Horses, horses, horses...
Ce qui est sûr, c'est que dès le début le pitch du jeu accroche : on nous propose d'élever des poneys magiques et autres licornes, dans le but de trouver 5 cristaux légendaires.
J'avais acheté ce jeu pour l'anniversaire d'un ami. Sûrement trop époustouflé par la qualité du scénario, il a décliné le cadeau. C'est donc avec joie que je décidai d'entamer mon épique quête.
Mais voilà, j'allais très rapidement me rendre compte que ce jeu n'était pas à la hauteur de mes espérances.
D'abord, le héros. Ou l'héroïne. Ils sont vraiment laids, et c'est le premier défaut du jeu. Leur design n'aide pas vraiment à l'immersion et je me suis très peu identifié à la petite fille que j'avais choisi.
Mais bon, à part pour ceux ayant un souci de réalisme, ce n'est pas le plus important. Non, ce qui est important, ce sont avec évidence les poneys.
Et là, autre déception : on ne peut pas choisir le nom de son cheval enchanté. Je me suis donc retrouvé à élever une certaine "Agacia", licorne de son état. (Plus tard j'allais faire l'acquisition de "Jambus", un cheval-démon squelettique. Pas très adapté aux jeunes enfants).
Alors que je réceptionne le poulain, on me sermonne d'utiliser un cristal magique. Car oui je ne l'ai pas précisé, mais l'image de la petite fille que j'incarne apparait toutes les trois secondes et me donne des indications sur absolument tout ce que je veux faire. Heureusement on peut désactiver cette option.
Utilisant donc le cristal magique, mon cheval se met à grandir en une seconde, devenant une belle licorne. On peut voir ici encore un souci de réalisme, je n'ai pas eu le temps de m'attacher au bébé que je venais de réceptionner.
Se présentent alors plusieurs choix pour moi. Mon haras est composé de divers bâtiments. L'un pour soigner mon cheval s'il tombe malade, l'autre pour lui faire de nouveaux fers et améliorer ses compétences, et enfin bien sûr un terrain d'entraînement.
Ma licorne venait à peine de naître et de grandir en quelques heures, je décide donc naturellement de lui faire tirer des énormes pierres afin d'augmenter sa force et de la faire participer à des concours. Les chevaux possèdent plusieurs compétences, et chaque exercice améliore une compétence. Les exercices sont tous pareils : des QTE dans lesquels il faut appuyer sur une flèche au bon moment. Assez difficiles, ils requièrent patience, doigté et maîtrise de soi.
Afin de retrouver les précieux cristaux magiques, je dois avoir des super-chevaux de toutes les races, au niveau maximal. Des heures d'entraînement acharnés vous attendent donc, entre lesquels vous devez brosser mon cheval pour le rendre heureux. Accessoirement, pour aussi le faire se reposer.
Je vois d'ailleurs pas le rapport. Je peux même affamer mon cheval et il continuera à travailler sagement pour moi sans jamais broncher. Vous voulez vraiment apprendre à vos enfants à bien traiter les animaux ? Ce ne sera pas avec cette jeu.
Car oui, Secret of the Magic Crystals cache bien son jeu.
Celui-ci nous propose plusieurs missions dans lesquels nous devons envoyer notre cheval remplir divers tâches pour les habitants du village (que nous ne voyons jamais, notre cheval s'en va et revient au bout d'une minute environ). Et c'est à ce moment que je vis le vrai message du jeu.
Métaphore de la condition humaine, dans laquelle le cheval est l'homme travaillant pour la masse informe (le capitalisme, c’est-à-dire les habitants du village que nous ne voyons jamais, alias la machine invisible).
Il s'entraîne pour participer à des courses et gagner des coupes, c’est-à-dire l'inutile apparat social de l'homme, étant donné que les coupes font juste office de décoration. L'argent que nous gagnons à la sueur de notre cheval (c’est-à-dire nous-mêmes en fait, ce qui explique de la même façon le design de l'héroïne, pas très attachante) ne sert pratiquement à rien. On peut améliorer les bâtiments (notre condition sociale) pour des améliorations dispensables (de nouvelles recettes de médicaments, de fers, ou, plus utile, de nouveaux box, encore une fois référence au capitalisme et à la société de consommation).
Le jeu pousse aussi à l'endogamie, puisque nous ne pouvons faire accoupler que des chevaux du même niveau. Doit-on y voir une influence du malthusianisme (1), puisque nos chevaux ne peuvent s'accoupler qu'une fois ?
Secret of the Magic Crystals n'est pas une simulation, c'est un jeu de stratégie. On passe notre temps à essayer de gagner de l'argent, en améliorant notre chance dans les courses en cueillant des trèfles (qui n'apparaissent pas les jours de neige malheureusement) et en cliquant sur des arc-en-ciel pour trouver des trésors. On ne contrôle pas son cheval dans les courses, nouvelle preuve de l'absurdité de la vie dont témoigne avec allégresse le jeu, par l'utilisation du concept de la main invisible, concept popularisé par Adam Smith au XVIIIème siècle. (2)
(On peut également y voir une référence à Albert Camus, voir à ce sujet l'article en bas de page. (3))
Enfin, le problème de Secret of the Magic Crystals, c'est qu'il n'est pas drôle à jouer, même ivre. Voir de tels chevaux se faire exploiter fend le cœur et nous renvoie directement à la saga de Masaki Kobayashi sur la condition de l'homme et ses tourments.
Secret of the Magic Crystals est une perte de temps. Trop cryptique pour être apprécié à sa juste valeur, l'ennui se présente rapidement et la dureté de son propos empêche un véritable amusement.
Sources :
(1) http://www.universalis.fr/encyclopedie/malthusianisme-et-neo-malthusianisme/
(2) http://fr.wikipedia.org/wiki/Main_invisible
(3) http://surlefil.over-blog.net/article-le-mythe-de-sisyphe-ou-l-absurdite-de-la-vie-99173094.html
(4) http://www.senscritique.com/film/La_Condition_de_l_homme_1_Il_n_y_a_pas_de_plus_grand_amour/480277