Mario Party 9
6.3
Mario Party 9

Jeu de Nd Cube et Nintendo (2012Wii)

Pour ce 9ème épisode d'une série qui a lancé un genre tout entier (le party game) il y a de cela quatorze ans, les développeurs n'y sont pas allés avec le dos de la cuillère. Ils ont tout simplement renversé la table pour repartir sur de toutes nouvelles bases. Car si ce Mario Party 9 a bien l'ADN d'un Mario Party et ressemble trait pour trait à ses prédécesseurs si on regarde une partie de loin (le mode principal reste un dérivé du jeu de l'oie entrecoupé de mini-jeux), il opère bien une véritable révolution copernicienne dans la série. Et pour cause, l'équipe de développement historique ayant été partiellement dissoute avec le naufrage progressif d'Hudson Soft, c'est Nd Cube (déjà en charge de Wii Party) qui est désormais aux manettes. Et ça change -presque- tout...



Le premier changement majeur provient de la disparition de la course aux grosses étoiles qui étaient disposées aléatoirement sur les plateaux (une nouvelle apparaissant à chaque fois qu'un joueur s'emparait de la précédente) et qui étaient source de nombreuses tensions et de stratégies fourbes. Passent également à la trappe les pièces (octroyées après les mini-jeux principalement) qui servaient tout à lafois à acheter les grosses étoiles que des capsules bonus dans les boutiques disposées sur le plateau. Mais qu'est-donc devenu Mario Party alors ? En fait, les grosses étoiles et les pièces sont ici remplacées par des petites étoiles (les mêmes que celles de Mario Galaxy) qu'il est possible de glaner à la fois sur le plateau (en passant dessus ou en participant à des événements bonus en solo ou à plusieurs) et après chaque mini-jeu (et le vainqueur n'est désormais plus le seul récompensé -par 10 pièces dans les épisodes précédents- puisque pour impliquer au maximum les joueurs, chaque joueur gagne 5, 3, 2 ou 1 petite(s) étoile(s) selon son classement). Des étoiles sombres (des petites étoiles de malus qui viennent diminuer votre total de petites étoiles) sont par ailleurs également parsemées sur le parcours. Et comme par le passé, des petites étoiles bonus sont également attribuées en fin de partie en fonction de trois critères tirés au sort aléatoirement (pour un total de 3 x 5 petites étoiles bonus) parmi six possibles : joueur ayant utilisé le plus de dés spéciaux, joueur étant tombé sur le plus de cases hasard (!), joueur ayant gagné le plus de petites étoiles aux mini-jeux, joueur ayant été le plus pénalisé par des étoiles sombres, joueur ayant fait le plus grand total aux lancers de dé, joueur ayant fait le plus petit total aux lancers de dé.

La philosophie du jeu change ainsi radicalement puisque si par le passé, une partie de Mario Party se terminait sur un score de match de football (3 étoiles à 1, par exemple)... cela ressemble désormais plus à un match de rugby débridé (du type 75 petites étoiles à 50). Bon cela a certes le mérite d'impliquer tous les joueurs tout au long de la partie (le score montant progressivement et non par à-coups)... et de redonner toute leur importance aux mini-jeux (qui participent directement à la victoire finale... alors que par le passé, il était possible de truster les mini-jeux et d'accumuler les pièces... sans jamais être en mesure de les convertir en grosses étoiles décisives pour la victoire)... mais je trouve qu'au final cela ramollit un peu le jeu puisque le score monte progressivement et qu'il n'y a plus -ou presque- ces moments de tension et de suspense lorsque plusieurs joueurs étaient à la lutte pour récupérer une grosse étoile (seules les -rares- grappes de 10 petites étoiles sur le plateau créent un peu d'enjeu). Par ailleurs, les étoiles bonus de fin de plateau ont désormais une importance minime puisque si dans les épisodes antérieurs, une ou deux étoiles bonus pouvaient faire basculer une partie, une poignée de mini-étoiles en plus (de 5 à 15 selon que l'on récolte un seul ou la totalité des bonus) est souvent insuffisante à influer sur le résultat final avec des écarts parfois conséquents entre les joueurs (de plus d'une quinzaine d'étoile).

L'autre grand changement tout aussi révolutionnaire dans la série (peut-être un des plus critiquable, d'ailleurs) est que les joueurs ne se déplacent plus librement sur le plateau chacun à leur tour. En effet, tout le monde est désormais embarqué dans le même véhicule piloté à chaque tour par un « capitaine » différent qui lancera seul le dé et choisira éventuellement le chemin à suivre (si -rare- bifurcation il y a). Autant dire que c'est un peu la douche froide au départ pour les habitués : on a tout simplement l'impression que cette innovation anéantit toute stratégie individuelle et fourbe sur le plateau. Disons-le clairement, il y a un petit peu de vrai dans cette affirmation. Mais on se rend assez vite compte que le tour de capitanat revêt tout de même une importance stratégique et peut avoir une influence notable sur la suite (même s'il faut admettre qu'on a l'impression d'être en liberté surveillée). En premier lieu, si vous êtes capitaine lors des combats de boss et de mini-boss (j'y reviendrai), vous bénéficiez d'un bonus de mini-étoiles quelle que soit votre place à l'issue du mini-jeu (ainsi, si vous terminez 1er lors du combat avec le boss final, vous gagnerez 22 pièces contre 15 en temps normal). De même, lors d'un événement « mission » (un événement spécial à plusieurs à base de lancers de dé qui permet de gagner des mini-étoiles bonus), c'est le capitaine qui détermine l'ordre de jeu de ses adversaires (ordre qui a toujours une importance stratégique dans ces « missions »). Enfin, en fonction de ses choix (utilisation d'un dé spécifique, bifurcation...), il peut accélérer ou ralentir la progression sur le plateau et ainsi mettre son successeur au capitanat dans une mauvaise posture le tour suivant (en choisissant un chemin avec des étoiles sombres, par exemple). En effet, être capitaine a aussi ses inconvénients... puisque lui seul est pénalisé par les étoiles sombres rencontrées en cours de route... ou encore par des événements spéciaux très pénalisants qui font souvent perdre la moitié de ses petites étoiles (se faire rattraper par le magma dans Galère dans le Cratère... ou par les fantômes dans Cauchemar au Manoir, être capitaine lorsqu'une bombe explose dans Panique dans la Fabrique). La case « à-qui-le-tour » qui permet d'ailleurs de modifier l'ordre du capitanat, aura ainsi parfois des conséquences notables. De quoi assurément changer les habitudes bien établies des vieux routards de Mario Party...

L'autre grande nouveauté est que les plateaux se déroulent désormais en ligne droite puisqu'il s'agit d'aller uniquement du point de départ d'un plateau à la ligne d'arrivée (et non plus de tourner en boucle sur un circuit) en empruntant un chemin parsemé de quelques bifurcations. Par ailleurs, une révolution n'allant jamais seule, le chemin est ponctué à mi-parcours par un combat contre un mini-boss (qui rapporte jusqu'à 10 petites étoiles selon votre classement) et contre un boss final une fois la ligne d'arrivée franchie (qui rapporte jusqu'à 15 petites étoiles, hors bonus éventuel de capitanat) sous forme d'un mini-jeu spécial (la plupart sont d'ailleurs très réussis). Pac-Man Party semble ainsi avoir fait des émules... Mais là où ces combats n'avaient que peu d'incidence sur la victoire finale dans Pac-Man Party, le combat contre le boss de fin de plateau est souvent très important puisque dans le pire des cas (tout du moins, pour le dernier du mini-jeu), si le vainqueur du mini-jeu est aussi capitaine, il peut ainsi prendre une vingtaine d'étoiles d'avance sur le joueur arrivé dernier. De quoi renverser la vapeur ou tuer définitivement une partie. Et là encore, le capitanat est très important sur la ligne d'arrivée puisque c'est le capitaine lors de ce dernier tour qui choisit quel boss affronter (sauf sur le sixième plateau où le combat contre Bowser est imposé) : trois mini-jeux de boss sont ainsi proposés aléatoirement (parmi un total de six). En fonction de ses affinités et de ses aptitudes, le capitaine pourra ainsi choisir le jeu qu'il sera le plus à même de remporter... ou qui pénalisera le plus fortement ses adversaires directs (certains jeux faisant plus appel à la chance... alors que d'autres seront uniquement une question de skill ou de réflexes).

Enfin, la dernière nouveauté qui sera vu par beaucoup comme une régression est la disparition totale des boutiques et des capsules bonus. A la place, on récupère le système assez primitif de Mario Party 1. Ainsi si vous tombez sur une case bleue (qui sont moins nombreuses que par le passé et qui n'attribuent donc plus de pièces...), vous récupérez automatiquement un dé spécial utilisable lors des tours suivants (un maximum de deux dés peuvent être stockés en même temps... contre trois capsules par le passé) : un dé 1-2-3, un dé 4-5-6, un dé 0-1, un dé de 1 à 10 (contre 1 à 6 pour le dé standard) et un dé pipé de 1 à 6 qui permet de choisir à l'avance le résultat du lancer). Cela permet certes d'élaborer des stratégies pour éviter des pièges, récupérer des petites étoiles facilement... ou attirer le futur capitaine dans un traquenard... mais le résultat est au final beaucoup moins riche du point de vue stratégique que ce qu'offrait la vaste palette de capsules disponibles dans les épisodes précédents. Bien sûr, quelques cases spéciales viennent remplacer ces anciennes capsules (la case « relance » permet de relancer le dé, la case « demi-tour » permet de relancer un dé... mais pour rebrousser chemin...) mais on n'a de fait presque plus aucune maîtrise puisqu'on ne choisit pas de tomber sur telle ou telle case (sauf utilisation d'un dé pipé) et on ne choisit pas non plus le dé spécial qui nous est attribué sur une case bleue.

Pour le reste, on retombe sur du très classique. S'agissant des plateaux, les 6 qui sont proposés (le septième plateau -Jungle DK- étant plus un mini-plateau bonus où il faut boucler deux tours d'un ovale sans grand intérêt en récupérant un maximum de bananes) ne sortent pas des sentiers battus des univers récurrents de Mario Party : une vallée champêtre (Randonnée dans la Vallée), une usine (Panique dans la Fabrique), un manoir hanté (Cauchemar au Manoir), une plage exotique (Expédition au Lagon), une mine dans un volcan (Galère dans le Cratère) et une station spatiale (Bowser en apesanteur). Et s'ils sont vraiment bien réalisés et variés du point de vue visuel, on pourra leur reprocher (en dehors de leur conception en ligne droite) de reposer sur le même principe qui pourra paraître un peu répétitif. En effet, en dehors de Randonnée dans la Vallée (où il ne se passe pas grand-chose, il faut bien l'avouer) et de Bowser en apesanteur (où le hasard joue un rôle prépondérant... avec une cagnotte de petites étoiles au centre de plateau), les quatre autres fonctionnent de manière similaire avec un Nemesis (que ce soit des bombes, des fantômes Boo, des requins ou de la lave) qui vous pourchasse et qui fait perdre la moitié des petites étoiles au capitaine qui se fait rattraper lors de son tour de jeu. Il y a bien quelques variantes... mais ce côté un peu répétitif est somme toute dommage (comme si on avait juste changé la skin de chaque plateau, pour caricaturer à gros traits). Du côté des mini-jeux (au nombre de 80 environ), Mario Party 9 est un très bon cru (quasiment du même niveau de ceux de Mario Party 4, c'est-dire) avec beaucoup de variété dans les situations (agilité, réflexes, chance, skill, stratégie, observation...). On regrettera en revanche deux choses : le déroulement de certains jeux (pas tous heureusement) a tout d'abord été un peu casualisé notamment lors des courses avec parcours d'obstacles puisqu'on n'est par exemple plus éliminé (ou alors au moins pas avant le troisième faux-pas) du premier coup en cas de chute. C'est donc beaucoup plus permissif (ce qui colle bien avec la volonté de récompenser en petites étoiles tous les participants à un jeu : de 1 à 5 petites étoiles suivant le classement au mini-jeu). En second lieu, les mini-jeux en 2 contre 2 ont totalement disparu (on compte une grosse quarantaine de mini-jeux chacun pour soi, 10 jeux à 1 contre 3, 10 jeux à 2 contre mini-Bowser, 6 mini-jeux de boss intermédiaire et 6 mini-jeux de boss final) : c'est dommage... En revanche, il n'est finalement pas plus mal d'avoir rompu avec la règle 1 tour = 1 mini-jeu : dans Mario Party 9, un mini-jeu n'intervient en effet que si le capitaine tombe sur une case spécifique déclenchant tel ou tel type de mini-jeu (c'est d'ailleurs à ce joueur que revient le choix du mini-jeu parmi trois proposés... il n'est donc plus choisi aléatoirement comme par le passé). Les mini-jeux intervenant à intervalles moins réguliers, les parties sont ainsi moins hachées et plus dynamiques (même si au gré des lancers, certains trouveront au contraire que certaines parties sont bien pauvres en mini-jeux). La conséquence de cette nouvelle règle (couplée à la configuration en ligne droite des plateaux) est radicale : une partie ne dure désormais plus que 45 minutes tout au plus (contre 1 heure 30 à 2 heures par le passé pour une partie en 20 tours). C'est un bon point aussi... mais on aurait tout de même aimé pouvoir configurer cette durée comme par le passé (en raccourcissant le parcours ou en proposant d'effectuer une ou plusieurs boucles supplémentaires, par exemple).



Au final, ce Mario Party 9 est loin d'être le vilain petit canard que certains ont bien voulu décrire. Comme pour Pac-Man Party, il faut en fait l'aborder d'un œil neuf et sans aucun préjugé (en laissant ses vieux réflexes au placard). La philosophie du jeu et le déroulement des parties sont certes très différents des épisodes antérieurs, mais les nouvelles règles apportent un petit vent de fraicheur pas désagréable sur la franchise. Bien sûr, si on gagne au change sur certains points (un jeu plus rapide, des combats de boss inventifs et stimulants, des mini-jeux parmi les meilleurs de la série et la stratégie du capitanat...), on perd aussi des points forts en route (les mini-jeux en 2 contre 2 qui ont disparu, les capsules bonus aux abonnés absents appauvrissent d'autant la profondeur des stratégies, le déplacement simultané qui réduit nécessairement la marge de manœuvre, les étoiles bonus qui ne servent presque plus à rien... ou encore des moments de tension moins nombreux avec une évolution des « scores » bien plus progressive que par le passé). C'est donc certes un Mario Party déroutant... mais c'est loin d'être un mauvais Mario Party et encore moins un mauvais party game. Il faudra néanmoins se faire à l'idée que si la Nintendo 64 (avec Mario Party 2) et le Gamecube (avec Mario Party 5) avaient eu des épisodes incontournables, la Wii n'aura pas eu des épisodes exempts de tout reproche avec le huitième et le neuvième épisode. Mario Party 9 est donc « juste » un très bon party game et un (très) bon Mario Party. En fait, on lui reprochera essentiellement de ne pas avoir laissé le choix au joueur de jouer avec les anciennes règles (mais la conception des nouveaux plateaux aurait peut-être alors été trop déséquilibrée pour s'y adapter, ceux-ci ayant été conçu spécifiquement avec une progression simultanée de tous les joueurs à l'esprit). Un bon cru, donc... mais pas un incontournable.


marchiavel
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le 18 avr. 2012

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