(Critique avec spoiler)


Le générique se lance et la sensation est la même, celle du vide, d’avoir une seconde fois vécu quelque chose d’unique. The Last of Us se plaçait comme un récit d’espoir, l’espoir de retrouver une fille pour Joël, de sauver l’humanité pour Ellie, The Last of Us Part II est un récit de vengeance, où chaque instant nous rappel l’atrocité du monde dans lequel vivent les personnages.


On parle souvent de l’écriture en oubliant qu’il s’agit aussi d’un jeu d’horreur, si les moments avec les humains sont violents, ceux avec les infectés sont terrifiants et mettent parfois dans une angoisse totale. Et malgré quelques passages à rallonge, la satisfaction d’un dénouement spectaculaire en devient absolument jouissif tant les combats dynamiques et complexes sont intenses et d’une facilité déconcertante à prendre en main, c’est un véritable plaisir de réussir des enchaînements d’attaques et d’esquives ou de passer les zones en restant furtif. L’interface est hyper intuitive et la progression récompense le joueur. Naughty Dog a aussi su retirer les éléments répétitifs du premier opus sans pour autant abuser des nouvelles mécaniques.


On avance dans cette quête où chaque détail, chaque note témoigne du passage de la vie présente et passée, en capturant les moments intimes des héros - ou anti-héros c’est au choix - les moments de joie ou de tristesse de leur vie quotidienne. Le jeu passe son temps à nous rappeler que ce ne sont pas seulement des infectés ou des ennemies, ce sont avant tout des humains, avec une famille et des amis qui eux aussi ne cherchent qu’à survivre. On entendra ces derniers pleurer le nom de nos victimes, des chiens que l’on assassine uniquement pour cette quête primaire de vengeance, pour apaiser la mort de Joël.


Cette violence qui ne s’atténuera jamais, comme à la première rencontre avec les Scars d’une brutalité rare (il est même dommage d’avoir dévoilé cette scène avant la sortie du jeu), ou encore l’histoire suggérée des nombreux cadavres que l’on croisera sur notre chemin.


Mais le tour de force de Naughty Dog réside dans la prise de position qu’ils nous font subir, jouer celle qui tuera celui que l’on jouait par le passé pousse le titre au summum de l’horreur. Jusqu’aux deux affrontements finaux, d’abord celui d’Abby où l’on essaye de tuer Ellie, puis celui où l’on essaye de tuer Abby, une véritable souffrance pour le joueur qui a vu les traumatismes des deux personnages.
Si on savait déjà qu’il n’y a ni méchant ni gentil, The Last of Us Part II vient nous le rappeler encore plus, les premiers instants avec Abby après le cliffhanger de face à face avec Ellie sont déroutants, la sensation de détester ce personnage est trop grande pour avoir envie de la suivre, mais petit à petit on comprend son histoire et on s’attache à elle. Et c'est là que les sentiments prennent le dessus et rendent la narration réussie, en dévoilant seulement ce qu'il faut pour donner envie d'en savoir plus, mais jamais trop pour ne pas perdre l'intérêt que l'on y porte.


The Last of Us Part II est un jeu viscéral tant dans ses visuels que dans l'écriture, quelle intelligence et prise de risque c’était d’essayer de nous faire aimer autant que détester les deux protagonistes – et donc antagonistes - ennemies, de porter le joueur comme responsable du malheur de chacune. C’est une des rares œuvre à mettre à ce point l’accent sur la dualité et la subjectivité des motivations personnelles, proposant une remise en perspective de la condition de nos personnages, dans le bien mais surtout dans le mal.


Le jeu est capable des pires atrocités physiques comme psychologiques, les morts de Owen, Mel enceinte, Yara, Jesse ou bien évidemment Joël sont marquantes voir traumatisantes, pourtant, la mise en contraste avec une certaine poésie – macabre peut-être – rend le tout unique, comme seul The Last of Us en est capable, c’est voir Abby marcher vers la lumière, Ellie gratter un air de guitare, regarder Yara apprendre à jouer avec un chien, admirer la beauté d’un couché de soleil face aux champs ou juste trouver une peluche à offrir pour donner à Lev un semblant d’enfance. Ces instants de puretés qui font toute la beauté du jeu.


Si l’on peut reprocher une fin qui se rallonge sans raison ou un effet de surprise passé après la découverte du premier opus, The Last of Us Part II excelle à nouveau et, comme cela avait été le cas sur PS3, offre à la PS4 un dernier grand jeu, un dernier instant de perfection à la console pour lui dire adieu en même temps qu’à ses personnages.


Magistral, émouvant, puissant.

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le 26 juin 2020

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Nicolas_S

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