Il y a des jeux qui sont difficiles à critiquer et noter. Le dernier titre de Rockstar en fait indéniablement partie. Certains aspects du jeu m'ont émerveillé (j'en profite pour évacuer la réalisation, oui le jeu est absolument magnifique, du jamais vu et surtout pour un monde ouvert. On a franchi un cap par rapport à The Witcher 3) quand d'autres m'ont vraiment dérouté dans le mauvais sens du terme.
Il y a d'abord la direction du réalisme choisie par Rockstar. Je vous avoue avoir ragé plus d'une fois les premières heures en voyant mon cheval se casser la gueule à cause d'une pierre ou en voyant ma tête mise à prix à cause d'une simple bousculade en pleine ville, ce qui peut procurer l'impression que le réalisme tue le réalisme d'ailleurs. J'ai également eu du mal à me faire à l'idée que comme dans la vraie vie, il faut bien penser à prendre ses armes sur son cheval, à bien garder tout le temps la même monture, que fouiller un corps prend 5-6 secondes, etc... Finalement le joueur se fait à ce parti prix et toutes les mécaniques qui s'annonçaient bien chiantes (de propreté, de faim, d'entretien du cheval, etc...) sont finalement bien dispensables. Par conséquent il est possible de contester leur présence mais du moment qu'elles ne sont pas gênantes il n'y a pas de quoi en faire un drame.
Cependant je suis bien plus perplexe envers tout ce qui touche au gameplay et aux contrôles. Les commandes sont vraiment problématiques, à tel point que je n'aurais pas été confiant sans HUD pour me dire sur quelle touche appuyer. Au début il m'est arrivé plusieurs fois de dégainer et tirer sur quelqu'un alors que je voulais simplement parler. Dans un souci de réalisme encore une fois, Arthur est plus lourd que John dans le premier opus et les fusillades ont forcément été alourdies. Ils sont parfaitement identiques à ceux du premier jeu, en plus mous et peut-être encore plus faciles. Heureusement le Red Eye est toujours là pour donner un côté jouissif à la chose mais on ne peut que déplorer l'absence d'innovation hormis quelques ralentis en cas de beaux tirs.
Les combats sont directement liés au plus grand défaut du jeu (largement ignoré par la presse hormis GK au passage) : Le rythme. RDR II est très long. J'estime avoir mis au moins 40h malgré l'absence de compteurs et le tout en faisant finalement assez peu de missions secondaires (j'ai dû faire 6-7 missions d'inconnus, 6 de chasseurs de prime, 3 chasses d'animaux légendaires et c'est marre). Je n'ai rien contre les jeux longs, au contraire même, mais il faut que la longueur soit justifiée, que tout s'enchaîne de manière fluide. Là franchement sur les 107 missions principales, l'on pourrait se passer d'au moins une quinzaine.
Le plus pesant aura été pour moi l'Epilogue. Il partait sans doute d'une bonne intention mais je l'ai trouvé interminable. On pourrait au moins virer le tiers des missions sans regret. Certes on voit le résultat des efforts d'Arthur et la fin de RDR I en paraît peut-être encore plus tragique, mais franchement ils auraient dû faire plus court.
Pour pas aider, les missions se répètent assez souvent.
Dutch (ou un autre) : Eh Arthur j'ai un bon plan pour gagner de l'argent, suis-moi !
Arthur : Ok Dutch !
On se déplace jusqu'à la mission.
Le plan débute mais tourne mal.
Fusillade de 3 minutes.Bain de sang. Fuite.
Dutch : Merde... J'ai besoin d'un plan/de temps (selon l'inspiration du scénariste).
Arthur : Ok Dutch !
Je n'exagère pas, préparez-vous à lire les phrases 'J'ai besoin d'un plan/de temps", Un dernier coup et on part" au moins dix fois. Les personnages se répètent beaucoup et c'est un peu pesant. Et vraiment énormément de missions débouchent sur une fusillade, et ce dès l'intro. On passe beaucoup plus de temps à canarder que dans RDR 1.
Pour finir sur les missions, je déplore également leur dirigisme. Ils ont repris la formule de GTA V, davantage axée sur la mise en scène que l'interactivité réelle. Il n'y a qu'une manière de progresser et l'on peut s'agacer de constater dans une course-poursuite qu'il est en réalité impossible d'attraper le poursuivi avant que le jeu l'air décidé. Par exemple dans GTA : SA un bon joueur peut rattraper et refroidir OG Loc en une minute au lieu de cinq s'il joue bien. Là le cheval d'Arthur ralentira automatiquement pour que le joueur ne rattrape pas son beau-frère avant le passage d'un train par exemple.
Il est temps de passer à la meilleure qualité du premier selon moi : L'écriture. Et pour cela je vais passer en mode spoiler. A ne pas lire si vous n'avez pas terminé le jeu ainsi que RDR I donc.
Pour résumé je dirais que je suis satisfait pas conquis. Le scénario, les dialogues, les personnages sont plus travaillés que dans la grande majorité des jeux AAA c'est indéniable, mais je trouve que Dan Houser et ses co-scénaristes n'ont pas fait aussi bien qu'en 2010, et surtout différemment. On ne voit plus trop la patte Rockstar, tout est beaucoup plus terre à terre, moins satyrique, étrangement sage et standardisé. Plus réaliste encore une fois. Enfin j'ai tout de même retrouvé l'humour Rockstar sur les missions secondaires (qui sont encore une fois très réussies, peut-être même davantage qu'avant) et les événements aléatoires (ceux trollant le KKK notamment).
Je vous avoue ne pas m'être vraiment intéressé à la majorité des membres de la bande de Dutch hormis Arthur, John et sa famille, Hosea (forcément) et Dutch. Bill et surtout Javier sont finalement assez transparents. Charles est finalement assez lisse malgré les efforts mis dessus et tous les autres qui se font buter on est presque en mode "osef" tellement on les a peu vus. D'ailleurs leur mort n'est pas vraiment choquante car presque obligatoire (et oui, c'est un prequel). C'est probablement pour cela que LE moment fort du jeu, le décès d'Arthur, est très loin d'égaler celle de John en 2010. Cela dit en tant que vivant Arthur est vraiment un excellent personnage principal même si pour le coup il faut faire du contenu non-obligatoire pour prendre la mesure de sa rédemption (les quêtes sur la famille Downes et la dernière mission d'usure). C'est quand même un comble que le joueur puisse passer à côté de missions essentielles au scénario quand il doit s'en taper des inutiles par wagons.
J'ai également pesté sur la passivité des membres du gang devant la folie de Dutch évidente à partir du chapitre 5 mais cela peut s'expliquer par leur relation de longue date. Je ne trouve par contre aucune excuse envers les personnages de Micah et de Sadie. Le premier est une telle pute qu'il ne peut qu'être le fameux rat et Sadie est un personnage totalement formaté pour plaire aux SJW (oui même Rockstar se soumet) et pour le coup bien en dehors du réalisme tant désirée. Elle est particulièrement chiante parce que très importante dans le dernier tiers du jeu. C'est dommage car le premier RDR avait vraiment d'excellents personnages féminins, fortes et crédibles.
Enfin, il est improbable que Dutch, malgré toute sa folie, choisisse Micah qu'il connaît depuis six mois au mépris d'Arthur qu'il a quasiment élevé. Encore une fois vous me direz que cela justifie la scène finale dans laquelle il choisit John à la place de Micah, comme pour se racheter de son précédent choix (les jeux portent bien leur nom). Bonne fin tout de même.
Après tout cela vous devez vous demander pourquoi 8, une si bonne note après tant de critiques. En effet j'ai hésité à mettre un 7 mais je me suis dit que cette réalisation magistrale, cet effort sur l'écriture malgré quelques maladresse et ce monde ouvert plus crédible que jamais valait bien cela.
Mais bon si les gars de Rockstar lisent ma critique, sachez que si vous :
- Viriez 15-20 missions inutiles
- Amélioreriez les fusillades et les phases d'infiltration, pour avoir un vrai gameplay
- Modifiiez Sadie
Ce serait surement le 10 et le jeu de la génération.
Tant pis.