Temps de jeu : 10 heures
Mon premier Momodora
Reçu dans le Humble Monthly Bundle de Septembre 2017
Test rédigé pour Nintendo-Difference [#34]
Édité par DANGEN Entertainment et développé par Bombservice, Momodora : Reverie Under The Moonlight est un jeu de plates-formes et d'action en 2D. Disponible sur le Nintendo eShop depuis le 10 janvier dernier, il place le joueur dans la peau de Kaho, une prêtresse venue au secours des terres de Lun, accablées par les ténèbres. Derrière ce pitch se cache un Metroidvania très classique, mais non pas dénué d'intérêt. Pour un peu moins de quatorze euros, que vaut ce petit titre face à une concurrence déjà bien installée et nombreuse ?
Au clair de la lune, mon amie Kaho
Le monde est en perdition, maudit par des ténèbres rampantes en provenance de la ville de Karst. Les morts se lèvent tandis que le mal corrompt les vivants. Tous semblent avoir perdu espoir, hormis Kaho, une jeune prêtresse provenant d'une lointaine contrée nommée Lun. Bien décidée à révoquer les forces obscures une bonne fois pour toutes, elle se met en quête de la Reine de Karst pour une audience salutaire. Si Momodora : Reverie Under the Moonlight possède bel et bien un pitch sombre et intéressant, il ne s'agit pas là de son point fort. En effet, tant dans la narration que dans la mise en scène, le jeu se contente du minimum syndical, à savoir quelques lignes de texte et deux ou trois animations en guise de cutscene. Pas franchement dommageable puisque se reposant avant tout sur son gameplay, ce nouveau Momodora aurait tout de même gagné à rendre son scénario plus consistant, tant l'univers qu'il dépeint tout au long de l'aventure se montre plaisant.
À défaut de script, le ton angoissant de Momodora est appuyé par une très sympathique bande-son. Peut-être un peu trop hétérogène, elle marie habilement douces mélodies au piano et notes plus sinistres au synthé. En résulte un son oscillant entre phases épiques et d'autres plus mélancoliques, à la croisée entre ambiance oppressante et bouffée d'air frais. A contrario, il aurait été préférable d'avoir une direction artistique plus cohérente, notamment dans le chara-design du bestiaire ; passer d'un chevalier lambda ou un monstre centipède dérangeant, pour ensuite rencontrer Lubella Dim (un boss géant caractérisé par son opulente poitrine et son esthétique très manga), entache un peu la crédibilité de son univers. Tout aussi regrettables, les graphismes qui – s'ils ne sont pas désagréables – ont la fâcheuse tendance d’être de qualité inégale. Il n'est pas rare d'apercevoir des modèles et décors magnifiques tandis que d'autres manquent cruellement de détails, paraissant de fait très grossiers à côté du reste de la production. Si d'autres pesteront sur le format 4:3 de l'écran de jeu, c'est bel et bien l'obscurité du titre, parfois absurde, qui dérangera le plus.
Kaho jamais K.O. face au Chaos
S'il puise allègrement dans le Metroidvania, Momodora : Reverie Under the Moonlight ne cultive jamais sa différence, se complaisant dans un classicisme certain. Armée d'un arc et d'une feuille en guise d'épée, Kaho pourra également récolter de nombreux bonus permanents et artefacts. Si les premiers se montrent très classiques (augmentation de la barre de vie et améliorations de l'arc), les seconds eux, permettent de changer légèrement son style de jeu. Malheureusement, la majorité d'entre lesdits styles ne semblent bénéficier que très peu au joueur, à l'image de ce parchemin sacrifiant des points de vie en échange de dégâts améliorés. Très bonne dans l'idée, le fait que le titre pousse le joueur à prendre des risques montre vite ses limites, notamment à cause de la difficulté générale du titre. Jamais impossible, le jeu se montre même relativement facile, pour peu qu'on adopte rapidement les spécificités du titre.
La plus grosse d'entre elles réside dans la physique pataude de Kaho : la faible amplitude de ses sauts et la lenteur générale du personnage ont de quoi irriter avant de s'y habituer. L'autre spécificité – un peu plus sujet à débat suivant votre niveau de joueur – est en fait une question d'équilibrage. Comme les feux de camps d'un certain jeu de From Software, le joueur ne peut se soigner, recharger ses consommables et sauvegarder sa partie qu'à de très rares checkpoints. Problème : le moindre pépin enlève un quart de vie, même lorsqu'il s'agit d'un piètre empoisonnement, obligeant à retourner sur ses pas pour se reposer. Un souci d’autant plus grand que lorsque le joueur revient justement en arrière pour se soigner (ou pas), il réinitialise les pièges et ennemis de l'écran quitté. Qu'importe, les ennemis et même les boss ne sont pas assez dangereux pour pousser le joueur à jurer, tant il pourra abuser de leurs patterns trop permissifs et de l'arc, surpuissant du début à la fin. Comptez entre trois et quatre heures pour finir l'aventure en ligne droite, un peu plus pour la compléter entièrement. En outre, le titre possède une localisation française, laquelle contient tout de même un peu trop de coquilles.
Verdict : Peut-être ?
Momodora : Reverie Under the Moonlight est un titre dont la fâcheuse tendance à ne jamais savoir où se positionner aura tôt fait de vous laisser amer : plus frustrant que réellement difficile, tout en étant assez peu complexe ; visuellement charmant, mais parfois trop grossier pour être une réussite totale ; un chara-design agréable, mais beaucoup trop hétérogène pour se montrer cohérent. On ne s'étendra pas non plus sur le level design, terriblement anecdotique voire carrément ennuyeux, ou même sur sa filiation (d'après l'éditeur) avec l'œuvre de Hidetaka Miyazaki dont il partage peut-être la forme mais certainement pas le fond. Il reste préférable de retenir la délicieuse bande-son et l'ambiance générale du titre, réussies à n'en pas douter. Enfin, nous ne le conseillerons qu'aux plus affamés du genre, notamment si son classicisme ne les effraie pas. Toutefois, sur une console aussi bien garnie en Metroidvania, difficile de le préférer à de nombreux autres, comme Hollow Knight ou Iconoclast.