4 ans après avoir opéré un changement radical de la formule avec Resident Evil 7, basé sur le moteur graphique RE engine, Capcom sort en Mai 2021 le nouveau né de la saga, Resident Evil Village ( ou RE 8, comme vous préférez).
Et puisqu’on parle de nourrisson, cela tombe à pic, puisque c’est le leitmotiv de ce nouvel opus canonique. Quelques années après la tragédie de Dulvey dans RE 7, on retrouve notre héros sans visage, Ethan Winters, qui a fondé une famille avec sa femme, Mia, qu’il cherchait dans l’opus précédent dans le manoir Baker. La petite Rose est donc le fruit de leur amour, qui va malheureusement être kidnappée par Chris Redfield et ses hommes. Ethan se réveille traumatisé dans une forêt d’Europe de l’Est. Son bébé a disparu, sa femme Mia est présumée morte, et une chose importe désormais. Retrouver sa fille.
Ethan Winters, qui a suivi un entraînement militaire entre l’opus 7 et l’opus 8, s’aventure dans un étrange village, sur lequel règne d’une main de fer la mystérieuse mère Miranda, et les 4 lords sous sa coupe: Lady Dimitrescu, une femme vampire de 3 mètres, Donna la marionnettiste et sa sinistre poupée Angie, Moreau l’homme difforme et Heinsenberg, le fils caché de Magneto dans X-men vu sa propension a pouvoir manipuler le métal.
Dans sa tache, Ethan sera épaulé par le Duc, un étrange marchand obèse itinérant qui semble en savoir plus qu’il ne le dit. Alors, etes vous prêt à rentrer... Dans le village ?
1) La continuité du 7, avec le 4 dans le rétroviseur ?
La première chose qui va sauter aux yeux du joueur habitué de la série de survival-horror, c’est le changement dans la continuité qui s’est opéré avec cet opus. Resident Evil 4 a été mélangé avec Resident Evil 7, et ça donne Resident Evil 8. Le jeu, tout en gardant le gameplay FPS, est devenu beaucoup plus fluide, beaucoup plus dynamique, ce qui fait que Ethan peut se mouvoir et combattre de façon beaucoup plus sportive dans cet environnement plus ouvert que le manoir Baker.
Ethan bouge plus vite, tire mieux, et s’est doté d’une contre-attaque qui est capable de repousser les ennemis. En maintenant le bouton L1 sur PS4, et en appuyant à nouveau, il donnera son meilleur coup de pied pour projeter les ennemis plus loin. On est pas sur un surhomme à la Leon Kennedy ou Chris Redfield, on reste dans le domaine du crédible.
L’arsenal d’Ethan, comme dans le 4, va s’étoffer à fur et à mesure que vous faites des runs sur le jeu. Re 8 cherche à simplifier son gameplay, en supprimant purement le coffre et en ne mélangeant pas les objets clefs, les matériaux de confections, et l’inventaire, la fameuse mallette de RE 4 que l’on retrouve ici.
Du coup, le jeu cherche à limiter au maximum les aller-retour et calque son flow de jeu sur l’action. Au dos de la jaquette, il est écrit à la fois survival-horror et action-survie. Et je trouve que le jeu penche beaucoup plus vers l’action survie que le survival-horror. Je m’explique: pour moi, RE 7, en normal ou en hardcore, était clairement plus exigeant que RE 8. Il n’y avait pas beaucoup de munitions, il fallait faire attention, et surtout viser juste. RE 8 est beaucoup trop facile à mon goût, parce qu’il donne trop de munitions. Alors par moment, oui vous serez un peu à sec, mais on sent très clairement que le jeu se veut plus grand public que le précédent. J’ai pas eu un énorme challenge en mode normal, et en mode hardcore dans mon second run, je me rend compte que finalement la difficulté est surtout basé sur les dommages infligés par les ennemis. Autrement dit, le niveau de difficulté influe peu sur la quantité de munitions que le jeu donne ( à vérifier pour le niveau de difficulté « village des ombres »). C’est dommage. Du coup le second run en hardcore est clairement plus facile, parce que j’ai des armes puissantes, des fusils mitrailleurs, des fusils à pompes automatiques qui vont mettre rapidement les zombies à terre.
Et parlons en du bestiaire justement: il est clairement au dessus du 7, qui avait une tendance à recycler toujours le même ennemi. Ici on a donc des lycans ( ou des zombies-garous si vous préférez), qui peuvent varier. On a les lycans de base, des villageois, qui attaquent avec des masses ou des arcs. On sent que ça ressemble beaucoup plus à du zombie conventionnel dans un Resident Evil, le côté animal en plus. Ils tapent fort, ils sont capables de s’organiser, y en a un qui peut vous attaquer et un second qui peut vous attaquer conjointement en même temps. Ils sont aussi capable d’esquiver parfois vos tirs, faites bien attention. On peut retrouver des lycans plus grands, qui se protègent le visage avec un casque et portent des griffes en fer. Et enfin on trouve ce qui se rapproche le plus du loup garou, sans en être un totalement . Je regrette néanmoins, je pensais qu’on verrait un vrai loup-garou comme sur l’affiche du jeu, c’est pas vraiment ça.
On retrouve dans le château Dimitrescu des zombies féminins assez classiques, encapuchonnées dans des robes de moines, et qui vous attaquent avec des épées. Elles ont une variante, les zombies volants, assez sympathique, ça m’a rappelé les chauves-souris géantes dans le très méconnu mais excellent survival-horror ( sur sa partie Jack Driscoll) King Kong, le jeu dérivé du film éponyme de Peter Jackson.
Et enfin, dans la dernière partie du jeu, on trouve des zombies sur lesquels on a greffé des parties métalliques, comme des perceuses, un jet pack, ou encore une armure totale. Ça donne des affrontements assez tenus, c’est peut-être les zombies les moins rattachés au folklore vampire voulu par le jeu.
Sans trop en révéler, vous aurez aussi pas mal de mini-boss, vous connaissez certainement les filles Dimitrescu, dont vous vous débarrassez assez facilement. Elles ont le mérite d’être là néanmoins.
Pour conclure cette partie, le cheminement du jeu se calque sur le 7... Avec plus d’ennemis. En effet, ici, il y a non pas 3 ennemis principaux, mais 5, en occultant les mini-boss. Vous avez la zone du château avec les Dimitrescu mère et filles; clairement l’une des meilleurs zones du jeu. Vous avez la zone de la marionnettiste, bel hommage à Silent Hill PT et aux films horrifiques Annabelle, probablement l’un des passages les plus flippants de la série Resident Evil. Vous avez la zone inondée du Moulin, avec Moreau, c’est déjà un poil moins recherché. Et vous avez la zone d’Heisenberg, qui propose les passages clairement les plus orientés actions, d’abord dans une forteresse puis dans son usine, le passage qui est peut-être le moins inspiré du jeu.
C’est tout. A celles et ceux qui pensaient que le jeu allait durer longtemps, comme le promettait les développeurs, c’est une semi douche froide. En prenant mon temps en normal; en ayant quasiment tout exploré la map, en fouillant pour trouver les trésors à revendre pour le marchand, et ainsi améliorer les armes/acheter des munitions voir améliorer les statistiques d’Ethan avec le mini système de chasse, j’ai mis 10h pour le terminer, cinématiques comprises. Sur mon second run, je suis presque à 4h de moins, et sur les suivants que je risque de faire, je serais surement en dessous des 5h.
En résumé, oui c’est vrai, le jeu est le plus long tournant avec le RE Engine, 10h lors du premier run en prenant son temps. Cependant le jeu offre une bien meilleure replay value, vous reprenez avec votre équipement, vous pouvez débloquer de nouvelles armes, acheter des codes de triche via la boutique ( comme dans RE 3 remake)...
Facilement ça peut monter à une trentaine d’heures, si vous le refaites 4-5 fois. Et en plus, vous avez du contenu à débloquer , des artworks, les figurines des personnages, il y a des making-off et le retour du mode mercenaires ! Pas totalement comme on l’a connu avant, et il a le mérite de faire le boulot, j’espère peut-être pouvoir jouer un autre personnage que Ethan, c’est peut-être possible de débloquer Chris, je n’ai pas suffisamment joué pour le dire. Et si vous achetez le jeu neuf, vous avez un code pour télécharger le jeu multijoueur RE Verse, je ne l’ai pas essayé, je n’en parlerais pas.
Bref, ce qu’on peut dire c’est que RE 8 Village est beaucoup plus généreux que son prédécesseur, et ça, c’est fortement appréciable.
2- La meilleure direction artistique pour un Resident Evil ?
Selon moi, Village possède le meilleur cachet artistique de la série. Il a une vraie identité propre, et signe d’une certaine façon un retour vers le Resident Evil classique. J’ai adoré le château Dimitrescu, le character design est vraiment fantastique, et j’ai adoré la maison de la marionnettiste. C’est clairement les meilleurs passages du jeu, si je compte le boss de fin, que j’ai adoré également.
Il y a des plans qui ne vont pas vous laisser indifférents. L’arrivée dans le village, la maison de Donna, la vue sur les montagnes, ou encore le hall du château Dimitrescu. Même dans l’usine d’Heisengberg ou le réservoir de Moreau, il y a quelques pépites visuelles, c’est vous dire.
La musique est clairement moins réussie que l’opus précédent, à l’exception d’une ou deux pistes, l’OST est moins marquante, la musique de la save room laisse une empreinte acoustique bien moindre. Par contre, les effets des monstres, les bruitages des armes, rien n’a dire, c’est excellent.
Ce que j’ai aimé, c’est que le village évolue au fil des pérégrinations d’Ethan. D’abord enneigé, puis ensoleillé, la pluie, le jour ou la nuit. C’est vraiment sympa.
En terme de level design, ça se veut plus ouvert que RE 7, ça reste quand même couloir, j’aurai apprécié avoir une zone forêt voir une zone montagne, malheureusement on se cantonne au village et à ses alentours.
Parlons du portage PS4. À l’origine, le jeu n’était pas prévu pour, et finalement ils l’ont porté dessus. Résultat ? C’est très propre. Le jeu tourne mieux que le 7. On est presque à 60 FPS, avec une résolution de 900 P sur ps4 Fat ou slim ( donc mon cas), 1080 P sur PS4 pro et de la 4K sur PS5. N’ayez pas peur de le prendre sur votre PS4, il tourne bien.
Cependant, je note parfois des textures qui apparaissent au dernier moment de temps à autre, la fourrure des grands lycans qui parfois s’affiche moins bien, ou encore quelques temps de chargement si on passe d’une zone à une autre rapidement. Mais honnêtement rien de bien méchant, même les temps de chargements sont pas si longs que ça, franchement bravo Capcom, votre portage PS4 du jeu est propre, quelques patchs viendront sans doute encore améliorer une expérience déjà très qualitative day one.
Par contre le moteur physique du jeu est clairement moins bon que les précédents jeu sous RE Engine, RE 2 remake et RE 7 en tête. Y en a un peu, mais parfois tu vas tirer dans une bouteille, dans une tasse et rien ne se passe. Au niveau de la localisation des dégâts, c’est mieux du point de vue de Ethan, car on va voir les marques de morsures, de blessures sur ses mains, le sang projeté sur ses armes. Du point de vue des ennemis, c’est décevant. A part la classique tête qui explose pour les villageois lycans, c’est le néant. Les zombies féminins, si tu tires dans ses jambes ou dans sa main, elle peut trébucher ou lâcher son épée, et c’est tout. On est très loin d’un RE 2 remake, avec un zombie coupé en deux qui vous poursuivait en se trainant. Dommage.
3- Un scénario, en demi teinte ?
Sans trop en révéler je dirais que le scénario du jeu est correct, cependant cela part en peu en vrille sur la fin. On essaie de faire des twists qui marchent peu, parce qu’ils ne surprennent pas, ils étaient évidents. On essaie de faire des corrélations forcées avec l’opus précédent mais aussi carrément avec les origines de la saga, et ça ne marche pas, ou à moitié.
En fait, ce statut d’opus le plus sombre de la saga, je suis pas totalement d’accord avec. Parfois, oui, notamment sur le passage de la maison des poupées, et parfois, non, notamment la dernière heure de jeu qui revient beaucoup trop à Resident Evil... 6.
Disons le clairement. Autant RE 8 était logique dans le sillon du 7, autant j’ai d’énormes doutes sur RE 9. Après avoir donné une nouvelle orientation avec RE 7, on sent un semi rétropédalage vers le 4, vers ce coté action horrifique qui a enlisé la série dans ses pires travers, avec l’opus 6 notamment.
Et clairement comme souvent dans une trilogie RE, on remarque que la série glisse vers l’action. Regardez la différence entre RE 1 et RE 2/RE 3. Pour moi elle était saluable, notamment avec le 2, je ne suis pas fan de l’opus zéro et du premier opus. Regardez la différence entre un RE 4, vraiment cool à faire, avec un RE 5, le dernier potable de la série Third Person Shooter, et RE 6 qui a amené la série vers quasiment son abysse ( sauf le mode mercenaire qui est excellent dans RE 6).
La fin de RE 8 tease un RE 9 que je pressens soit ultra orienté action, soit renouant trop avec ce que justement les gens ne voulaient plus voir. RE 7 s’éloignait du canon, et RE 8 tente de s’en rapprocher, c’est très perturbant.
Conclusion
Re 8 est le premier Resident Evil que j’ai acheté day one, et je trouve qu’il valait amplement l’investissement. Beaucoup plus que l’opus précédent. Ambiance léchée, avec une direction artistique la meilleure de toute la saga, puisant son inspiration auprès des romans de Bram Stroker et des loups garous, il réussit avec brio à proposer à la fois du jamais vu dans la saga et en même temps viendra titiller la fibre nostalgique RE 4 des joueurs assidus de la série.
C’est un opus qui se veut clairement plus accessible, et plus orienté action. Comme à chaque fois finalement, dans une suite Resident Evil. J’y ai trouvé mon compte, je l’ai apprécié et cependant j’émets quelques réserves. Tout d’abord, le jeu donne trop de munitions à mon goût, on perd sur le coté survival-horror. Au niveau du scénario, le soft a tendance à s’égarer vers la fin, tentant maladroitement de relier le 7 voir même le premier. J’ai des doutes sur ce que va être RE 9 véritablement. J’aurai aimé que le jeu soit un poil plus long, j’aurai aimé une phase dans une forêt ou une montagne avoisinante.
En fait là où RE 7 opérait une rupture dans la saga, pas pour me déplaire sur certains points, et sur d’autres, m’exaspérait parfois, ici RE 8 revient brosser dans le sens du poil les fans. Ça marche bien, on y gagne beaucoup sur le feeling de jeu, mais on perd sur le côté survival et du scénario. C’est ma plus grosse frustration sur le jeu.
Je pense que la recette a été améliorée, et je sens cependant qu’il va falloir à nouveau créer un paradigme pour chambouler tout ça. Lady Dimitrescu qui vous poursuit dans le château, mais qui ne peut pas passer une porte parce que c’est le script qui le veut. Le script du début de jeu qui met une plombe à se lancer en mode hardcore, l’attaque du village, qui fait fortement penser à RE 4. Ce côté linéaire qui est encore trop présent.
Néanmoins, je ne peux pas bouder mon plaisir. J’ai passé un bon moment sur le titre, je compte passer encore pas mal d’heures dessus, preuve en est que cet opus est bon dans ce qu’il propose. Je n’irais pas jusqu’à dire que c’est le meilleur opus de la saga, et cependant il clairement plus intéressant que le 7... Même si le 7, paradoxalement, est peut-être meilleur sur son côté survival horror, car le 8 est plus axé entre un mélange action horrifique modérée et survival horror plus casual, car on donne trop de munitions. C’est ma déception, avec le scénario qui va vers un 9 sur lequel j’ai des doutes, car j’ai l’impression qu’on va revenir vers le Resident evil vu et revu.
En tout cas, Capcom montre avec ce nouvel opus une nouvelle fois sa maitrise du genre et des codes, qui arrive à se renouveler sans trop se dénaturer avec le côté action. Pour combien de temps, encore ?