Après 4 mois, il est temps pour moi de revenir sur ma lecture de Higurashi no Naku Koro ni.
(Ma critique ne donne pas de réponses précises sur les principales énigmes du jeu. Ne la lisez pas cependant si vous souhaitez conserver intacte votre découverte de l'oeuvre).
Je le précise tout de suite : Je ne suis pas un féru de Higurashi et je n’ai aucune intention de porter les œuvres de 07th Expansion au pinacle de tout ce qui a été fait depuis l’avènement de l’humanité. Bien au contraire, Higurashi n’est ni une œuvre exceptionnelle, ni même véritablement un chef-d’œuvre. C’est juste une belle œuvre, avec des personnages réussis. Des émotions qui circulent de temps à autre, des scènes épiques, des personnages qu’on déteste puis qu’on adore, une énigme à résoudre… Bref, le parfait cocktail de tout ce qu’on fait de meilleur aujourd’hui au Japon.
Là où ma critique frappera, ce sera avant tout sur la forme. La première partie notamment est particulièrement redondante. Ce qui faisait l’une des forces d’Umineko (que j’ai fait avant Higurashi, je le précise), c’était cette non-linéarité du récit, cette évolution constante, chose que Higurashi ne cherche pas à faire. C’est donc très basique, on passe sur les 3 premiers tomes de l’histoire de Rena à celle de Mion à celle de Satoko, avec toujours le même schéma dedans, à savoir « Scènes de vie » puis « Enquête et meurtres ». Et c’est à peu-près la même chose pour les tomes réponses. Non seulement, cette façon de faire est vraiment paresseuse, mais elle est en plus loin d’être positive pour le lecteur. Lors de ma lecture, je me sentais déjà un peu trahi de devoir « switcher » d’un personnage à l’autre comme si de rien n’était alors que, comment voulez-vous, après un climax aussi fort que la fin du tome 2 avec Mion, réussir à passer tranquillement sur des scènes de vie avec Satoko ?
On constate qu’il y a un manque d’unité dans Higurashi entre les tomes. Les personnages ont plus tard le culot de dire qu’ils se rappellent sans vraiment se souvenir des aventures qu’ils ont vécues sur les précédents tomes. Quand ? Comment ? Pourquoi maintenant ? C’est absurde quand on y pense.
Mais, je critique, je critique, il n’empêche que ça ne m’a pas non plus complétement gêné lors de ma lecture. Comme un peu tous, j’ai (pour revenir à mon exemple) aimé le tome 3 et j’ai eu une envie ardente de défendre Satoko coute que coute (ouais, ça a beau être un VN avec des personnages figés et tout, on s’y prend facilement à cœur). C’est car le fond reste quand même très réussi dans Higurashi qu’on en vient à oublier (trop) vite les défauts de la forme. C’est peut-être quelque chose que j’aurais laissé de côté si j’avais écrit une critique de Higurashi juste après l’avoir fini (ce que j’ai fait d’ailleurs : lien (plus bas, attention spoil sévère)), mais que je ne peux laisser de côté aujourd’hui. Quand tu y penses d’ailleurs à ce tome 3, il est assez facile : Une première partie où on va faire adorer Satoko, une seconde où on va te donner envie de la protéger jusqu’au péril de ta vie. Ryukishi joue avec nous… Ces coupures faciles se retrouvent à peu-près dans chaque tome, plus ou moins bien exécutées. C’est dans le tome 7 où je trouvais cela particulièrement réussi car ces coupures se multipliaient au fil du tome, on passait très bien de l’espoir le plus fort au désespoir le plus profond en 2-2 et inversement, c’était super bien exécuté…
Mais dans l’ensemble, je trouve ces coupures trop brusques. Rien d’étonnant à ce que le tome 4 m’est apparu comme une bouffée d’air car il présentait enfin un déroulement différent.
… Et puis une narration différente. C’est quelque chose que j’avais particulièrement du mal avec Higurashi : Subir la narration de ce gamin de Keiichi. Shion le fait d’ailleurs si bien remarquer dans ce screen du tome 5 : lien. Mon dieu ce qu’il est lent ce gamin, particulièrement dans la seconde partie du tome 2 : Admettez-le, il ne se passe RIEN dans cette seconde partie. Keiichi est plus que passif, la narration est d’une lenteur, c’est vraiment difficile de lire ça après une première partie aussi géniale (qui est ma partie préférée des arcs questions, ce dit en passant). Akasaka, c’est déjà autre chose bon sang. Et je ne parle pas de Shion qui suivra, puis des autres… Même si j’aurais préféré une narration multiple dans chaque tome (comme dans le tome 6).
(Cela dit que ce soit clair, le personnage de Keiichi évolue tellement bien dans les tomes 6 et 7 qu’il n’en reste pas moins un de mes préférés de l’œuvre !^^)
Ce qui est bien aussi de faire une critique avec du recul, c’est de se rendre compte ainsi quelles sont les véritables qualités de l’œuvre qui restent. Outre les personnages travaillés et les scènes émouvantes qui dépendent pour ainsi dire plus du format VN que de l’œuvre véritable, je mettrais en avant surtout l’ambiance de Higurashi comme son point fort : L’ambiance estivale d’Hinamizawa en fait, bercée par le chant des criquets et des cigales, avec ces musiques très belles derrière (excellente BGM). Mes souvenirs de Higurashi, ce sont des nuits entières à lire l’œuvre et ses passages pleins de vie et d’émotion. Et il n’y a rien de plus fort que d’errer dans les rues par une chaude nuit d’été dans les bras de SMion derrière les synthés coulants de la piste Orenji-iro no Toki, ou bien de ressentir toute cette pureté naïve qui ressort de Shion quand elle est avec Satoshi, derrière cette piste éclatante de vie qu’est Thanks. Raah, c’est quand même sacrément beau Higurashi, et si j’ai une préférence pour ces passages pleins de vie, il est clair que je ne dis pas non pour autant à quelque chose d’aussi remarquablement exécuté que la descente en enfer impitoyable de Shion. Mais le cœur du jeu reste dans sa joie et sa vie, et la meilleure scène du jeu c’est la fin du tome 6, évidemment. Xp
Ce que j’aime beaucoup d’ailleurs avec Higurashi, c’est le fait que les personnages principaux même pris dans la maturité des enjeux n’en reste pas moins des enfants et réfléchissent et agissent encore comme des enfants. Même si j’ai une aversion assez forte pour les shônen, j’ai été étonné de trouver parfaitement juste les discours sur l’amitié de Keiichi (tome 6), du moins pour son âge. C'est grâce aux émotions fortes qu’ils sont capables d’envoyer. On ne réfléchit pas encore beaucoup à cet âge, on se contente souvent d’envoyer directement et sans subtilité ce qu’on a gros sur la patate en réponse aux problèmes (comme cette scène du tome 6 par exemple, j’adore : lien), un peu à la manière de ce que j’écrivais sur le Murmur de R.E.M. ici (réussir à joindre la musique aux VN :cœur:). Les japonais ont un mot particulier pour désigner cela : Isshôkenmei, c'est-à-dire l'ardeur, le zèle, le fait d'appliquer toute son énergie. Et c’est vraiment émouvant à voir, une qualité propre à Higurashi, une de ses plus belles.
J’ai déjà beaucoup écrit alors je vais finir sur une critique de l’énigme principale du jeu que je trouve assez ratée. C’était bien beau de nous faire réfléchir depuis le début dessus, mais si c’est pour finir avec un coupable dont on a, pour ainsi dire, rien à foutre, avec une explication honteuse du « Pourquoi ? » (le tome 8 est une escroquerie), je dis non quoi. A l’inverse d’Umineko, Higurashi n’arrive pas du tout à lier l’énigme principale à ses personnages. Je suis déçu d’avoir passé beaucoup de temps à réfléchir à une énigme qui n’en valait franchement pas la peine, qui même est plus que secondaire au reste du jeu.
Voilà, c’est ça Higurashi. Une œuvre pas forcément très réussie sur sa forme, assez maladroite, mais dont les principales qualités suffiront à satisfaire le lecteur. Umineko corrigera ces défauts. Je n’aurais pas de mal à dire, les deux VN se ressemblant assez en plus, qu’il est bien plus réussi objectivement que son prédécesseur. Néanmoins, il n’en reste pas moins que Higurashi a toujours l’ambiance si particulière d’Hinamizawa qui fait de lui une œuvre unique pour laquelle j’ai beaucoup d’affection. Et ça, ce n’est pas prêt de changer.
Tome 1 : 6/10
Tome 2 : 7/10
Tome 3 : 7.5/10
Tome 4 : 7.5/10
Tome 5 : 10/10
Tome 6 : 8.5/10
Tome 7 : 7/10
Tome 8 : 3.5/10