Épreuve difficile que de mettre à nouveau les mains sur Majora’s Mask, plus de 14 ans après l’avoir terminé. Il s’agît ni plus ni moins de mon jeu vidéo préféré et, en tant que tel, je n’avais jamais osé y retoucher de peur de ternir mes souvenirs. J’étais donc un peu anxieux en démarrant ma 3DS car si jamais la magie n’avait pas été au rendez-vous, comprenez bien qu’il ne me restait plus qu’à me rouler en boule dans un coin et oublier les jeux vidéo à tout jamais.
Majora’s Mask est un jeu bizarre, avec un traitement presque obsessionnel de la mort. Au point qu’une des théories les plus marquantes échafaudées autour du jeu parle d’un Link au purgatoire à la recherche de l’acceptation de sa propre mort. Théorie un poil extrême qui rejoint celle tissée sur l’ « avortement » de Giygas – Earthbound – dans la catégorie des délires de fans sympathiques. Reste que le symbolisme est bel et bien omniprésent et que Link porte, sans ambiguïté, des masques de gens morts.
Parti à la recherche d’un ami, dont ne saura jamais avec certitude de qui il s’agît, Link se retrouve dans le monde tordu de Termina qu’il doit sauver en trois jours de la chute de la lune et des manigances de Skull Kid. Une situation tendue qui ne va pas l’empêcher de fourrer son nez dans les affaires des petites gens de la région. Et il y a de quoi faire, d’autant que pour une fois les quêtes annexes se méritent et vont demander au joueur de s’impliquer dans la vie des autochtones afin d’apprendre qui fait quoi à quel moment pour quelle raison. L’apogée du système c’est bien sûr la quête d’Anju et Kafei, longue et gratifiante vu qu’on y gagne quatre masques en plus d’assister à un mariage.
Et le pire c’est que le concept a seulement été effleuré. Une ville principale, une maison par ci par là et point barre. Imaginez un peu ce que l’idée pourrait donner dans un jeu abritant des dizaines de villages et des milliers de PNJs avec chacun leur emploi du temps et leurs soucis ?
Comme souvent chez Nintendo, la complexité du concept est contrebalancée par la simplicité des actions. Une science du dosage qui atteint ici des sommets et préserve l’émerveillement constant, marque de fabrique de la série. Même si, et c’est une première, rien n’empêche le joueur de sentir perdu et livré à lui-même dans ce monde hostile qui n’a de cesse de se remettre à zéro.
Faire de l’épique avec des choses simples, c’est un peu ça la recette Zelda, mais dans Majora’s Mask il faut accepter d’être un héros anonyme, de voir ses efforts réduits à néant à chaque retour dans le temps et de retrouver les différents lieux visités dans leur état de désolation initiale. Une mécanique légèrement décourageante car les donjons prennent beaucoup de temps à compléter et on n’a jamais l’occasion de profiter du paysage libéré de son emprise maléfique, à moins de revenir battre le boss local à l’aube du premier jour.
Cette particularité participe au sentiment de désespoir de l’aventure, car si résoudre les problèmes des habitants apporte une grande satisfaction, les voir subir à nouveau leurs malheurs à la prochaine boucle temporelle m’a toujours déprimé.
Je pourrais encore m’étendre sur tout ce qui fait le charme de cet épisode ; de la fin sur la lune en passant par l’esthétique louche de l’univers, le boss de fin qui fait du moonwalk et le masque de dieu vengeur avec lequel on va le massacrer ; mais disons simplement que pour son ambiance si spéciale, la complexité de ses quêtes, l’écriture subtile des personnages, ses donjons rares mais géniaux et son originalité sans limite, Majora’s Mask reste pour moi le meilleur des Zelda et donc, par extension, le meilleur jeu de tous les temps.
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