Comment est-on passé de Clementine à Clem'
Introduction : après y avoir réfléchi, je ne vois pas comment écrire une critique cohérente et un minimum interessante et argumentée sans faire quelques spoils sur les Saisons 1 et 2 de The Waking Dead. En conséquence, si vous n'avez joué à aucune des deux, je vous déconseille de lire ce texte ; si vous n'avez joué qu'à la première, je vous invite à lire la petite synthèse sans spoil de la Saison 2 à la fin de l'article.
-- A partir d'ici, attention aux SPOILS !! --
Comme dans toutes les sagas, il n'est pas aisé de succéder à un aîné prodige. Il en va de même pour cette deuxième saison de The Walkind Dead qui a le lourd objectif de succéder et de survivre à une première saison qui s'était finie sur la mort de la figure paternelle de la petite Clémentine.
Pour évacuer tout de suite les questions un peu technique, si vous avez joué à la Saison 1 de TWD, vous ne serez pas perdu dans la mesure où le gameplay est exactement le même, à savoir une version remaniée - à la TellTale - du Point'n'Click de notre enfance, sachant que cette Saison 2 se focalise encore plus que la première sur les phases narratives au détriment des quelques phases d'énigmes / explorations qui restaient plus présentes dans la Saison 1.
Alors TWD, ça reste avant tout des personnages, une histoire et une mise en scène travaillés, disposant d'une certaine densité. Et sur ce point, la Saison 2 se place en digne successeur de la première saison, même si certains éléments m'ont laissé un peu perplexe.
La grande force de la Saison 1 de TWD était de constituer par ses 5 épisodes un arc incroyable de cohérence, de mise en scène et de mise en perspective de la relation naissante puis mourante entre Clementine la petite orpheline qui va devoir apprendre à vivre dans un monde en proie au chaos, et Lee la figure paternelle en recherche de rédemption. La folie du monde, sa violence, voire la noirceur ou la monstruosité de l'espèce humaine était habilement mise en parallèle avec cette trame principale, ce qui en faisait un joyau du genre.
Cette deuxième saison est à mon sens moins équilibrée dans la mesure où son "objet" est moins identifiable. Certes, il est toujours question d'un monde en proie au chaos et à la perdition, de la tristesse qui l'entoure et auxquels nos héros vont devoir faire face, mais la sauce met bien plus de temps à prendre. Ne nous méprenons pas, chaque épisode est plutôt bon et dispose de ses bons moments, voire de passage d'anthologie (l'introduction et la culpabilité de Clementine, la vengeance de Kenny et sa transformation en "Dark Vador", ...) et certains personnages sont vraiment réussis (Kenny, Carver, Jane), mais le puzzle ne fait sens qu'un peu trop tardivement (globalement avec le 5ème épisode).
De même, je trouve certaines situations sous-exploitées, comme tout le passage autour de Carver dont Kenny risque de devenir ultérieurement un miroir. Je pense également à la mort de Sarah qui arrive ... un peu comme ça. De même, la rancune dont va faire preuve envers vous Bonnie après la mort de Luke, sachant qu'on a juste pigé 5 minutes avant - au détour d'une phrase sans enjeux - qu'elle avait le béguin pour lui ... C'est assez dommage, car la cohérence et la consistance narrative constitue à mon sens le facteur positif principal de ce jeu.
Pour finir,avec les points qui m'ont dérangé, il y a l'épisode 5 à fins multiples. Non pas que je sois fondamentalement contre ce type de contenus, mais dans un titre comme The Walking Dead, ça ne m'enchante pas. Qu'il y ait dans un jeu dit classique plusieurs fins en fonction de notre habileté dans le jeu, pourquoi pas. Ca donne un peu de challenge. Mais dans The Walking Dead, c'est presque un contre-sens. D'autant plus que les fins sont assez radicalement différentes et qu'elles envoient un message de fin bien différent. Perso, j'ai eu droit à la fin "Clementine toute seule" en fonction des choix que j'ai pu faire. Puis j'ai regardé par curiosité les autres fins sur YouTube. J'ai été incroyablement plus touché par la fin "avec Kenny" qui offrait bien plus de perspectives. Rien que le fait de savoir que tout cela existe, ça contrevient à la cohérence narrative dont je parlais tout à l'heure. Sans compter que je me demande bien comment les scénaristes vont faire pour reprendre toutes ces fins possibles pour relancer une Saison 3 probables.
Comme à mon habitude, j'ai passé beaucoup de temps sur les points que j'estime négatifs dans l'appréhension de ce titre, mais cela n'enlève pas la qualité indéniable de cette 2ème saison. Elle reste une saison triste, froide, dont ressortent de façon encore plus prononcés les rares moments de chaleurs et d'humanité. Elle montre un monde violent, qui appelle, même chez les plus innocents, la violence pour survivre. De même, le personnage de Kenny et sa transformation (je reprends mon image de Dark Vador mentionnée plus haut) sont une représentation intéressante de l'évolution forcée qui est demandée aux survivants de ce monde.
-- Synthèse sans spoils de la Saison 2 --
Après une Saison 1 d'une rare qualité dramatique, la Saison 2 ne pouvait sans doute que nous sembler plus terne. Elle est selon moi, en effet, moins bonne que son aîné, en raison de choix narratifs qui ne révèlent leur densité et leur épaisseur que trop tard dans la saison. Mais ne boudons pas notre plaisir. TellTale parvient encore à nous faire vivre 5 épisodes de qualité, nous montrant le passage de la petite Clementine à l'adolescente survivante d'un monde à l'agonie et en proie à la folie. Une bonne 2ème saison, en attendant la suite ...