NieR: Automata
8.1
NieR: Automata

Jeu de Platinum Games, Yoko Taro et Square Enix (2017PlayStation 4)

Une grande générosité excuse-t-elle les nombreuses maladresses ? (Spoiler : oui mais pas toujours.)

Bon…
Ça fait chier…
Oui, ce jeu me fait chier.
Il ne me fait pas chier dans le sens où il m’emmerde d’un ennui mortel… (Quoi que, ça dépend justement. On en reparlera…)
Non. Si ce jeu me fait chier c’est parce que d’un côté il contient trop de bonnes choses pour je ne puisse pas l’apprécier, mais tout en faisant en sorte d'être au final bien trop pénible dans sa globalité pour que je puisse vraiment le considérer comme un vrai bon jeu vidéo de premier ordre.
En d’autres mots, parler de « Nier : Automata » eh bah…
Eh bah ça fait chier quoi.

Prendre contact avec ce jeu, c’est déjà prendre conscience des problèmes qui vont être posés.
On est tout de suite mis aux commandes d’un engin qui vole en formation serrée ; on reçoit dans l’instant un message rapide qui nous annonce que l’ennemi a été repéré et à partir de là « let’s go » : l’attaque commence.
Alors certes, dès les premiers instants c’est le festival et ça témoigne de toute la générosité, de toute l’audace et de toute l’ambition de ce jeu.
En seulement une petite demi-heure, on enchaîne shoot’en up vertical, horizontal, en biais, en long, en large et en travers, puis combats au corps à corps à coups d’épées et de mitraillage.
Les décors monumentaux défilent, les moments épiques s’enchainent, et voilà qu’en un rien de temps on se retrouve aux prises avec un immense robot qu’on va chercher à combattre de toutes les manières possibles.
Cette intro est dantesque à n’en pas douter ; une intro qui en plus annonce de grandes ambitions en termes d’atmosphère, d’univers et d’intrigue.
Ah ça ! C’est sûr que ce « Nier : Automata » ne ménage pas ses efforts ! On ne pourra pas lui retirer ce point-là…
Mais malgré tout ça, pour une entrée en matière, que de maladresses et de limites déjà affichées !

Premier constat amer qu’on est bien contraint de faire, c’est que pour un jeu PS4 de 2017, « Nier : Automata » c’est quand même pas très joli.
Les textures sont loin d’être nettes, la mise en scène est indigente, les mouvements peu fluides… Ç’en a été à un point que j’en suis carrément venu à vérifier à la fin de ma première run s’il ne s’agissait pas là d’un jeu PS3 porté sur PS4 (…Et je suis sincère. J’ai vraiment vérifié.)
Autre constat amer que j’ai pu faire suite à cette intro : c’est que c’était quand même aussi bien le bordel.
C’est bien gentil de tout vouloir nous mettre dès le départ avec un rythme, une densité et un sens du spectaculaire propres aux gros blockbusters du moment, mais encore faut-il que nous – joueurs – on puisse suivre la cadence !
Parce qu’entre les phases de shoot qui changent toutes les deux minutes sans qu’on ait le temps de vraiment prendre en main l’appareil, puis enchaîner avec un combat contre un gros méca sans qu’on nous ait vraiment laissé la peine de comprendre la philosophie et les mécaniques du jeu, moi je trouve ça vraiment perturbant. Ça me perd.
Pire ça me gave.

Parce que bon, au final cette introduction je l’ai certainement accomplie comme tout le monde : cest-à-dire à l’arrache.
Après tout, comme on ne me laissait pas le temps de réfléchir et d’appréhender le jeu, la seule solution qu’il m’est resté sous la main, ça a été le bourrinage. Et moi, perso, je ne vois pas trop ce que m’apporte une intro qui ne m’invite qu’à marteler des boutons sans réfléchir.
Alors quand en plus le jeu décide d’enchainer juste derrière sur une longue phase calme tout en downgradant mon personnage, ça m'amène à questionner encore plus la pertinence de ce type d’intro.
Dit autrement, ça m'amène carrément à me demander si cette intro, en fin de compte, elle n’était un peu toute pourrie.
Et malheureusement, ce type de questions ne va jamais vraiment me quitter, même pour le reste de ma partie.

Trente heures de jeu n’y changeront rien : quand bien même l’ensemble se révèle finalement plutôt honorable, l’impression de jeu PS3 mal pensé reste très tenace.
Univers étriqués. Manque de textures. Énormément de murs invisibles… Tout sonne « ancienne génération ».
C’est bien simple parfois j’avais l’impression de rejouer à « Skyward Sword » ; un jeu qui nous vendait de la grande aventure en introduction mais qui, dans les faits, ne saura rien proposer de plus que des aller-retours incessants dans un monde faits de couloirs pas très folichons.
Alors certes, ce n’est pas non plus totalement dégueu le fait d’être un « Skyward Sword » : entendons-nous bien… Mais bon en 2017, être un « Skyward Sword » c’est quand même un peu « charrette », surtout quand à côté de ça on alourdit la barque avec tous les gros défauts du moment : missions secondaires à gogo qui cassent le rythme, collectibles à prélever par brouettes entières, système d’upgrade assez obscur, combats plats et répétitifs au possible…
Me concernant, ce n’est pas vraiment le genre de combinaison qui me fait rêver
Et franchement ça me fait vraiment chier que « Nier : Automata » se plante à ce point sur tous ces aspects là parce qu’au-delà de ça – comme je le disais plus haut – difficile de ne pas se laisser régulièrement surprendre et de ne pas se laisser émerveiller par ce que ce jeu a à nous proposer…

Parce que surpris et émerveillé, je ne l’ai pas été qu’une seule fois, loin de là.
C’est d’ailleurs ce qui explique que, bon-an-mal-an, j’y ai malgré tout consacré une bonne trentaine d’heures.
Car avancer dans « Nier : Automata » c’est toujours découvrir quelque chose susceptible de nous séduire.
Quand bien même le monde de « Nier » ne fait que reprendre des éléments déjà vus ailleurs, sa composition à quelque chose de singulier et de magnétique.
On sent que les auteurs ne se brident pas, qu’ils sont prêts à creuser toutes les pistes, ce qui amène parfois ce jeu à produire des moments qui ne laissent pas indifférents.
Du coup même après de longues sessions bien plates, il suffit qu’un seul de ces instants surgisse pour qu’il réactive immédiatement l’intérêt et incite à aller plus loin.
Parfois il s’agit d’un lieu interpellant sur lequel on tombe sans crier gare, d’autre fois il s’agit juste d’un petit moment de tendresse qui tombe pile comme il faut et quand il faut (moi par exemple, tous ce que font ces petits robots, je trouve ça vraiment trop chou), et puis d’autres fois ce sont tout simplement les envolées lyriques de la bande originale qui, bien qu’elles soient parfois quelque peu balourdes, parviennent à convaincre et à charmer.
Or, ça, l’air de rien, ce n’est pas dans tous les jeux qu’on va le retrouver…

D’ailleurs, ça me parait évident que si « Nier : Automata » dispose d’une telle cote de sympathie – pour ne pas dire d’amour – dans le milieu des joueurs c’est aussi parce qu’il sait récompenser ceux qui ont su y persister.
Avancer dans « Nier : Automata » c’est sans cesse en découvrir davantage ; c’est sans cesse se faire surprendre.
Même refaire le jeu est récompensé ici ! C’est même l’un des gros attraits de ce titre.
Car dans « Nier : Automata » quand on relance sa partie juste après l’avoir finie, c’est une partie alternative qui nous est offerte.
Et si l’essentiel est identique, de nombreux détails feront tout de même en sorte que ce sera différent malgré tout : changement d’avatar, méthode de combat différente, phases de jeux supplémentaires et – surtout – histoire racontée autrement.
En gros, finir une deuxième fois « Nier : Automata », c’est soudainement prendre conscience que l’essentiel du jeu nous avait échappé jusqu’alors. Et poursuivre une troisième fois c’est découvrir que l’histoire continue encore derrière ; une histoire que les moins persévérants ne découvriront tout simplement pas. (…Et ce sera bien fait pour eux.)
En cela le jeu sait se faire gratifiant, stimulant, séduisant…
…Et surtout il révèle quelque chose qu’on ne pourra pas lui retirer : une réelle profondeur.

Mais l’énonciation de toutes ces qualités ne doit néanmoins pas vous leurrer non plus sur la réalité de ce que fut mon expérience de « Nier : Automata » ; et la réalité, c’est que je ne suis même pas allé au bout du bout de ce jeu.
La réalité c’est que j’ai préféré jeter l’éponge au début de ma deuxième partie et découvrir le reste sur Youtube.

Bah oui, parce que c’est bien gentil d’avoir beaucoup de bonnes idées dans un jeu, mais encore faut-il que tout ce bon domine le mauvais.
Or, avec le temps de jeu qui s’accumule, « Nier : Automata » finit par révéler ce qui constitue finalement de mon point de vue son véritable talon d’Achille.
Plus que ses limites visuelles, son monde étriqué, ses missions ennuyeuses et son système d’upgrade aux fraises, ce qui est une vraie plaie dans « Nier : Automata » ce sont ses combats.
Or le problème dans « Nier : Automata » c’est que les combats il y en a beaucoup, ils durent longtemps, et ils ne sont vraiment pas très bien pensés…

Alors après, oui, je serais d’accord pour dire que, vus de loin, les combats de « Nier : Automata » ont l’air stylés.
Mais moi, dans les faits, je les trouve vraiment brouillons, pauvres et mal rythmés.
Pas ou peu d’enchainements. Pas ou peu de stratégie. Pas ou peu de renouvèlement des ennemis. Et même parfois pas ou peu de lisibilité. Et comme si ça ne suffisait pas, il faut en plus que le jeu se permette parfois de te parler en plein combat : idéal pour n'être attentif ni au propos ni à l'action.
…Mais bon. On ne va pas se mentir, je crois que le pire dans tout ça c'est que, ces combats, ils sont d'un looooong !
Dans ce jeu, s’attaquer à plus fort que soi, c’est s’engager pour plusieurs MINUTES de combat ; un combat durant lequel on regarde désespérément la jauge de l’ennemi baisser pixel par pixel, qu’on l’aligne au loin avec le pod ou qu’on le marave au hachoir de près.
Même un cerf dans ce jeu a besoin d’une bonne grosse centaine de cartouches dans le buffet pour enfin rendre l’âme ! Du coup quand il s’agit de s’attaquer à un char ou à un boss, je vous laisse imaginer le tableau…

Au final tout ça m’amène à poser cet étrange bilan à l’égard de ce jeu…
En fin de compte, quand les adorateurs de ce « Nier : Automata » pose ce titre comme un summum du jeu vidéo ; est-ce qu’ils parlent vraiment de « jeu » ?
Parce qu’autant je peux entendre que « Nier : Automata » puisse séduire pour son univers et son histoire, autant j’ai du mal à croire que quelqu’un ait pu être transcendé par ce qu’on lui proposait manette en main…
Et puis au-delà même de cette considération là, j’avoue que même sur la question de l’univers et de l’histoire, je ne serais pas aussi catégorique que certains sur la qualité proposée par ce titre.
Parce que si ce jeu est bien capable de vrais moments de grâce ainsi que de belles envolées épiques, il charrie aussi à côté de ça toutes les faiblesses récurrentes des productions nippones pour ados : philosophie de comptoir, bavardages un peu creux, références culturelles superficielles, personnages caricaturaux et/ou inconsistants…
…Et puis bon, qu’on arrête un peu de se toucher sur cette narration à fins multiples parce que dans les faits c’est juste une manière artificielle (mais plutôt filoute, je le reconnais) de nous faire accepter le fait d’avoir à se rebouffer plusieurs fois la même chose dans les mêmes lieux.
En somme – et pour le dire autrement – faire le bilan de « Nier : Automata » est bah…
Eh bah ça fait toujours autant chier quoi…

Du coup comment voulez-vous que je note ce jeu par exemple ?!
Spontanément j’aurais tendance dans un premier temps à mettre une bonne note, parce que, l’air de rien, sitôt je pense à « Nier : Automata » que je me remémore avant tout les meilleures choses : la découverte des émotions exprimées sommairement par la tribu du désert, la rencontre avec les habitants du village de Pascal, l’assaut porté sur le château du roi des machines…
Mais bon, d’un autre côté je sais aussi pourquoi les bons souvenirs dominent.
Si j’ai su garder une si bonne image de ce jeu c’est aussi et surtout parce que j’ai su m’arrêter à temps.
L’enchainement des combats insipides, le temps perdu à éliminer les ennemis un à un, la lassitude face aux missions, tout ça, par effet d’accumulation, j’ai fini par en avoir ma claque.
Et franchement, je pense que si je n’avais pas pris la peine de regarder (par morceaux choisis) le reste du jeu sur Youtube, j’aurais clairement beaucoup moins bien digéré ce qu'il avait à proposer de meilleur…
Alors voilà, du coup je mets 6/10.
Un 6/10 qui, forcément, ne peut que me poser problème.
6/10, c’est la note des jeux pas trop mal. C’est la note des jeux passables mais banals…
Alors que dans les faits, vous l’aurez compris, « Nier : Automata » est tout sauf un jeu banal.

A bien tout prendre, « Nier : Automata » c’est finalement à la fois le meilleur et à la fois le pire.
Et en définitive c’est peut-être en partant de ce constat là que je parviendrai sûrement le mieux à trancher mon ressenti ambivalent à l’égard de ce jeu.
Et pour cela il suffirait juste de me poser cette question toute bête : « est-ce que j’aurais préféré que "Nier : Automata" soit un jeu plus constant mais plus fade ? »
La réponse à cette question, mon cœur, comme celui de beaucoup d’autres, me l’a déjà insufflée depuis le début : non, pour rien au monde je n’aurais souhaité que « Nier : Automata » ne tente rien. Car s’il n’avait rien tenté, il ne nous aurait aujourd’hui rien proposé.
C’est ce qui fait, je pense, qu’on lui pardonne tous beaucoup de choses à ce jeu. Et c’est ce qui fait que moi – sans me leurrer pour autant sur la réalité de mon expérience – je ne peut m’empêcher de remercier ce jeu pour ce qu’il m’a offert tout comme pour tout ce qu’il a tenté de m’offrir.
…Parce qu’au fond, comme le dit si bien le dicton (et qui pour le coup semble seoir parfaitement à la philosophie des studios Platinum Games) : « qu’importe qu’on soit le pire ou le meilleur, l’important est qu’on soit parvenu à devenir le plus. »

Créée

le 25 nov. 2020

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