J'ai commencé à jouer aux jeux vidéo à six ans. J'en ai vu de toutes sortes, des bons et des mauvais; des courts, des longs; des jeux impossibles à finir aussi, quelques ovnis. Bref, en ce qui concerne ce domaine j'ai roulé ma bosse et ça fait vingt-sept ans que ça dure.
Et parfois, mais parfois seulement, on tombe sur un jeu qui est plus qu'un jeu. C'est le cas de Metal Gear Solid.
Un jeu est composé de plusieurs éléments. Son cœur d'abord, c'est à dire son gameplay, mais aussi sa technique, ses graphismes, son histoire et sa narration. Combien de jeux peuvent se targuer de magnifier tous ces éléments? Je ne ferais pas l'erreur ici d'apporter une réponse à cette question tant elle incite à la subjectivité, mais peu, c'est une certitude.
A l'époque, en 1998, les jeux vidéo avaient bien du mal à en mettre plein la vue, la faute à une technique encore balbutiante, bien qu'ils soient rentré dans une nouvelle ère en 1996 grâce à un autre jeu qui fera date, Tomb Raider et sa 3D intégrale. On parlait encore de pixels; aujourd'hui on parle de temps en temps de pixelisation mais les pixels carrés d'un mètre carré (jolie répétition) ont disparu.
Metal Gear Solid a fait fi de tout cela en nous faisant oublié l'aspect grossier des éléments proposés à nos yeux de façon simple: pas d’esbroufe, mais un souci du détail pour une plus grande sensation de réalisme, un aspect qui ne quittera jamais la série. La base de Shadow Moses où se déroule l'action a été pensée de façon à laisser le choix au joueur d'évoluer comme bon lui semble, même si on n'évite pas les phases de jeu plus dirigistes, ne serait-ce que pour les besoins du scénario. Voilà déjà un élément novateur.
La 3D est magnifique (pour l'époque bien entendu) et pourtant simpliste. Le visage de Solid Snake, le héros du jeu, n'a même pas d'yeux, on distingue à peine son nez! Mais vous pouvez me croire, jamais un avatar de jeux vidéo n'aura eu une telle aura, un tel charisme!
On est Snake! On est une arme de guerre quasi parfaite! Mais douée de sentiments. Et c'est là tout le génie de ce jeu signé Hideo Kojima. Oui Snake emprunte des aspects de plusieurs héros de films d'actions (comme le Snake Plissken de Carpenter bien entendu), mais il est bien plus que cela. C'est un être torturé; torturé par son passé, ses origines, sa vie solitaire.
En bon soldat il exécute les ordres, n'ayant que sa mission pour le faire avancer dans la vie, mais espérant plus sans même vouloir y penser.
En un sens Snake me fait penser au film "Bienvenue à Gattaca". Il est né sans parents, fruit d'expériences génétiques visant à produire le soldat ultime; déjà dans la trentaine et n'ayant jamais eu d'amis au sens commun du terme. Mais est-ce qu'un homme tel que lui peut espérer plus? Plus que ce pour quoi il a été conçu?
Tout au long de l'aventure, Snake va faire des rencontres qui progressivement vont le questionner sur lui-même, sur sa mission et le sens de sa vie. Meryl lui fera battre le coeur, Hal "Otacon" Emmerich lui donnera son amitié pour ne plus jamais la reprendre, Sniper Wolf sera un alter ego mortel.
Cette mission, qui pour Snake n'était qu'une mission de plus, et peut-être même secrètement, l'espoir de mettre fin à cette vie sans goût ni couleur sur le champs d'honneur, va se révéler salvatrice.
Solid Snake va peu à peu laisser place à l'homme; l'homme de bien, l'être humain dans sa plus simple expression, laisser place à Dave.
Mais avant cela le parcours sera physiquement et émotionnellement fort, jusqu'à confronter Snake à ses origines contre nature.
Comme je le disais le gameplay est le cœur d'un jeu vidéo. Dans celui-ci tout a été pensé pour exploiter au maximum le level design exceptionnel du titre et donner au joueur un sentiment de puissance grisante (un homme face à une armée) mélangé à un malaise face à l'éventualité de mourir face à des ennemis toujours plus forts, plus intelligents et déterminés.
Le jeu se paie même le luxe d'introduire une phase de gameplay en interaction directe avec le joueur en oubliant son avatar virtuel; une autre première qui fera date et qui est tellement connue et reconnue que je n'ai pas à en parler ici.
J'ai joué à des tas de jeux; des jeux de guerre, des histoires intimistes; des voyages oniriques et des jeux creux.
J'ai joué à des tas de jeux, mais il y en a un que je n'oublierais jamais.
Merci Dave.