Riven a longtemps été résumé à sa difficulté. C'est à mon avis passer totalement à coté de ce qui fait l'intérêt de ce jeu : une expérience formidable et unique.
A la fin de Myst, on découvrait un inventeur créant des mondes grâce à l'écriture de livres, appelés Ages. On le retrouve en ouverture de ce jeu, où sans nous donner beaucoup d'informations, il nous balance dans le monde de Riven, en nous disant que "vous allez voir, c'est un peu la merde la bas". Et après une transition magique, on se retrouve sur une ile ensoleillée, qui se referme subitement en prison, devant un garde aussi surpris que hagard, avant que lui même ne se fasse attaquer par un rebelle mystérieux qui nous libère et se casse.
Voila les 3 premières minutes du jeu, et nous sommes en 1997 : des acteurs nous parlent, parfaitement incrustés dans des décors sublimes, et nous nous retrouvons plongés dans un univers beau, complexe, sans personne pour nous tenir par la main par un tutoriel, et avec tout un monde à découvrir.
Ce qui frappe tout d'abord dans Riven, c'est que ce jeu en point et clic regorge de vie. On n'y croise quelques silhouettes qui fuient quand elles nous voient, des animaux improbables, des paysages animés qui font que nous ne savons pas si nous sommes sur de la 3D, de la 2D, ou une réalité alternative. Cette impression de vie fonctionne surtout avec le monde que l'on nous donne à voir : en se promenant, on se rend compte que c'est un monde exotique, avec une société complexe, qui se construit autour d'engrenages magnifiques d'un coté, et tombe en déréliction de l'autre.
En explorant l'ile, sans aucun journal ou lettre, on va découvrir une dictature fragile, on va devoir lire à travers une propagande cachant des secrets du passé, on va devoir découvrir une base rebelle habilement dissimulée, on va enquêter sur les plans du patriarche dominant l'ile. Il va nous falloir pour cela se frayer un chemin dans une île parfois hostile, parfois refermée sur elle même, mais toujours sublime.
Tout cela est en fait rendu possible par ces énigmes si décriées pour leurs difficultés. La raison de leur complexité, c'est que ces énigmes ne sont pas des puzzles posés sur un piédestal : ce sont des mystères construits pour tenir la population de Riven à l'écart, ce sont des secrets cachés derrière des symboles, des indices dissimulés derrière des troncs d'arbre, des révélations rangées derrière des machines.
Résoudre les énigmes de Riven, ce n'est pas être bloqué par un puzzle : c'est comprendre un monde qui nous était totalement étranger, c'est décrypter une histoire de famille et de domination, c'est voyager et apprendre le fonctionnement d'une civilisation qui tente de cacher ses mystères.
Bref, Riven, c'est le jeu qui il y a 20 ans, nous donnait l'impression de se retrouver plongé dans une aventure épique et démesurée, après avoir passé 3h à décrypter comment pousser des cailloux dans le bon ordre... Dans ce sens, oui : cette suite est réputée pour la grande difficulté de ses énigmes.