LucasArts et moi, c'est une grande histoire d'amour qui, étrangement, n'a commencé que très récemment (3 ou 4 ans tout au plus) après l'installation du fameux émulateur ScummVM. En effet, même si je connaissais déjà le monde du point 'n' click grâce à certains jeux pour enfants tels que Sam Pyjam et ce genre de trucs qui initient au style, j'ignorais tout ou presque de l'univers LucasArts des années 90. Et après avoir tâté un peu le terrain, certains point 'n' click de LucaSarts sont vite devenus parmi mes jeux préférés. Outre Indiana Jones and the Fate of Atlantis sur lequel je m'apprête à "disserter", j'ai adoré le très loufoque Day of the Tentacle ou la série des Monkey Island pour ce savant mélange entre aventure mouvementée et humour bien déjanté. Et pour en venir à cet Indiana Jones and the Fate of Atlantis, parfois connu chez nous sous le nom d'Indiana Jones et le Mystère de l'Atlantide, si ce n'est définitivement pas le jeu le plus difficile et le plus original de la franchise LucasArts, il bondit toutefois en haut du podium des jeux les plus géniaux du studio... en tout cas en ce qui me concerne.
Encore une fois, un jeu comme Day of the Tentacle est sûrement plus riche, tant au niveau du gameplay que de l'originalité comme je l'ai mentionné plus haut. Seulement, Indiana Jones and the Fate of Atlantis tient une place toute particulière dans mon estime puisque j'ai toujours adoré les films et les jeux proposant une aventure avec le fameux concept simpliste qu'on peut résumer en "trouver tel objet/lieu millénaire perdu depuis des siècles et convoité par tel ou tel hurluberlu mégalomaniaque" ; le tout assorti d'une quête initiatique du héros, bien entendu. Et comme j'aime la saga cinématographique des Indiana Jones — enfin la trilogie des années 80, pas la daube de 2008 — qui fait partie de mes premiers souvenirs en matière de cinéma d'entertainment, savoir qu'un jeu propose un scénario inédit aux aventures de l'archéologue le plus célèbre de la planète attise immédiatement mon enthousiasme.
En 1939, suite à la découverte d'une étrange statue dans les sous-sols d'une bibliothèque américaine, le professeur Jones se retrouve mêlé à une course contre les nazis afin de dénicher et de percer les mystères du continent perdu de l'Atlantide qui, s'il existe réellement, cacherait peut-être un immense danger pour l'humanité. De plus, Indiana Jones sera épaulé par une mystérieuse voyante tout au long de sa quête. Voilà, c'est une trame simple mais suffisamment aguicheuse pour l'aventurier rêveur que je suis au fond de mon être. En tout cas, ne nous leurrons pas : quelque part tout n'est que prétexte à parcourir divers endroits sur le globe afin de dénicher tel bibelot qui servira à tel endroit pour ouvrir telle porte ou pour soudoyer tel personnage. Un voyage d'un point A à un point B, d'un point B à un point C, d'un point C en retournant au point A... certes, Fate of Atlantis ne parlera peut-être pas aux joueurs de point 'n' click habitués aux challenges corsés à la Myst ou à la Riven. Cependant, bien que Fate of Atlantis soit nettement plus abordable qu'un Myst, ou même légèrement plus facile que Maniac Mansion ou Day of the Tentacle histoire de rester chez LucasArts, les aventures du doctor Jones sont quand même loin d'être une partie de plaisir.
Comme d'habitude chez LucasArts, ce qui frappe au départ c'est la prise en main intuitive avec le tableau des actions (parler, ouvrir, donner etc.) en bas à gauche et l'inventaire en bas à droite. Rien de surhumain (à part peut-être les confusions entre "prendre" et "utiliser" quand il s'agit d'interagir avec un véhicule et ce genre d'emmêlement de pinceaux) : comme l'indique si bien le terme "point 'n' click", on pointe et on clique sur un objet à ramasser, sur un personnage à qui parler ou sur une porte à ouvrir pour avancer dans le jeu. Ainsi, il est surprenant de constater la variété et l'ingéniosité des énigmes de Fate of Atlantis qui pourtant ne reposent que sur ce système de pointer et cliquer. Des puzzles, casse-têtes en tous genres, il y a même quelques combats dans le jeu, même si je n'ai pas tout saisi dans le fonctionnement du gameplay à ce moment-là, mais généralement ces derniers ne posent pas trop problème. En tout cas, l'avancée de Fate of Atlantis repose aussi énormément sur les choix effectués dans les dialogues avec les différents PNJ ; choix qui influeront carrément le déroulement de la quête puisque le jeu propose 3 scénarios différents : un porté sur la coopération, un autre blindé d'énigmes et un autre plus musclé. Je ne vais pas tous les détailler pour ne pas gâcher la surprise mais en gros Indy visitera des lieux différents selon la tournure des événements en laissant souvent au joueur le choix de la destination.
Et quels lieux ! Sans spoiler, Fate of Atlantis alterne entre des passages bien Indiana-Jonesques avec des cavernes ou des temples perdus blindés de pièges et des paysages plus urbains. D'ailleurs, ces derniers sont tantôt bien inscrits dans l'époque pré-WWII (aux USA par exemple), tantôt très fantasmés comme cet Alger dépeint à la sauce orientaliste bien clichée mais bien cartoon avec ses souks bordéliques où l'on vend tout et n'importe quoi et même une superbe chevauchée à dos de chameau dans le désert ou une escapade en montgolfière selon le scénario choisi. Mais ça n'est pas un mal de voir tant d'archétypes, loin de là : l'univers Fate of Atlantis rappelle constamment que LucasArts ne lésine jamais sur l'humour dans ses jeux. D'ailleurs, le jeu est blindé de petites touches de fun, d'éléments qui ne servent à rien sinon ajouter une ou deux lignes de texte bien poilantes avec en prime un doublage anglais vraiment sympathique (mais je crois que c'est propre aux versions de 93, enfin pas sûr du tout pour le coup). Même la musique, pourtant limitée par la technologie de l'époque, a un côté burlesque vraiment plaisant. En gros, tout est fait pour donner envie au joueur d'explorer l'intégralité des décors qui s'offrent à lui, surtout que le visuel — malgré son âge — a un certain charme. Je pense par exemple à certains décors de grotte avec l'eau qui s'écoule et tous ces petits détails, ou encore aux éléments architecturaux qui sont parfois impressionnants (et là je laisse la surprise). Force est de constater que le jeu a vraiment plutôt bien vieilli et que le jeu dégage toujours une certaine aura !
Plus haut je parlais de la prise en main immédiate. Pourtant, malgré ça, la quête n'est pas vraiment une chose aisée et il m'est arrivé de me sentir complètement perdu parce que je n'avais pas cliqué de partout et que je n'avais pas pensé à telle combinaison hautement improbable des items à ma disposition. Après, c'est ce qui fait le charme de cet Indiana Jones et des point 'n' click en général. Mais c'est vrai que c'est parfois frustrant de tourner en rond parce que l'on n'a pas cliqué de partout et qu'il nous manque un élément clé pour continuer. Je pense par exemple à la longue énigme à propos de Platon ou encore l'utilisation des boules d'orichalque : il y a parfois une nécessité d'accomplir certains objectifs dans un ordre précis et ça le joueur ne s'en rend pas toujours compte. Il y a même certains moments où il faut contrôler la miss Sophia, cette mystique étrange qui accompagne Indiana Jones durant toute sa quête. Et là aussi, on ne sait pas toujours quoi faire avec elle. Enfin, j'évoquais une montgolfière un peu plus haut : certaines phases de gameplay amènent le joueur à piloter certains engins et là ça n'est vraiment pas de la tarte ! Quand je vois par exemple qu'il faut garder le contrôle de la quantité d'air présente dans la montgolfière tout en faisant attention au vent qui tourne, je me dis que la précision atteint parfois la fameuse précision "frame perfect" : il y a vraiment des trucs qui se jouent au pixel près ! Mais bon, une fois de plus que serait un jeu Indiana Jones sans un level design parfois labyrinthique et des énigmes tortueuses ? Surtout que ce n'est pas le genre de jeu où le game over arrive à tout va : il faut vraiment y aller pour crever complètement.
Enfin voilà, Indiana Jones and the Fate of Atlantis offre une aventure vraiment riche en rebondissement sans pour autant offrir d'intrigue alambiquée. Tout est conçu pour que le joueur se prenne à rêver de prendre un fedora et un fouet et d'aller rechercher la Sainte-Lance sous le KFC de Lyon Part-dieu, de trouver le tombeau de Noé sous une barre de HLM à Porte de Clichy ou de débusquer une cité d'or dans les sous-sols de l'église Saint-Sulpice de Fougères. Sur ce point-là, ça fonctionne : on se sent Indiana Jones, on est à fond dans l'aventure et on ne voit pas le temps passer. Et surtout, Indiana Jones and the Fate of Atlantis signe le véritable Indiana Jones 4 puisque le scénario du jeu montre quels étaient les ambitions de Spielberg et de Lucas quand un quatrième film était annoncé peu après la Dernière Croisade. Donc ma question est : pourquoi avoir pondu une merde à base de crânes de cristal quand une quête autour de la mythique Atlantide aurait été absolument fantastique ? Mystère... En tout cas, Indiana Jones and the Fate of Atlantis reste mon point 'n' click préféré, pour son charme plus que par son challenge en fin de compte même si on a vu ensemble que ça n'était pas toujours de la tarte. Un jeu exceptionnel, le meilleur de la franchise des Indiana Jones, qui plus est rejouable plusieurs fois sans problème. Par-contre, le jeu d'action Fate of Atlantis n'est vraiment pas terrible : préférez-lui vraiment le point 'n' click d'origine ! Et puis, c'est le jeu idéal pour découvrir l'univers LucasArts alors... foncez !