Après 4 heures sur la généreuse démo de Metaphor ReFantazio, je dois me rendre à l'évidence : je ne suis manifestement pas la cible de ce machin. Le jeu me semble compétent et correctement exécuté pour ce qu'il propose, mais la proposition me laisse quelque part entre l'agacement et la consternation.
Une bonne partie de ces heures ont été passées à lire de tutos que je qualifierai poliment de "à la Japonaise", c'est à dire : verbeux et austères. On a les mêmes dans Yakuza à chaque introduction d'un nouveau système, et le jeu insiste pour introduire tous ses putains de système dans les premières heures. Le prologue se trouve plombé par un rythme assommant et terriblement haché où l’on oscille entre lecture de manuel et échantillons de gameplay illustratifs sans aucun enjeux.
Encore une fois, je ne jette pas spécifiquement la pierre à ReFantazio, car j'ai vu ça dans d'autres JRPG, mais pourquoi a-t-on besoin d'apprendre les petits détails du système de combat dès les premiers instants, comme les 'battle formation' dont on aurait pu parler bien plus tard ?
Un autre péché dont souffrait aussi FF14 : Le jeu sur-explique narrativement ses systèmes. Il y a une justification narrative aux classes de persos, au changement de spé, au level up, au déblocage de compétences, et j'en passe. Même safe rooms ont droit à leur petit monologue sur les variations de densité du flux magique dans l'atmosphère pour vous expliquer pourquoi vous ne pouvez pas vous faire boloss dedans. Ce sont des conventions ludiques utilisées depuis 30 ans et on s'en contrebranle d'avoir une explication roleplay pour tout ça.
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Bien avant cela, vous serez sans doute saisi par la laideur du jeu, ses textures PS3, ses couleurs terreuses et ses environnements singulièrement vides. L'aliasing est tellement sévère que dans les villes, c'est tout l'écran qui se met à scintiller. La direction artistique compense un peu ces lacunes : Les persos ne manquent pas de style, et les ennemis qui combinent des morceaux d'humain et d'animaux de façon plus ou moins aléatoire ont un certain charme malsain.
Venant d'Altus, j'attendais naturellement beaucoup de la bande son, et... je suis mitigé. On a des toutes petites track qui bouclent trop vite, dans un style beaucoup plus fade et oubliable que l'acid Jazz de Persona 5. Indépendamment , certains morceaux sont très stylées, avec des choeurs rigolos qui psalmodient des incantations bizarres, mais le problème vient du niveau d'intensité débile et totalement hors sujet de la bande son.
Pourquoi est-ce qu'on me fout des choeurs épiques et un orchestre symphonique entier alors que je combats deux pauvres soldats pendant un tuto ? Pourquoi, alors qu'un mec me fait la conversation dans une bibliothèque, j'ai une musique grandiloquente, pleine de chants et de fureur, qui boucle toutes les 40 secondes ?
Et la musique n'est pas le seul problème, car durant ladite bataille contre les deux clampins, mes personnages ponctuent chaque attaque de beuglements divers, encouragements, provocations et commentaires tactiques, alors qu'on a plié l'affrontement en 3 rounds et qu'aucun allié n'a perdu de HP.
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Difficile de juger l'histoire sur la base de ces quelques heures bien mal investies. Heureusement, entre les tutos à répétition et les combats au kilomètre, on a quand même eu droit à des brouettes d'exposition pour vous présenter laborieusement l'univers du jeu. C'est un mélange intrigant de fantasy générique et d'éléments plus originaux.
On sent qu'ils essayent d'avoir un cachet et de se détacher de l'habituelle fan fiction de Tolkien, mais on se tape malgré tout des elfes, des fées et des chèvres. Derrière l'originalité de façade, c'est la même histoire que Dragon's Dogma et 48 autres univers med-fan japonais où le monde est envahi par des monstres et le héros se révèlera être un élu au destin héroïque.
Votre personnage a autant de charisme que Link et ne parle presque jamais. On vous donne quand même des choix de dialogue, de temps à autre, mais les deux options me semblent parfois susciter la même réponse chez mon interlocuteur et l'intérêt est donc aussi limité que dans Assassin's Creed. C'est une manière de vous approprier le personnage, mais cela ne parait pas influer sur la trame, du moins dans les premières heures.
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Ce qui m'a fait arrêter Metaphor prématurément, c'est surtout l'ennui profond dans lequel me plongent ses combats. Je m'en suis tapé des douzaines pendant mon temps sur la démo, et à aucun moment, on ne m'a offert le moindre challenge. À chaque tour, on me présente plusieurs options : attaquer, utiliser un objet, défense, passer mon tour, mais j'ai aussi un sort qui arrache 50% de HP à la plupart des ennemis et aucune raison de ne pas l'utiliser à chaque tour.
Quand on vous donne le contrôle des alliés, le schéma se répète. Chaque personnage a un sort qu'il peut utiliser à chaque tour, et les combats consistent donc à cliquer sans cesse sur le même bouton jusqu'à la fin d'une rixe de 20 secondes, puis se taper 6 écrans de recap qui vous félicitent de ne pas avoir perdu de HP, d'avoir looté une merdouille inutile, et d'avoir level up, ce qui permet de lire encore plus de tutorials et de faire grossir des chiffres pour vous donner la vague illusion que tout cela a un sens. Je ne doute pas un instant que les combats finiront par devenir tactiques et intéressants par la suite, mais j'ai sérieusement mieux à faire de mon temps.
J'avais naïvement placé beaucoup d'espoir sur ce fils spirituel de Persona - une série que je ne connais que de réputation et qui me fait de l'œil depuis bien longtemps - et j'étais impatient de découvrir enfin la fameuse expertise d'Altus. Sacrée douche froide.