Où l'on s'emploie à résumer hâtivement ce qu'il en est de la vie, de l'univers et du reste
(Afin d'aborder cette critique, je conseille la lecture de cette autre critique de moi-même à propos de Civilization IV, les deux se répondants: http://www.senscritique.com/jeuxvideo/civilization-iv/32123675792465/critique/mazertyui/ )
On l'a donc vu, la saga Civilization reste frileuse dans sa volonté de narration de "l'Histoire" et préfère assurer la qualité ludique de son œuvre par la mise en valeur de ses mécanismes de jeux. Dans Spore, le problème est tout autre.
Plus ambitieux encore dans son principe, Spore propose de suivre l'évolution d'une espèce, de sa phase monocellulaire à sa domination absolue de l'univers. En théorie Spore est donc le jeu de gestion ultime: Pas un "simulateur de vie" mais le simulateur de la vie elle-même.
Encore une fois, la perspective de la synthèse de la vie dans sa globalité en jeu est tentante: rendre la vie ludique c'est lui donner un but et donc, un sens. Avant d'y jouer on peut d'ailleurs penser qu'à l'image de Civilization, c'est à ce niveau-là qu'il se cassera les dents et, après tout, on ne lui en aurait même pas voulu. L'ampleur de la question est telle que peu s'y sont risqués dans l'Histoire et encore plus rarement de manière convaincante. Comment imaginer alors que Maxis, avec toute la meilleure volonté du monde, arrive et change à tout jamais la face du monde en y répondant de manière absolue et définitive? Très intelligemment, ils n'essaient même pas.
En effet, après les quatre premières phases du jeu, de qualité douteuse mais ne constituant finalement qu'un long prologue visant à définir de manière ludiques les attributs physiques et culturels de votre future espèce, Spore devient, avec l'ère spatiale un grand bac à sable galactique sans fin et donc sans but. En effet, si il est possible (quoi qu'extrêmement long) de conquérir toutes les planètes de tous les systèmes de la galaxie, on ne peut parler de "but du jeu". Le jeu ne vous récompensera pas, ne finira pas, reléguant cette immense conquête au rang de défi personnel. L'autre défi relevable, l'accession au centre de la galaxie, vous permet de rencontrer "Steve", figure que l'on imagine divine, du moins absolue. Là encore, Steve n'est non seulement pas le but du jeu, mais il est grotesque, inutile et finalement, une manière amusante d'amener une série de références amusantes à "Sim City" et à Douglas Adams, mais également de trouver la Terre, ultime péripétie et ultime gag du jeu installé par les développeurs pour se jouer de nos attentes. Meilleure hommage possible à l'auteur anglais, Spore place comme lui l'origine même de la vie sur terre dans la recherche de son but. Boucle philosophique ultime: le but de la vie est de rechercher le but de la vie.
Si il installe un doute sémantique intéressant, justifiant ma note scandaleusement haute, Spore demeure néanmoins un mauvais jeu. En effet, contrairement à Civilization, mais également aux autres jeux Maxis, Spore déçoit par un traitement superficiel de ses mécanismes de jeu. Dans ses attributs ludiques, Spore n'est qu'une séries de jeux de gestions/stratégies archaïques que la phase finale, plus longue et plus complète (moins simpliste en tout cas) n'arrive pas à sauver. En visant trop haut, Spore se condamne à n'être finalement que l'exemple parfait de ce que Civilization avait peur d'être.