On ne fait pas d'hommelettes sans les casser en deux

Découvertal Gear : 9/11 (sacré Raiden, toujours associé à ces chiffres)


Après la sortie de MGS4, Kojima avait envie de faire un spin-off mettant en scène son nouveau cyborg-ninja, Raiden. Trop occupé avec Peace Walker puis MGS5, il confie le projet à une petite équipe de Kojima Productions, qui ne s'en sort pas. Le bébé est alors refilé à Platinum Games, studio extérieur à Konami récemment auréolé du succès d'estime du premier Bayonetta. Cela en fait le deuxième et dernier jeu de la rétrospective dont Kojima n'est pas le directeur.

Apprécié à sa sortie, il tombe toutefois assez vite dans l'anonymat… Jusqu'à un retour surprise en 2022, où Internet redécouvre son antagoniste principal, ses citations cultes et ses musiques burnées.


Franchement, s'il y a un seul jeu parmi les 11 du marathon que j'avais envie de découvrir, c'était bien celui-ci. Plus que le cultissime MGS1 ou l'ambitieux MGS5, la culture du meme autour de Rising me fait frémir d'impatience depuis deux ans. Mon planning étant ce qu'il est, c'était malheureusement difficile d'y jouer plus tôt, mais ça y est… Et putain que c'est bon !

Commençons avec quelques détails techniques. Le jeu est dynamique, beau et franchement bien optimisé sur mon PC milieu de gamme. Cette version PC est d'ailleurs vendue avec tous les DLC inclus, ce qui ajoute deux chapitres annexes au jeu, quelques costumes et des missions VR bonus. La seule bizarrerie que je note, c'est que le curseur de ma souris apparaît en plein milieu de l'écran lors des cinématiques et des menus, c'est bien la première fois que je vois un jeu faire ça.


L'histoire commence 3 ans après MGS4 (on peut supposer que Snake mange désormais les pissenlits par la racine). Les Patriotes sont tombés et ont entraîné une bonne partie de l'économie de guerre avec eux, mais des conflits locaux continuent de se déclencher aux quatre coins du globe. Raiden se bat toujours pour la paix, mais se retrouve impuissant lorsqu'un Président africain se fait assassiner sous ses yeux. Un an plus tard, il traque le groupe responsable de cet attentat et l'homme qui l'a battu lors de leur première confrontation, Jetstream Sam.

Comparé aux autres jeux de la série, le scénario de MGRR est plutôt simple. Si on y retrouve certaines thématiques récurrentes comme l'utilisation de la technologie, le libre-arbitre ou les enfants-soldats, les cinématiques ne traînent pas en longueur (bien) et réservent peu de rebondissements (pas bien). Les ennemis sont clairement désignés dès le début, le grand méchant est révélé assez tôt et aucun allié de Raiden ne va le trahir ou se révéler être une IA. Même si on ne joue pas à un BTU pour le scénario, celui-ci fait tout de même très cheap et vite expédié, l'antagoniste principal a très peu de scènes par exemple.

Etrangement, c'est dans les DLC que se trouve le moment le plus marquant du jeu pour moi. L'un d'eux est centré sur Blade Wolf, un loup robotique qui se rallie à Raiden au cours de l'aventure, et qu'on incarne ici avant sa rencontre avec le cyborg-ninja. Il cherche à s'émanciper de sa programmation et à gagner un libre-arbitre, et alors qu'il est sur le point d'y parvenir, la cinématique finale le rappelle cruellement à sa condition de robot et l'humilie totalement. Ca m'a littéralement brisé le coeur, et n'en déplaise aux fans de Kojima, c'est probablement le moment qui m'a le plus ému en 9 jeux.


Au niveau du gameplay, on se retrouve face à un beat'em up. Pas mon genre favori si vous me lisez régulièrement, et je retrouve ici presque tout ce qui me saoule en temps normal, à savoir le button mashing bête et méchant (agrémenté de QTE) et certains boss qui représentent des pics de difficulté abrupts, même si je les trouve plutôt bien designés et qu'aucun n'est au niveau du ninja rouge de Ninja Gaiden 3 qui revient régulièrement hanter mes cauchemars. Ajoutons à ça que le jeu vous donne très peu de frames d'invincibilité lorsque vous prenez un coup, et vous pouvez très vite vous retrouver acculé dans un coin par deux ou trois ennemis qui vous enchaînent sans que vous ne puissiez réagir. C'est très, TRES frustrant.

Ca n'empêche pas le jeu d'avoir des mécaniques intéressantes, j'aime en particulier le système de contre qui se déclenche avec le bouton d'attaque, mais uniquement si on oriente le stick dans la direction de l'adversaire. Ca donne un aspect bénéfice/risque qu'on ne retrouve pas dans des jeux qui mettent cette option sur le bouton d'esquive (je pense à Bayonetta). Il y a également un petit côté infiltration qui récompense le joueur discret en lui faisant affronter moins d'adversaires s'il parvient à passer inaperçu, c'est même indispensable dans le DLC Blade Wolf puisque celui-ci est bien plus fragile que Raiden et qu'il vaut donc mieux limiter les affrontements en face-à-face. Une bonne manière d'intégrer un élément de la saga Metal Gear dans un genre qui ne s'y prête pas forcément.


Mais le vrai point fort du jeu, c'est que c'est un spectacle constant. Raiden a des dizaines d'attaques à sa disposition, passe d'un ennemi à l'autre en un clin d'oeil, les envoie en l'air, les découpe en morceau tel Trunks face à Freezer, leur arrache la colonne vertébrale, plante son épée dans des méchas… Le jeu est relativement pauvre dans son nombre d'ennemis, mais on n'a jamais l'impression de faire deux fois le même combat, c'est assez bluffant, d'autant que graphiquement on est face à un des plus beaux jeux de sa génération. S'il ressortait tel quel en 2024 (avec un mode photo, tant qu'à faire), on n'y verrait que du feu.

C'est d'ailleurs dommage que les cinématiques soient pré-rendues, non seulement c'est rare dans cette série, mais en plus ça empêche de profiter des différents costumes que Raiden peut endosser.


Si j'ai un peu fustigé le scénario, force est de constater que l'écriture est plutôt bonne. Elle s'insère bien dans la timeline après MGS4 (on retrouve Sunny qui a grandi et est moins casse-couille, dommage en revanche que la femme et le fils de Raiden ne soient jamais vus et simplement mentionnés), ne néglige pas l'humour qui reste une composante importante de la série (le garde qui lit un hentai pendant que Raiden s'infiltre), on retrouve un Raiden positif et déterminé comme à la fin de MGS2 (en opposition à son personnage déprimé et chiant de MGS4)... Et ça devient compliqué de ne pas parler d'Armstrong donc allons-y !

Steven Armstrong est l'antagoniste principal du jeu, et s'il n'a droit qu'à une seule vraie scène comme dit plus haut (+ un flashback et un combat bonus dans un DLC), il est extrêmement marquant. Il s'agit d'un sénateur américain, en campagne pour la présidentielle de 2020, et croyez-le ou non, son plan est de "make America great again !". Il est conservateur, chauvin, libertarien et quelque peu viriliste… Si on excepte son côté va-t-en-guerre, le personnage ressemble à une caricature de Trump, écrite plusieurs années avant qu'il ne se présente.

Les trois quarts de ses phrases sont devenues des memes, son combat transpire la classe (en bon hétérosexuel, on l'affronte torse nu), son autre combat dans le DLC est le plus dur du jeu et son thème musical donne envie d'envahir le Capitole déguisé en bison. C'est donc un personnage détestable, qu'on ne peut qu'adorer, et qui fait finir le scénario sur une très bonne note malgré un déroulé un peu trop classique jusque-là… Et dont la résurgence 9 ans plus tard nous fait réfléchir à la notion de mémoire collective, thème au centre de son discours. Ce n'était certainement pas voulu par les scénaristes à l'époque, mais ça résonne désormais.


On pardonnera donc au jeu ses quelques faiblesses d'écritures (dans le chapitre 0, Jetstream Sam dit que Raiden n'a pas le courage de tuer ses ennemis alors qu'on a déjà découpé une dizaine de personnes en rondelles, l'inverse de la situation de MGS1 soit-dit en passant) ou ses séquences de bla-bla où on est forcé de marcher à petite vitesse pendant que les personnages dialoguent, qui font furieusement penser à Metroid Other M, et ça n'est jamais un jeu auquel on a envie d'être comparé.

Notons que le jeu offre la possibilité d'écouter ou réécouter toutes les conversations Codec facultatives dans un sous-menu dédié dans le menu principal, ce qui est un très bon ajout pour ceux qui veulent juste profiter du jeu sur le moment mais qui veulent tout de même découvrir le lore après leur session de jeu. C'était aussi dans Peace Walker d'ailleurs.


Dommage que le jeu soit aussi court (8 chapitres + 2 DLC, j'ai tout de même mis 15h à les boucler car je suis mauvais), mais on peut toujours prolonger le plaisir avec les 75 missions VR (dont je n'ai fait qu'une poignée, mais qui plairont sûrement aux nostalgiques de MGS Integral). En terme de plaisir de jeu et de mise en scène, il est vraiment bon et je serais certainement client d'une suite (qui a été évoquée par moment, et qui me semble être un bon moyen de prolonger la timeline de la série sans entacher l'aura des Snake).

7/10 ça peut paraître peu vu toutes les éloges que je lui ai faites, c'est surtout que je pense que le genre BTU et moi on est vraiment incompatibles. Mais ne vous y trompez pas, c'est certainement un des meilleurs jeux du genre, ça me donne même envie de me mettre aux Devil May Cry et de dépoussiérer ma copie de Bayonetta !

Sonicvic
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le 10 juin 2024

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