Postal 2 est sûrement le jeu auquel j’ai le plus rejoué. Non pas que je le considère comme un chef-d’œuvre, mais j’y jouais pendant mon adolescence, et si l’on excepte le domaine du cinéma, à cette époque j’étais peu curieux de découvrir de nouvelles œuvres. Alors j’avais Postal 2 sous la main, et j’y rejouais fréquemment.
Il faut dire aussi que c’est un jeu qui avait tout pour satisfaire mon goût pour le subversif : on peut tuer des gens (normal) mais aussi leur pisser dessus, se suicider, ou se servir de chats comme silencieux.
Souvent qualifié comme étant un des jeux les plus violents qui soient, Postal 2 s’était développé une aura auprès des amateurs de déviance, et son interdiction de vente en Europe n’a fait qu’y participer.
Et là, près de 13 ans plus tard, les gars de Running with scissors proposent un DLC à leur jeu culte. J’ai pas pu m’empêcher de me l'acheter sur Steam, en soldes, avec le jeu d'origine, et de me refaire ce dernier.
Postal 2 nous fait vivre une semaine dans la vie du Postal Dude dans un patelin ironiquement baptisé Paradise. Un héros white-trash, qui vit dans une caravane avec sa femme acariâtre qu’on ne voit jamais. Le look du Dude dénote toutefois, on dirait que son style vestimentaire a été pensé pour les ados "rebelles" qui seraient devant l’écran : longue veste noire, lunettes de soleil, et t-shirt avec une tête d’alien.
Chaque jour, Postal Dude a une liste de choses à faire. Des tâches aussi simples qu’aller chercher le lait ou encaisser un chèque, mais peut importe de quoi il s’agit, ça dégénère pratiquement tout le temps.
Paradise est le reflet déformé d’une Amérique hostile où la grossièreté gratuite est monnaie courante, et où une bonne part de la population est armée, et n’hésite pas à le faire savoir à n’importe quelle petite vexation. Genre quand je sors ma bite pour pisser sur quelqu’un, il me tire dessus !
Au fil des jours, de plus en plus de passants ont un flingue sur eux, et les militaires lourdement armés finissent par arpenter les rues, comme s’il s’agissait de l’unique solution pour lutter contre la violence.
Postal 2 est comme un conte moral. Le jeu nous met face à certaines frustrations du quotidien, comme devoir faire la queue, mais avec les possibilités qu’on a, l’envie de shooter tout le monde ou de leur pisser dessus pour ne pas avoir à attendre est forte. Mais souvent, ça nous revient dans la gueule.
Comme l’indique le verso du boîtier du jeu d’origine, "Remember... it’s only as violent as you are !". Car effectivement, on peut finir le jeu sans violence, bien que ça soit beaucoup plus dur.
Et c’est une belle leçon de vie : il est difficile de s’en tenir aux règles de la bienséance dans la vie de tous les jours, mais après tout ça reste la meilleure voie à suivre.
Je déconne évidemment, cette phrase des développeurs n’est qu’une excuse bidon pour se parer contre les opposants du jeu qui, de toute évidence, allaient être nombreux. Et ça sert en quelque sorte de provocation supplémentaire.
Le jeu justifie même le fait de pouvoir uriner grâce à deux passages où c’est nécessaire, alors qu’évidemment si on nous offre la possibilité de faire vomir des innocents en leur offrant une douche dorée, ou de faire tous les autres trucs de psychopathe que le jeu propose, ce n’est pas pour rien.
Le jeu peut tout de même se défendre grâce à son cynisme et son second degré réjouissant.
J’adore l’ironie complètement absurde de la situation au début avec les manifestants anti-jeux vidéo, qui font usage de la violence au nom de leur cause.
Je dirais que l’humour de Postal 2 se situe entre celui de South park et de GTA, avec ce même goût pour la satire. L’équipe de Running with scissors s’attaque à un peu tout : les religions, le showbiz, les forces de l’ordre, la société américaine, et la politique de l’époque. Le jeu a été fait pendant la présidence de Bush, et on tape dessus avec ces terroristes infiltrés dans la population de Paradise. Ca n’a pas tellement de sens, c’est juste là pour se moquer.
Postal 2 blague même sur ses propres défauts (Dude qui fait remarquer que toutes les voitures sont en pannes, parce qu’on ne peut les conduire).
Certaines armes proposées restent dans cet esprit décalé ; dans le jeu de base il y a des ciseaux et une tête de vache folle.
Il y a beaucoup d’objets et d’armes, avec de nombreuses fonctions ; le jeu comporte des sortes d’astuces et petits secrets qu’on ne remarque qu’à force (ou en cherchant sur internet). Les donuts ou les chats par exemple peuvent être utilisés de différentes façons. Se pisser dessus a aussi son utilité, quand on est en feu. Il fallait y penser…
On peut faire vomir quelqu’un puis le décapiter pour voir le vomi sortir du cou. On peut attaquer les gens avec son chien.
Les développeurs ont étonnamment pensé à tout un tas de détails qui font plaisir à découvrir.
Il existe même un énorme réseau sous-terrain de terroristes, qu’on n’est même pas obligé d’explorer pour finir le jeu, mais suffisamment étendu pour prendre peut-être 1h à parcourir (et je ne l’avais jamais exploré avant maintenant).
Ayant joué cette fois à la version sortie sur Steam, j’ai remarqué de nombreuses petites modifications.
Déjà, concernant l’interface. Le changement d’arme est légèrement plus pratique, même si ça pourrait être mieux encore.
D’autres modifications sont beaucoup plus futiles, et semblent justifiées uniquement par une question de promotion : on entend la chanson de Wrythe qui était dans le trailer de Postal III, certains passants portent un t-shirt du jeu vendu sur le site de Running with scissors, …
Un easter egg se moque de Postal III, mais j’ai l’impression que les développeurs ont fait ça pour se placer du côté des joueurs déçus. Mais dénigrer ainsi, à cause de sa mauvaise réception, un jeu qu’ils nous ont fait attendre pendant des années, je trouve ça facile.
Steam oblige, il y a également quelques trophées très marrants, avec des références culturelles excellentes.
Mais ce qui m’a fait énormément plaisir, c’est les nouvelles armes, qui permettent de faire libérer davantage le psychopathe en soi.
Il y a notamment des sécateurs, qui permettent de découper des membres sans tuer la personne.
La faux, pour trancher les gens ; magnifique.
Et la tronçonneuse, qui d’un simple toucher fait exploser les corps.
Quelle merveille !
Les graphismes de Postal 2 me semblaient déjà primaires quand j’y ai joué pour la première fois, mais ça s’oublie vite, le jeu étant prenant car terriblement fun et défoulant. Et pourtant je n’aime pas les FPS d’habitude !
Encore aujourd’hui, ça reste un énorme plaisir que de jouer à Postal 2. C’est idiot, trash, et extrêmement violent, mais c’est ça qui rend le jeu si drôle ; tous ces excès absurdes procurent un sentiment de liberté (ou d’impunité devrais-je dire) qu’on ne trouve pas dans d’autres jeux plus sages.
I REGRET NOTHING.