L’idée était intéressante, l’expérience fut pénible.
Lifeline... vous propose de devenir l’unique interlocuteur/interlocutrice d’un homme échoué au fin fond de l’espace sur une planète. Par le biais de textos, vous allez pouvoir le conseiller ainsi que suivre son périple pour survivre et surtout trouver un moyen de quitter sa terre d’accueil...
Ça, c’était pour la bonne idée ! Parce qu’en pratique, vous allez morfler. Vous auriez pu tomber sur un type sympa, pas envahissant et intéressant que vous auriez pris plaisir à guider. Mais non ! Les programmeurs ont préféré vous proposer de communiquer avec Taylor.
Taylor, c’est un boulet ! Il est chiant. Ses réflexions ne sont pas intéressantes, que rarement pertinentes et certainement pas drôles. Il ne sait rien faire sans vous demander votre avis alors que, de part votre éloignement géographique, il est assez compliqué de déterminer si le chemin de gauche est plus dangereux que celui de droite ou s’il est plus prudent de dormir ici plutôt que là-bas. Pourtant, il vous le demandera et s’en tiendra à votre réponse hasardeuse. Et gare à vous si vous le conseillez mal, car Taylor n’a pas de personnalité. S’il n’est pas d’accord, il fera fi du fait que vous ne pouvez pas vous rendre compte précisément de la situation et il fera tout de même ce que vous préconisez. Et, s’il ne meurt pas, il vous pourrira malgré tout le lendemain en affirmant que vous êtes le pire conseiller qui soit.
À un moment, j’aurais voulu qu’il soit réel et réussisse à revenir sur Terre juste pour pouvoir lui botter le cul. Et puis je me suis dit que si le jeu me proposait à un moment de le jeter dans le vide, j’opterais pour cette solution pour m’en débarrasser sadiquement. Con et influençable comme il a été pensé, il aurait sauté.
Pire, Taylor est un pur produit de notre société basée sur les réseaux sociaux. Non, il ne se prend pas constamment en photo. Encore que vu le niveau de ses commentaires, il doit quand même être du genre à faire un paquet de selfies. Mais il commente sans arrêt ce qu’il fait. Tout ce qu’il fait. Il va tout vous raconter.
On a tous connu un gros relou sur Facebook qui quêtait l’attention des autres comme un mendiant en commentant tout ce qu’il faisait. On a tous connu un Taylor...
Il gardera un peu ses distances le premier jour mais, dès le deuxième, il ne se privera plus pour vous casser les noix avec ses réflexions et la moindre de ses actions. Ses monologues pourront parfois durer plus d’un quart d’heure...
Mais à quel moment les développeurs se sont dits que c’était une bonne idée ?!?
Car c’est là où le jeu passe complètement à côté de son objectif et de l’expérience qu’il promet. Non seulement Taylor devient pénible au possible, voire carrément antipathique, mais en plus tout devient complètement risible tant les situations sont surréalistes.
Taylor vous écrira en temps réel des textos pour vous expliquer qu’il est en train de porter un objet très lourd tout en guettant une porte, car il a entendu du bruit, et en s’interrogeant sur l’endroit où il pourrait se reposer et, tiens, puisque c’est le moment d’en parler s’il ne devrait pas manger des rations de voyage ou une boîte de conserve de cassoulet, tout en s’imaginant prendre une bière en terrasse à Strasbourg... Oui oui, il sait faire tout ça en même temps Taylor... Et surtout, il a le temps de vous écrire. C’est le moment idéal pour vous écrire ! Et vite en plus... Plus vite que vous ne lisez parfois...
Vous vous surprendrez souvent à imaginer avec quelle main il réussit à taper ses putains de messages. Celle qui lui a poussé dans l’oignon sans doute !
Non, vraiment, il aurait été beaucoup plus judicieux de limiter les interactions. Moins de textos, pas de temps réel... Rien ne semble réaliste ou possible dans cette « aventure ». Vous voulez lire, attrapez un bouquin. N’écoutez pas ce geignard. Il se paye en plus assez souvent le luxe de lâcher brutalement un « Oh mon Dieu... » et de ne plus vous parler pendant 5 minutes. Climax de ooouuufff !!!! Pour finalement vous expliquer qu’il a vu un truc pas spécialement important... Vous vous ferez avoir une fois ou deux, vous resterez suspendu à votre téléphone jusqu’à savoir ce qui a bien pu lui arriver. Et la chute vous fera tellement râler que vous ne vous en soucierez plus par la suite.
C’est dommage parce que l’expérience aurait pu être vraiment chouette. Là, on ne perd jamais de vue que l’on a à faire à un programme et que l’écriture n’était visiblement pas un talent des programmeurs. Les situations sont rocambolesques et l’on en vient à insulter systématiquement Taylor qui nous interrogerait presque pour nous demander s’il doit ou non fuir un danger mortel immédiat...
Le jeu ne coûte pas cher mais ne vaut vraiment pas l’investissement minime qu’il demande.
À sa deuxième mort, j’ai renoncé à reprendre une sauvegarde pour poursuivre l’aventure avec Taylor et opter pour un autre choix et ainsi lui éviter de mourir. Je pense que j’étais tout proche de la fin. Mais à vrai dire, je n’avais plus envie de le lire se plaindre. Il m’emmerdait au plus haut point et je restais parfois des heures sans lire ses messages. C’est dire comme le jeu me captivait.
Au final, je préfère me dire qu’il est mort et qu’il l’a bien mérité. Il n’avait qu’à se préoccuper un peu plus de sa survie plutôt que d’écrire des messages à quelqu’un qui ne pouvait pas l’aider. Foutue génération de narcissiques élevés à la sauce Facebook. Crève Taylor et fiche-moi la paix.