Hotel Dusk Room 215 est une étrangeté à tenter. L’idée centrale semble être ceci : utiliser la DS de travers pour pouvoir utiliser les deux écrans comme deux panneaux en 9:16. Ce procédé est central dans ce jeu d’enquête très bavard où chaque personnage occupe un écran. Entre la bande dessinée et le roman-photo, Hotel Dusk tient justement sa force dans ses dialogues et son intrigue.
Bien que le récit se présente comme un roman noir, j’ai eu l’impression de me trouver dans un roman policier classique à la manière d’Agatha Christie. Tout comme « And Then There Were None » ou « Le crime de l'Orient-Express », le récit se déroule dans une unité de temps et de lieu limitée. Toute l’histoire tient sur une soirée et dans un lieu unique qu’est l’Hotel Dusk. Chaque personnage présent est donc central pour l’énigme et cache des secrets qu’il faut dévoiler.
Toutefois, pensez plutôt à un visual novel qui emprunte des éléments d’enquête. Le joueur ne mène pas une véritable enquête, il cherche plutôt à faire avancer l’histoire en débloquant la situation à travers des sortes de petits puzzles ou des dialogues. Fondamentalement ultra-linéaire, n’espérez pas un gameplay d’enquête à la manière de « Return of the Obra Dinn », mais plus un jeu d’aventure point’n’click limité.
Si on prend nos standards d’aujourd’hui pour juger le gameplay de HDR215, on est forcément déçu. Le jeu est soit beaucoup trop guidé (exemple, le personnage qui dit à haute voix « tiens, je devrais aller à la réception » -> on doit aller à la réception) ou bizarrement complexe (si on n’inspecte pas certains objets, le jeu n’avance pas). Globalement, HDR215 utilise l’écran tactile de la DS comme une gimmick qui peut être parfois marrante (crocheter une serrure, rembobiner une cassette avec un crayon) ou parfois de manière totalement agaçante (décorer un sapin de Noël, ou faire une partie de bowling avec les pires contrôles imaginables).
Certaines passages demandent même de fermer la DS pour débloquer une situation. Sans dévoiler ces situations, je dois avouer que ce sont des moments particulièrement imaginatifs. Je vois d’ailleurs difficilement comment ces moments de gameplay vont survivre sans y jouer sur DS.
Pour continuer avec les éléments moins réussis : la musique est très générique et donne l’impression d’être bloqué dans un ascenseur d’hôtel pseudo chic et les graphismes (hormis les personnages animés) sont très élémentaires. On sent clairement que l’équipe de développement a fait avec peu de moyens (et c’est ce qui fait aussi son charme).
Hotel Dusk Room 215 est un piètre jeu mais un visual novel très réussi. L’histoire et les personnages sont admirablement bien écrits et crédibles. Le fait d’être en huis-clos avec peu de personnages crée un fort lien entre les personnages et les auteurs ont réussi à me maintenir en haleine dans une histoire relativement simple mais dont on ne soupçonne jamais le déroulement final. Par contre, les moments « questionnaires à choix multiples » à la fin de chaque chapitre : non merci.
Tout tient dans les dialogues et dans l’animation des personnages qui sont prodigieusement mis en mouvement rotoscopique. Je suis particulièrement fan de « smirk face » Kyle Hyde et Louis est vraiment réussi dans le rôle de loser sympathique.
Je peux paraître très négatif dans mes lignes mais j’insiste : ce jeu a un charme fou et une ambiance très réussie. Une petite magie que l’on trouve rarement. J’espère vraiment qu’un remaster permettra de donner une seconde vie à ce jeu qui semble être condamné (dans l’état) à être bloqué sur DS.
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