et bien fait.
Le bestiaire est vraiment impressionnant. Le design global des ennemis est vraiment réussi, et chacun possède des caractéristiques qui nous force à changer notre manière de jouer. Cela va du crabe de tête, où sa mobilité est plus gênante que sa force, jusqu'au Vortigaunt qui lui vous envoie une décharge inévitable. Mais les aliens ne sont pas la seule menace...
Le rythme global du jeu est assez régulier, même si certains chapitres sont parfois légèrement trop longs.
La maniabilité est vraiment bonne... Sauf concernant les échelles.
Les musiques sont juste géniales. Contrairement à beaucoup de jeux, Half-Life ne possède pas un thème principal. Les musiques contribuent à l'immersion et forment un tout. C'est une réussite.
Même si l'on sent que la qualité des doublages a vieilli, les sons sont globalement très bien travaillés, dont même certains devenus iconiques (le cri du headcrab qui meurt).
Le jeu possède un nombre incroyable de mods, où vous pourrez très bien jouer à des histoires créées par d'autres joueurs. Ce jeu est l'exemple même de l'importance du modding. Counter-Strike était un mod d'Half-Life, Team Fortress également,
Le moteur du jeu étant une grande modification du moteur de Quake II, ça fait le taf. Graphiquement, cela n'a pas tant vieilli que ça, le jeu a toujours un certain charme visuel.
Half-Life est un classique. Ce jeu marque un tournant dans la façon dont les jeux nous racontent une histoire. Il est devenu un modèle pour la plupart des FPS sortis par la suite. Les FPS modernes s'en sont tellement inspiré qu'il est aujourd'hui difficile de voir ce qu'il a de spécial, sans recul. De la même manière que le tout premier Super Mario Bros et son level design exemplaire, mais transparent aux yeux d'un joueur du nouveau millénaire.
Half-Life a marqué l'histoire du jeu vidéo comme l'a fait Doom. C'est un jeu incontournable pour tout amateur de FPS. Du début jusqu'à la fin, pas de cutscenes, pas de QTE, juste le point de vue de Gordon Freeman, avec comme seules divisions de rares chargements. C'est ce qui fait la force d'Half-Life, et c'est ce qui le différencie autant des autres jeux.
Half-Life, avant même d'être un gameplay vraiment super, est autre chose. Ce que vous retiendrez de ce jeu après un certain nombre d'années est ce que tout excellent jeu devrait apporter.
"Une expérience."
PS: Ceux n'ayant pas envie de jouer à ce jeu à cause de ses graphismes ou autres, je vous conseille de vous diriger du côté du jeu "Black Mesa", le remake d'Half-Life. J'en ai fait également une critique.