Un jeu à l'amer !!

Bon... Après avoir fini Suikoden IV une nouvelle fois, je ne peux m'empêcher de le comparer à un dessin de très jeune enfant. La majorité des gens prennent ce dessin, le tourne dans tous les sens sans savoir comment le regarder, ils y voient un amas de gribouillis sans aucun intérêt, et ils le reposent rapidement avec un sourire gêné en l'oubliant aussitôt... Mais tout change si l'on est le parent de cet enfant... Certes, ça reste un amas de gribouillis, on en reste conscient, mais il nous touche évidemment, on croit y deviner les intentions, le choix des couleurs, on y distingue des formes que les autres ne voient pas, et même si le profane ne le comprendra pas, on a de l'amour pour cette non-oeuvre, qu'on prendra plaisir à revoir avec une nostalgie débordante bien des années plus tard...

Parce que Suikoden IV, objectivement, est raté sur bien des points. Et commençons par l'aspect graphique, immonde, avec des environnements vides, tristes, redondants... Certes, le background y est certainement pour beaucoup diront certains. Je ne suis pas d'accord. On navigue dans cette archipel d'une île à une autre, et il y avait autant de possibilités de donner une âme à chacune des îles visitées. Et globalement, ce jeu manque d'âme justement, un comble quand on connaît le travail effectué exactement en ce sens sur les deux premiers opus de la série, dont le second a atteint le firmament du jeu vidéo précisément pour cette raison (mais pas seulement).

Bref. Parlons du second point qui fâche : les déplacements. Parce que si naviguer d'une île à l'autre sur son propre navire, servant aussi de QG, pouvait sur le papier sembler une bonne idée (et j'admets que ce concept dans l'absolu me plaît), avec une carte qui se découvre à mesure de ses explorations, concrètement cette phase de jeu est juste infâme. Le bateau que l'on dirige est lourd, son contrôle est poussif au possible, et les déplacements sont longs, tellement longs !!! Longueur d'autant plus exacerbée d'ailleurs par des environnements maritimes vides, proches du zéro absolu, entrecoupés par d'innombrables combats aléatoires qui, loin de rompre la monotonie de la navigation, la rend encore plus longue, et donc infiniment plus agaçante !

Enfin, parlons des personnages, et plus particulièrement du "héros" que l'on contrôle. J'ai énormément de mal avec celui-ci : un charisme de poulpe mort, une coupe de cheveux à faire pâlir d'envie Mireille Mathieu, un outfit que je ne souhaiterais même pas à mon pire ennemi, et surtout, surtout, une démarche que j'aime à surnommer "la marche du balai dans le fondement"... C'est ridicule...

Si certains autres persos s'en sortent heureusement mieux (Jeane, perso fan-service, je t'aime quand même !), dans l'ensemble on n'en retiendra que peu d'entre eux, encore une fois aux antipodes des volets précédents de la série (Viktor, Flik, Gremio, etc...).

Alors, qu'est-ce qui sauve cet amas de gribouillis ? Et bien c'est là toute la subjectivité de votre serviteur. J'aime ce jeu avant tout parce que c'est un Suikoden. Une occasion de plus de retrouver les mécaniques de ce monde que j'aime tant. Un background du monde de la série qui se trouve un peu plus développé, comme à chaque épisode (hormis les spin-off). Une nouvelle chasse aux étoiles avec le QG qui va bien. Un scénario plutôt intéressant.

J'aime ce jeu raté, comme un parent regarde avec nostalgie l'amas de gribouillis de son enfant, d'un oeil bienveillant mais pas aveugle, avec nostalgie, ne le voyant pas comme une pièce unique sortie de son contexte mais bien comme faisant partie intégrante d'un tout, l'une des parties les plus faibles, certes, mais qui contribue à sa manière à donner corps à l'ensemble.

Alors, oui, à mes yeux, cet opus est probablement l'un des pires, si ce n'est le pire, de la série, mais il fait partie de la série, et ça me suffit à l'apprécier un minimum...