Ému par certains mélodies retrouvées au hasard sur la toile, je suis allé faire un tour sur SC pour voir si on partage l'amour que je porte à l’œuvre d'art qu'est Legend of Mana. J'ai alors été très étonné des reproches faits comme l'absence de scénario, la superficialité, l'ennui lors des combats. Je n'ai pas tellement eu la même lecture lors de ma dizaine de runs du jeu de SquareSoft.
Legend of Mana appartient à l'une des meilleures périodes que le jeu vidéo ait pu connaître, sorte de croisement entre l'explosion technologique, Internet et les possibilités créatrices, croisement qui n'avait pas le même sens que les possibilités décérébrantes et addictives que la next-gen semble proposer aujourd'hui. C'étaient les années où des petits jeux comme Ocarina of Time, FF VIII ou Xenogears sortaient. Culte.
La série des Seiken m'est forcément chère, tant j'ai adoré Secret of Mana. Quand j'ai pu mettre la main sur l'une de ses suites en import, autour de 2000, dans ma petite ville campagnarde, c'était un vrai rêve de joueur. Legend of Mana, c'est d'abord un design, "un jeu en 2D" comme on disait à l'époque (même si c'est pas tout à fait vrai). Le chara-design soigné s'ancre dans des décors pastel encore incroyables aujourd'hui, c'est comme si on jouait directement sur les rough des artistes, sans passage visible de la technologie. Ravissant pour les yeux, ennivrant pour les oreilles. Yoko Shimomura (Kingdom Hearts, Xenoblade Chronicles) signe son plus beau travail sur l'OST, on retient notamment le thème principal et cette intro fantastique.
Pour progresser dans le monde de Mana, on doit créer les mondes soi-même à l'aide d'objets récupérés dans les premiers mondes. On choisit donc complètement l'ordre dans lequel on parcourt les endroits (très diversifiés). Il n'y a pas de ligne directrice pour le scénario. On dégage parmi la soixantaine de quêtes proposées trois gros arcs. La fin d'un arc permet de débloquer le monde final. Cette absence de scénario bien défini est le principal défaut que l'on reproche souvent à Legend of Mana. Et c'est pour moi la qualité géniale et principale de ce jeu. Legend of Mana est un recueil de contes. On va d'une histoire à l'autre avec pour seul point commun ce monde onirique et magnifiquement réalisé. On apprend des dialectes étrangers, on parle avec des pierres géantes, on crée des golems, on combat des dragons géants, on a des petites morales, des personnages secondaires superbes, le tout dans un univers laissant rêveur.
Que demander de plus alors ? Certainement un bon gameplay ! Là encore, on a le droit à un jeu d'une grande richesse. Mais cette richesse ne saute pas aux yeux et on ne dit pas sur quels boutons appuyer d'emblée. La création de pets, de golem, de techniques, de magies, de stuff, la fusion même de techniques (roulade+sprint par exemple), le new game+, la pléthore de quêtes, peuvent provoquer tout ce que vous voulez, sauf de l'ennui. C'est sûr que ce n'est pas pour les joueurs "les plus superficiels d'entre nous". Un autre argument imparable de Legend of Mana est la possibilité de jouer à deux. Non mais franchement, vous en connaissez beaucoup des RPG offline qui proposent un vrai mode deux joueurs en simultané ? Hormis peut-être Secret of Mana c'est vrai.
La série des Mana est assez peu connue car elle contient à la fois des jeux mauvais et des jeux incroyables. Qui plus est, Legend of Mana n'est pas le plus connu en Europe vu qu'il n'est jamais sorti sur le vieux continent. Pour moi, Legend of Mana est une oeuvre d'art pure et authentique, pas dans le sens "les jeux c'est de l'art, c'est trop hype". Cet épisode propose un gameplay fun et accessible, mais avec une profondeur intéressante. Le monde traversé est l'un des plus beaux que le jeu vidéo ait connu, les musiques sont enchanteresses. On peut critiquer le jeu si on ne se laisse pas happer par le monde de Mana, si on n'a pas d'amis, si on n'apprécie pas les contes, dommage pour vous. Pour les autres, jouez-y, lisez-le, rêvez.