Legend of Grimrock
7.2
Legend of Grimrock

Jeu de Almost Human Games (2012PC)

Critique publiée à l'origine sur Etoile et Champignon.fr


Dans Legend of Grimrock, on contrôle un groupe de 4 aventuriers générés automatiquement (option rapide) ou à créer soi-même en choisissant leur sexe, leur race et leur classe, parmi trois choix – guerrier, mage, rogue -. Une rapide intro nous apprend qu’il s’agit en fait de prisonniers, acheminés au sommet de la montagne Grimrock pour être jeter dans son labyrinthe. Leur objectif, et la notre, sera d’en atteindre le bas pour s’en échapper : plus simple à dire qu’à faire.


Derrière ce scénario digne d’une bonne partie de jeu de rôle « papier » se cache une longue et éprouvante aventure en vue subjective, qui fait la part belle à l’exploration cartographiée, aux énigmes et aux combats rangés : les personnages armés d’épées et de haches devront être placés à l’avant, les mages et archers à l’arrière, sachant que l’on pourra ré-arranger la formation à tout moment par balayage sur les portraits en bas d’écran (geste parfois vital pour sauver un héros).


L’un des piliers de Grimrock, clé de son action palpitante, c’est son curieux mélange de temps réel et d’espace « découpé » en carré, repris du séminal Dungeon Master : le groupe s’y déplace par a-coups, case par case et uniquement sur 4 axes (via un pavé de 6 flèches virtuelles, étonnamment confortables au tactile), ce pendant que l’action elle-même se poursuit sans interruption.


Loin d’être un simple clin d’oeil « old-school » aux nostalgiques, ce mix de temps continu et de déplacement contraint a ce grand mérite de mobiliser autant de nervosité dans l’action que d’anticipation stratégique (« comment approcher l’ennemi de façon optimale et le fuir si besoin »). Dans le feu des combats, la question des déplacements s’avère même particulièrement stressant, induisant une manoeuvre de contournement du monstre en l’attente de la fin des cooldowns de nos héros : une sorte de danse de la mort que l’on acquiert avec la pratique (l’hésitation sur les flèches directionnelles n’est pas de mise), et qui requiert de connaître par cœur la configuration de la pièce.


Dans Grimrock, vous l’aurez compris, bien jouer n’est pas un luxe tant les monstres se révèlent redoutables dès les premiers paliers (le mode facile laisse toutefois un peu de répit) : ne soyez pas surpris si les premiers squelettes venus déciment votre groupe en 3 coups de glaive rouillé, et on ne parle même pas des horreurs qui vous attendent dans les paliers plus profonds. La difficulté surprendra probablement doute les joueurs « modernes », habitués aux progressions assistées, mais par son juste équilibrage, elle se ressent ici comme une bouffée d’air frais, chaque épreuve réussie et palier nettoyé s’accompagnant d’un sentiment de mérite à la hauteur de l’effort consenti.


UNE AVENTURE ARDUE, MAIS PASSIONNANTE
En outre, aucune épreuve ni combat n’est infranchissable, quand bien même certaines phases intimident sérieusement : à force d’expérimenter avec les skills de ses héros, on finit par trouver des synergies, un bon « groove » de combat et par avoir l’impression jouissive que les rudesses du jeu sont en train d’être domptées. Au rang de celles-ci, citons le besoin de nourrir ses héros, dont la faim influe directement sur leur chances de survie. Ce qui aurait pu devenir une pure corvée fonctionne ici comme une contrainte intelligente de plus, mettant le joueur sous pression par une raréfaction des aliments savamment dosée pour faire craindre le pire, sans jamais le frustrer réellement.


Dungeon-crawler oblige, les chausses-trappes et puzzles occupent bien sûr une place de choix dans la progression, qu’il s’agisse de traquer les boutons cachés sur les murs (astuce fréquente) ou de décrypter un réseau complexe de téléporteurs et de pièges. Là encore, le challenge est souvent rude et nécessite maints tâtonnements ; on pourra toutefois compter sur les indices égrainés par un mystérieux prisonnier, dont les messages développent parfois de façon prenante le background scénaristique (qui réserve quelques twists malins). Quant aux puzzles les plus durs, ils sont pour la plupart réservés aux nombreux passages secrets, ouvrant sur des « bonus » donc esquivables ; mais les-dits bonus sont aussi si précieux, et les épreuves elles-même si bien conçues qu’il serait dommage de ne pas s’y frotter et de rater des portions du brillant level-design conçu par le studio Almost Human.


A ceux qui s’inquiéteraient à la lecture du test, on précisera que l’expérience générale est une merveille d’équilibrage, à commencer par la courbe de difficulté côté combats, calée à un rythme idéal sur le leveling des héros (pas besoin de grinder pour « être à sa place »). Plus évident au premier regard, Legend of Grimrock reste un titre splendide sur iPad, fort de modèles détaillés et richement texturés pour les monstres comme les décors (joliment variés), éclairés bien souvent par la seule lumière frémissante des torches : voir un gros troll surgir par surprise au détour d’un couloir sombre, on vous promet que ça fait de l’effet.


CONCLUSION
Difficile d’échapper à l’étreinte anxiogène et étrangement addictive de Legend of Grimrock, jeu d’exploration de donjon qui excelle en tout point, de son équilibrage général (tendance « difficile ») à ses qualités techniques et visuelles. Éprouvant et gratifiant, long de plus de 15 heures (pour chaque run) et ultra-rejouable, ce passionnant dungeon-crawler mérite une place de choix dans vos ludothèques.


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Benetoile
8
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le 6 mai 2020

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