Dans la vie, surtout lorsque l’on est jeune, il est très facile de se perdre et de ne plus savoir quoi faire. Pourquoi suis-je ici ? Que suis-je en train de faire de ma vie ? Ais-je fais les bons choix ? Ais-je changé ou est-ce le monde autour de moi qui change ? Dois-je continuer à avancer et si oui vers où devrais-je me diriger ? Ces questions tournent en boucle dans notre tête, encore et encore, devenant jours après jours de plus en plus pesantes. Une répétitivité cruelle qui pourra parler à certains d’entre nous, et qui est parfaitement représenté dans ce titre.
À la suite d’un décrochage scolaire, Mae, âgée de 20 ans, décide de retourner dans sa ville natale de Possum Springs pour retrouver ces proches. Un désir de revenir dans un cadre bien plus familier et accueillant que le présent qu’elle vivait, dans une période où tout lui semble si floue et pesant. Incapable d’affronter la réalité, la jeune chatte succombe à la nostalgie dans l’espoir de retrouvé une époque bénigne où tout était plus simple. Un sentiment auquel arrive à s’identifier lorsque l’on a vécu cette situation.
Night in the Woods retranscrit parfaitement cette période de la vie se situant très exactement entre la fin de l’adolescence et le commencement de l’âge adulte. Un instant précis où toute notre perception du monde, tous nos rêves et toutes nos ambitions se basculent et se bousculent dans notre esprit. Le tout se traduisant par cette sensation d’une inextricable frayeur de ne pas être capable de réussir dans ce monde et une profonde volonté à désirer rester dans cette bulle protectrice qu’était l’enfance.
Tout ceci se ressent énormément chez Mae, notamment dans ses interactions avec ses meilleurs amis, Gregg et Bea. Le premier ayant trouvé ce qu’il veut faire de son avenir, souhaitant évoluer pour partir s’épanouir ailleurs et la seconde forcée à entrer dans le monde adulte après la mort de sa mère, ne possède plus aucune envie de revenir à cette mentalité passée que possède encore Mae. Tous les deux reflètent l’idée que peut importe ce qui se passe, il est impossible que garder les choses tels qu’elles étaient indéfiniment ; le monde change, les gens changent, nous changeons également et il nous faut accepter tous ses changements.
Tout cela apporte au titre un côté mélancolique, voire dépriment. Bien que notre protagoniste tente tant bien que mal de garder une part d’optimisme et d’espièglerie, on sent chez elle un sentiment associé à la peur de l’abandon mais aussi à celle du changement. Une véritable qualité d’écriture se dégage des dialogues, réussissant parfaitement à ancrer ses personnages fictifs aux allures d’animaux anthropomorphes dans des situations et des réflexions profondément humaines.
Voici ce qui est probablement la plus grande force de ce titre. Autre que son atmosphère en demi-teinte, ses visuels magnifiques ainsi que son scénario simple mais chaleureux, l’élément démarquant de Night in the Woods n’est autre que le caractère humain et sensible se dégageant de chaque personnage. Chacun d’entre eux apporte de la vie à sa propre manière, que ce soit de part leurs apparences, leurs attitudes ou leurs répliques, tous reflètent bien plus que de simples pixels sur un écran et réussissent à marquer, qu’il s’agisse d’un personnage important ou d’un second rôle. On peut très facilement ressentir toute la passion qui a été apporté dans ce projet à créer et écrire des personnalités fortes et impactantes, tout en gardant de vue cette part d’humanisme.
Night in the Woods est un jeu fort et extrêmement marquant. Malgré son côté assez passif et longuet qu’on pourra lui reprocher, il n’en reste pas moins un jeu à parcourir. Lorsque l’on a connu la situation de Mae ou qu’on se situe dans la même tranche d’âge, on arrive véritablement à se rendre compte de la douleur qu’elle endure. C’est cette langoureuse douleur couplée à une écriture d’une très grande beauté réussissent à rendre ce jeu incroyablement touchant et mémorable.