Kingdom Come: Deliverance
7.2
Kingdom Come: Deliverance

Jeu de Warhorse Studios et Deep Silver (2018PlayStation 4)

Du vrai rpg, pensé par des mecs probablement un peu en marge des canons actuels. Obligé, car pour nous pondre un truc comme ça, il faut soit se foutre royalement des mécaniques modernes, soit volontairement décider de faire l’inverse de tout le monde.


Alors oui, c’est constellé de bugs, et il faudra attendre au moins 72 heures de mise à jour pour pouvoir jouer à un jeu fini. Mais ce qui est proposé derrière est vraiment intéressant.
C’est un parti pris qui ne plaira pas à tout le monde. Tous les compartiments classiques du rpg ont fait l’objet d’une attention particulière.


Le crochetage ? Un mini-jeu sadique qui oblige le joueur à doser deux gestes sur les joysticks. La chasse ? Des moments de frustrations continus dans lesquels le joueur doit apprendre à tirer à l’arc en gérant la distance, la courbure du tir, l’absence de viseur, la fatigue du bras. Le craft ? Beaucoup d’organisation pour cuisiner ses potions, comme en vrai, sur un établi, en suivant une recette à la lettre. La lecture ? Une compétence qui s’acquiert et se travaille. L’infiltration ? Un tas de paramètres à gérer pour être le plus furtif possible.


Et bien évidemment, le summum, c’est le système de combat. Punitif, car au plus proche de ce que doit être un duel à l’épée : 8 combinaisons de coups disponibles, une gestion du timing, de la fatigue et du poids. Et des duels parfois longs de 15 min, où il faut sans cesse tempérer, juger la posture de l’adversaire, s’adapter à son armure et savoir porter le bon coup.


Sinon, le jeu est beau. Les mecs se sont lâchés sur les effets de lumière surtout. Mais par volonté de réalisme, le jeu ne propose aucun lieu exotique. Pas de décors fantastiques, rien d’incroyable. Juste des villages, des auberges, des châteaux, un monastère, des plaines et beaucoup de forêts, toutes très denses, autant que des vraies. Car les mecs se sont aussi lâchés sur la végétation. Franchement, s’il n’y avait pas eu la map pour venir à mon secours, je me serais perdu non-stop dans les forêts. Quant à la carte, elle est grande juste ce qu’il faut. Mais surtout, elle est bien remplie, et c’est là l’essentiel.


Les quêtes sont intéressantes, toutes scénarisées avec soin, et étalées en plusieurs phases. Influence de Witcher 3 disent certains, tant mieux. Ce qui est bien, c’est que même lorsqu’on croit plonger dans des quêtes fedex, on s’engage toujours sur des chemins semés d’embûches. Aucune quête n’est sans défi. À côté de ça, on a largement de quoi s’occuper avec les activités en tout genre. Niveau contenu, ya vraiment rien à redire, c’est excellent.


Deux autres gros points forts à mes yeux :


D’abord la promesse d’avoir un impact sur son entourage. Elle est tenue. Ici, la façon dont on s’habille, nos méfaits, nos bienfaits, notre hygiène, nos armes, tout pèse sur la relation avec celui qu’on a en face de nous. D’ailleurs, le menu a un onglet réservé à la gestion de la réputation dans chaque ville. De même pour les dialogues. Les réponses sont subtiles, et les moyens d’arriver à nos fins variés.


Ensuite, une idée toute simple, mais qui influence totalement la manière de jouer, c’est celle d’impliquer l’action dans la progression. Vous voulez monter en compétence crochetage ? Eh bien crochetez. Vous voulez être meilleur à l’épée ? Alors combattez. Pour évoluer dans un domaine, il faut le pratiquer.


À mes yeux, ces choix de gameplay cherchent à immerger le joueur dans un univers réactif, l’invitent à jouer intelligemment. C’est une immersion omniprésente, qui se niche partout. Avec parfois des idées toute simple, mais qui fonctionnent. Quelques exemples en vrac qui m’ont plu : les cartes au trésor sous forme de jeux de piste. Le système de sauvegarde restrictif (il faut dormir dans SON lit, ou boire une boisson spécifique). Le fait de pouvoir vivre de chasse, de pêche et de négoce si on le souhaite. Le fait de devoir porter un flambeau lorsqu’on marche la nuit en ville, sous peine d’être repris par la garde nocturne qui trouvera notre comportement suspect. Ect, etc.


Le contre coup de tout ça, c’est une lourdeur générale, probablement ce qui a fait fuir plus d’un joueur. L’interface du menu, lente, vieillotte, et surchargée. L’aspect rpg sans demi-mesure, bourré de stats à gérer, d’informations à retenir. Les chargements longs. Et enfin, les bugs qui sont surtout des problèmes de clipping et de LOD chez moi. Des défaillances techniques qui, pour ma part, ne m’ont jamais ralenti. À vrai dire, je m’en fous totalement qu’un jeu soit perfectible à ce niveau. Je préfère mille fois une expérience audacieuse et buggée, qu’une expérience optimisée mais convenue.


Un autre défaut, assez gênant celui-là, c’est que le système de combat n’est pas du tout adapté aux batailles, qui sont incroyablement bordéliques. Le lock part dans tous les sens. Les mecs se marchent dessus, les ennemis nous visent une seconde, puis nous oublient, nous visent de nouveau, partent, puis reviennent, bref, du grand n’importe quoi qu’on pourrait jouer sur du Benny Hill.


Au-delà de ces défauts, il me faut vous avertir de certains détails.


Premier avertissement : le doublage français est atroce et totalement buggé. Un conseil : mettre les voix en anglais (avec sous-titre français bien sûr).


Deuxième avertissement : le jeu démarre vraiment après plusieurs heures d’intro. Une entrée longue, et qui a de quoi décourager, car elle nous plonge d’emblée dans une situation difficile. Pour cause, j’ai passé mes premières heures, en danger, démuni, blessé, sans pouvoir me soigner. Pour le coup, les mecs n’ont pas trop réfléchi à ce qu’ils faisaient.


Troisième avertissement : le jeu n’est pas bourré d’action comme le laisse penser le trailer. C’est beaucoup d’enquêtes, de dialogues, de moments paisibles. On comprend très vite qu’il faut éviter les confrontations. Trois mecs bien armés contre vous, et vous êtes foutu. Il n’y a vraiment qu’en progressant, qu’on ira de plus en plus au combat.


Ce qu’il faut retenir c’est qu’on a là un rpg hors sentier, qui revient vers des aspects écartés petit à petit du genre. On sent que les mecs sont fans des Morrowind, et autres vieux jeux difficiles. Le truc, c’est que le produit est vendu comme un triple A. De loin, on pourrait croire à un Skyrim. Sauf, que c’est plus retors, moins complaisant, plus radical que n’importe quel rpg sorti ces dernières années. Mais surtout, on ne retrouve pas ce gameplay moderne, décliné dans tous les gros jeux actuels, qui veut rendre chaque action cool et souple. Ici tout est lourd, exactement comme dans un jeu de simulation. KGC n’a rien de séduisant, et en cela il me plait énormément.


Et vous l’aurez peut-être noté, mais je n’ai pas parlé de l’aspect historique, ultra documenté. Tout simplement, parce que tout le monde en parle déjà, et que je voulais me concentrer sur le gaming.
Et je crois d’ailleurs en avoir fait le tour.

-Alive-
9
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le 20 sept. 2018

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-Alive-

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