Mother 3 est la suite de Earthbound (Mother 2 au Japon) sorti sur Super Nintendo en 1994. Je me confesse, je n'ai pas joué à ce dernier pourtant très connu des néophytes de par la présence de Ness dans la série des Super Smash Bros de Nintendo.
Développé par HAL Laboratary en collaboration avec Brownie Brown, le tout supervisé par Shigesato Itoi, Mother 3 est sorti en 2006 sur GBA après une première version N64 qui avait été annulée au grand désespoir des fans au début de la décennie. Il est toujours possible de visionner des vidéos de cette version sur le net.
Quoi qu'il en soit, il n'est pas nécessaire d'avoir joué à Earthbound pour apprécier Mother 3. Il existe apparemment des références à cet opus durant le jeu, mais je n'ai pas eu l'impression de louper quoi que ce soit d'important.
Mother 3, c'est avant tout l'histoire d'un microcosme. Une île, un village : Tazmily, et ses habitants bien connus du joueur comme des 3 personnages successifs que l'on incarne au cours de l'aventure. Des lieux connus, une géographie minimaliste et familière, on s'y sent bien, dés le départ. On incarne Lucas, fils de Flint et Hinawa, frère jumeau de Claus. Les deux bambins vivent paisiblement leur enfance jusqu'au drame initial qui lancera l'histoire et que je ne nommerai pas. Tout, au départ, laisse à penser qu'il s'agit là d'un JRPG traditionnel. Et pourtant, et pourtant ! Dés l'amorce dramatique, on se rend compte que Mother 3 jongle en permanence avec tous les registres : du tragique à l'humour caustique, de l'épique au pathétique, de l'émouvant à l'hilarant. Un mélange tout simplement incroyable qui prend aux tripes. Le slogan du jeu résume d'ailleurs bien cela : "Drôle, touchant, bouleversant". Mother 3, c'est avant tout une formidable épopée émotionnelle, jusqu'au final inoubliable. Des personnages de prime abord simples mais en réalité plus fouillés qu'il n'y parait, mais surtout des dialogues qui ne s'appesantissent jamais plus que nécessaires sur leurs états d'âme ou sur la situation du moment. Mother 3 ou l'art des non-dits très évocateurs, des silences qui en disent long, comme les personnages que l'on incarne successivement, muets durant le laps de temps où on les contrôle seulement. Une simplicité et une sincérité dans la narration qui se montrent pertinentes, mais qui cachent une réalité de nombreux niveaux de lecture : naïf en apparence, Mother 3 est un jeu qui aborde de nombreux thèmes à travers le prisme enfantin de cet univers coloré et délirant. La perte de l'innocence, la société de consommation, la mort, le rejet, le deuil. Voilà ce dont parle Mother 3.
Que de qualités littéraires donc. Le tout porté par des pistes tout simplement bluffantes, en particulier pour de la GBA, un gameplay tout en sobriété au niveau des combats (du tour par tour assez classique) mais agrémenté d'une petite particularité sympa en la présence de combos "musicaux" (c'est dire l'importance de la divine OST au sein même du game design), et surtout une direction artistique mignonne loin des canons esthétiques très mangas de la majorité de la production.
Mother 3 est une expérience inoubliable, un modèle de narration ingame et d'originalité non prétentieuse que tous les blasés du JRPG et même du jeu-vidéo en général se doivent d'essayer. Sorti uniquement au Japon, le titre a été formidablement bien traduit en anglais par une équipe de passionnés qui n'ont d'amateurs que le nom.