The Girl obeyed the Rule of Rose
Je n'avais jamais entendu parler de ce jeu avant de l'apercevoir dans les rayons d'une FNAC, quelque temps après sa sortie. La couverture a tout de suite attiré mon regard: fond façon papier froissé, monochromie, police de caractère bizarre, imagerie vaguement gothique-sucrée. Je m'attends à un concept génial, je retourne la boîte du jeu, et là je vois les images d'un enième survival, genre que j'apprécie mais dont je faisais une overdose à l'époque. Déception, je repose la boîte et je vais acheter Average RPG #45832216.
Puis un jour je retombe sur ce jeu dans la collection d'un ami. Ce dernier accepte avec réticence de l'insérer dans sa PS2 à la place du dernier gros titre, et me montre l'intro. On pouvait y voir, parmi des scènes présentant l'héroïne terrifiée et des enfants faisant des trucs bizarres, un poisson géant voler tranquillement au-dessus d'un manoir anglais. Cette dernière scène à elle toute seule m'a fait acheter le jeu.
Rule of Rose prend place dans une ambiance assez originale pour un survival. L'héroïne se retrouve dans l'orphelinat où elle a passé une partie de son enfance (le jeu se déroule au début du XXe siècle), en compagnie des autres pensionnaires, qui ont monté une sorte de société secrète à base de rites initiatiques assez étranges. L'orphelinat semble également être hanté par diverses créatures sorties des cauchemars de ses habitants.
Le gameplay du jeu est assez classique pour un survival, si ce n'est que le chien de l'héroïne peut l'aider lors des combats et de la recherche d'objets. Néanmoins, la maniabilité s'avère assez revêche et mieux vaut tenter d'esquiver les ennemis que de les combattre. Les boss sont en général particulièrement douloureux. Beaucoup diront que le gameplay de Rule of Rose est raté, personnellement je le vois comme une métaphore de la situation de l'héroïne (quand on est perdue au milieu d'un univers cauchemardesque, sans aucune expérience du combat, c'est pas vraiment évident de casser du monstre à la dizaine), même si ce n'est probablement pas voulu par les développeurs à l'origine...
Le concept du jeu est donc d'échapper aux créatures, mais également de "grimper" dans la hiérarchie sociale établie par les membres de l'orphelinat. Or impossible de s'élever socialement sans prendre la place attribuée à une autre, et c'est là que le scénario du jeu devient extrêmement intéressant, présentant les personnages tour à tour en position de force et de faiblesse. Chaque chapitre du jeu tourne autour d'un des personnages, de son univers, de ses aspirations et de ses peurs, et de nombreux éléments métaphoriques sont souvent révélés implicitement. Je suis particulièrement fan d'Eleanor, l'asociale qui emmène une cage vide avec elle partout où elle va. On a ici un univers très différent de la plupart des autres survivals, avec des éléments empruntés aux contes (princesse, sirène, loup...), basé sur la perception du monde par des enfants.
Ce jeu fait tour à tour dans le franchement malsain, le simplement étrange, le joliment poétique et le tristement nostalgique. La musique de Yukata Minobe, avec ses accords dissonants, ajoute énormément à l'ambiance. Sans doute mon survival favori sur PS2.