La cartouche qui m'a fait entrer dans le jeu, le vrai !
A peine arrivé en 6ème, le pantalon en toile et un début de déprime collégienne dans le privé, nos parents nous offrent, à mon petit frère et à moi : Phantasy Star... Notre Master System avait moins d'un an, et autant vous dire qu'en dehors d'un Wonder Boy, d'un OutRun ou autre plombier moustachu à peine pris en main chez des copains sur une autre bécane, mes connaissances en matière de jeux vidéos étaient alors très limitées...
Mais déjà, intrigué par sa jaquette fantasy carrément épique, je pressentais que quelque chose de spécial se trouvait à l'intérieur de la cartouche noire et rouge qu'elle renfermait... Mais quoi ? Je l'insère. Et là, une jolie musique accompagnant une jeune demoiselle suspendue dans les étoiles, l'épée à la main, m'invite à la suivre... Deux réactions s'entrechoquent : "Wow c'est trop beau !" puis "Je vais pas jouer avec une fille quand même ???" Mais la première impression prendra le pas sur la seconde après la découverte d'une présentation sommaire de l'histoire du jeu, mais graphiquement somptueuse pour l'époque, et avec un thème musical encore plus efficace que le premier...
"Papa ! Papa ! Ca veut dire quoi Once upon a time ?" Bah ouais, au 20ème siècle les jeux n'étaient pas encore traduits en français les djeun's... Et franchement, tant mieux, je crois bien que mon niveau d'anglais doit tout ou presque à ces jeux de rôles ou d'aventure devant lesquels je jouerai plus tard le Collins à portée de main. Eh ouais, le jeu et la motivation qui l'accompagne resteront toujours les meilleurs professeurs.
Enfin bref, la partie commence au coeur d'une capitale futuriste, Mota, et là c'est l'incompréhension la plus totale : "Comment qu'on donne des coups d'épée papa ? Ils écrivent quoi dans le manuel ?" - "On ne peut pas." (mon père est du genre laconique - ce qui expliquera en partie son appétence pour ce jeu dont les meilleurs équipements sont de type "laconian"). "Eh mais c'est quoi ce jeu de merde !?!" fut évidemment ma réaction de petit con ignorant...
Mais très vite c'est un nouveau monde vidéo-ludique qui s'offre à moi : chaque habitant doit être interrogé pour obtenir des renseignements, l'exploration des trois planètes du système Algol ne peut se faire sans l'angoisse continuelle de l'ennemi invisible, les combats offrent déjà un aspect stratégique même si limité, les donjons en fausse 3D ingénieuse passionnent, les coffres explosent, le scénario s'avère extrêmement riche et non linéaire, et puis il y a de la mythologie, de la difficulté pour une durée de vie énorme, des plages musicales entêtantes qui trottent encore dans ma mémoire ; une grande aventure quoi ! Surtout que petit à petit je me suis attaché aux différents personnages, et notamment à Alis, l'héroïne du jeu, qui inconsciemment a dû devenir en partie mon idéal féminin. Nausicaä, si tu me lis ! ;)
Et puis bon, ce jeu et ses suites ont en plus créé du lien entre mon père et moi (mon frère n'a pas trop accroché je crois) : nous y jouions tous les deux, lui le soir et moi la journée, et on regardait souvent l'autre jouer. Il m'aidait quand j'étais bloqué, et on discutait du jeu, on était là avec notre petit cahier à faire des croquis de cartes et surtout de donjons ! Epique et mémorable.
Enfin voilà quoi, Phantasy Star c'est de loin le plus gros souvenir de mon enfance en matière de jeux vidéos, une nouvelle vision et une nouvelle passion, plus stratégique et plus patiente, où tout n'était plus une question de répétition de niveaux et de réflexes... Et puis ça devait arranger mon père parce que au moins je ne pétais pas les manettes comme avec le premier Wonderboy ! ^^
Le phénomène s'amplifiera avec Phantasy Star 3 sur Megadrive (j'aurai le 2 plus tard), mais aussi avec d'autres titres Master System assez proches, à savoir le moche mais fabuleusement profond Ultima IV, ou encore l'excellent hybride aventure/action Y's.