L'esbroufe de l'année, l'entourloupe du siècle, le jeu qu'on est trop fier d'aimer parce que personne d'autre n'y a joué. Spec Ops rejoint à ce titre Alpha Protocol et Deadly Premonition, ces jeux mal aimés, boudés par le public mais fièrement défendus par une poignée de convertis.
Cependant, contrairement à Alpha Protocol qui compensait un gameplay insipide par une gestion des dialogues excellente, Spec Ops n'a rien de bon. Son gameplay est sans intérêt et complètement scripté, son level design inexistant et ses graphismes moyens. Mais, parait-il, il faut y jouer pour l'ambiance.
Alors parlons-en de l'ambiance. Quand il ne se contente pas de pomper (les gens qui aiment le jeu disent " rendre hommage ") Apocalypse Now, le jeu accumule des cinématiques grotesques et larmoyantes. La mise en scène odieuse, qui s'attardera sur un cadavre d'une mère protégeant son enfant d'une bombe au phosphore blanc, alterne des filtres marrons (c'est le sable), bleus (c'est la froideur de la mort) et rouges (c'est l'horreur de la guerre). Autant dire que le jeu nous prend par la main et ne laisse aucune place à l'interprétation : la guerre, c'est mal.
Les développeurs se sont aussi permis le luxe de donner des choix qui n'en sont pas. Quoique tu fasses, tout le monde meurt. Les développeurs prennent un malin plaisir à laisser au joueur l'impression qu'il a un pouvoir sur le déroulement de l'histoire, pour lui prouver la seconde d'après que c'est tout de même eux qui mènent le bal. Si certains joueurs ont trouvé intéressant cet aspect du jeu, il m'a surtout donné l'impression de perdre mon temps. C'est un jeu vidéo. On laisse au joueur la possibilité d'influencer l'histoire, ou on le mène à la baguette. Ce genre de non-choix m'a mis le cul entre deux chaises : ce qui arrive, c'est de ma faute ou on me raconte une histoire ?
Plusieurs fois pendant le jeu, l'histoire met le joueur en face du fait accompli : en essayant de sauver sa peau, le personnage principal va être le coupable d'actions effroyables. Si le joueur avait consciemment fait ce choix et qu'il se retrouvait à en supporter les conséquences, l'effet aurait été réussi. Malheureusement, les scripts du jeu vous forcent à commettre l'irréparable, jusqu'au crime de guerre. Le moindre écart est automatiquement puni par des ennemis qui vous abattent en quelques tirs.
Si je le compare à Mass Effect 2, qui propose à un moment au joueur de choisir entre condamner un eugénisme qui a eu des résultats positifs pour la galaxie ou le justifier pour réconforter un ami, les développeurs de Spec Ops ont complètement raté leur coup : si vous ne me laissez pas faire mes propres erreurs, je ne me sentirai pas mal en les faisant.
Un camp de réfugiés a été passé au phosphore blanc mais je m'en lave les mains.