The World Ends with You
7.7
The World Ends with You

Jeu de Jupiter Corporation et Square Enix (2007Nintendo DS)

Mon titre résume mon sentiment.


Intéressé par ce jeu dont je n’ai découvert l’existence que lors de sa réédition sur téléphone mobile (sans trouver le temps de m’y mettre ou la motivation de claquer 20€ dedans, et pourtant il me faisait méchamment de l’œil), j’attendais sortie sur Switch avec impatience, mais les mauvaises notes qu’elle a reçues (dues à sa jouabilité désastreuse en docké) m’ont fait renoncer à prendre cette version modernisée. Fort heureusement j’ai une 3DS, j’ai donc décidé de me procurer une cartouche de la version originale de ce titre qui fêtait ses 11 ans cette année.


J’attendais une bonne surprise, vu tous les commentaires élogieux qu’on peut lire au sujet de ce jeu. Je n’étais pas over-hypé, je sais que mon point de vue va parfois à l’encontre du consensus (surtout s’il est aussi polarisé), mais tout de même : s’il y a (quasi-)consensus, il doit bien avoir une raison... et en bon gros amateur de RPG (surtout japonais), je devais bien m’y essayer un jour ou l’autre.


Alors on y va : le protagoniste est un con dès la scène d’ouverture, à nous jeter à la tronche qu’il n’aime pas les autres et qu’il se suffit à lui-même, on se tape un générique aussi cool qu’inutile, et Super-Connard se réveille amnésique au milieu de la rue, fuit des monstres zarbis, fait copain malgré lui avec sidekick numéro 1 AKA damsel in distress... On se fait la liste des clichés du rpg nippon là où c’est juste moi ? On m’avait annoncé un titre original tant dans son gameplay que dans son histoire. Pour l’histoire c’est mal parti. Voyons donc le jeu en lui-même.


On apprend à se battre. Ça va à peu près. C’est brouillon, mais ça a le mérite d’être rigolo.


Ensuite on va de tableau en tableau, en enchaînant des missions vaines comme « aller là-bas », « allumer la lumière », « populariser ce truc », « aller là-bas (le meme là-bas qu’avant) », « gagner tel machin », « aller là-bas (au point que le jeu se trolle lui-même à ce stade) ». Le tout est agrémenté de sous-missions pour passer d’un écran à l’autre, encore plus vaines que les précédentes, le pompon revenant aux questionnaires vous demandant d’aller retenir 3 trucs par cœur à un endroit pour ensuite les réciter à un random qui vous ouvrira la voie.


Et on continue de se battre, et ça devient de plus en plus confus et bordélique: nan parce que non contents d’exploiter toutes les options de l’écran tactile (et même un peu de micro pour ceux qui aiment passer pour des fous), les concepteurs nous demandent de prêter également attention à ce qui se passe en haut et de tripatouiller la croix directionnelle (ou les touches ABYX) pour enchaîner des symboles et débloquer des super attaques. Autant dire que gérer les deux écrans en même temps demanderait une vision de caméléon (ou un fort strabisme vertical) couplée à un deuxième cerveau. Il y a bien une option d’automatisation du sidekick, mais dans ce cas il agit à deux à l’heure et ne cherche pas spécialement à construire ses enchaînements de symboles. Du coup, pourri pour pourri, autant bourriner la croix au pifomètre, ca ne construit pas mieux ni moins bien les enchaînements que l’IA, mais ça a le mérite de faire cogner le personnage et c’est le minimum qu’on est en droit d’attendre.


Le jeu a failli me tomber des mains au 2e jour du chapitre 2 (j’imagine que si vous lisez cette critique, vous êtes déjà au courant du mode de narration), quand j’ai réalisé que la 2e semaine serait un miroir dans les missions de la première (ce qui fut contredit un peu plus tard dans le jeu, mais pas par une alternative satisfaisante, car de ne pas afficher l’objectif débile dans une lettre n’est pas une négation de l’existence de l’objectif débile sus-mentionné). J’ai déjà mentionné ce caractère des missions qui rythment la narration mais j’insiste : c’est vain !


Quand un jeu fait ne serait-ce que menacer de me tomber des mains, c’est pas bon signe du tout ! Je me suis forcé à poursuivre...


Ah tiens ! J’ai dit « narration » ? J’ai réussi à ne quasiment rien en dire jusqu’ici. L’histoire n’a rien de bien passionnant : des gens jouent malgré eux à un jeu de la mort, entourés de monstres bizarres, de G.O. de la mort plus ou moins avenants avec des missions de la mort pour éviter de mourir parce que la mort c’est pas cool. L’histoire se résume facilement en 5 lignes, la preuve:


Neku est décédé et participe à un jeu dont les vainqueurs peuvent ressusciter. Malgré sa victoire il doit participer de nouveau au jeu, puis une troisième fois, au terme de laquelle il découvre qu’il était un pion de l’organisateur dans un jeu de plus grande ampleur qui ne le concernait pas. Il ressuscite. Fin


Ça ne casse pas trois pattes à un canard. Par contre on va t’en faire des tartines ! C’est verbeux ! Finir le jeu m’a pris 17 heures (j’ai pris mon temps sur la première moitié), la moitié à lire des dialogues sans réel intérêt sur les thèmes de l’acceptation de soi, l’acceptation des autres, l’ouverture d’esprit, l’importance de l’amitié, le deuil et la responsabilité. Encore une répétition : cliché !


Et le pire là-dedans : à la fin de l’histoire, on n’a pas répondu à toutes les questions soulevées ! Ah non ma bonne madame, ah non mon bon monsieur. Il faut se retaper les journées du scénario et y remplir des objectifs plus ou moins stupides (allant de « va poutrer tel boss » à « achète tel objet » en passant par « débloque tel truc dans tel autre chapitre ») pour avoir le droit de lire des rapports supposés répondre aux questions laissées en suspens. Mieux que de nous vendre les patches scénaristiques en DLC façon FF15, mais c’est quand même au ras des pâquerettes niveau prolongement de la durée de vie du soft, et niveau narratif, c’est du beau foutage de tronche. Heureusement on peut accélérer les dialogues dans ces replays (mais pas les tutos ni les videos, histoire de ne nous simplifier la vie qu’à moitié).


Note sur la fin de l’histoire:


Le fait qu’on participait à un jeu dans le jeu, et qu’au final la résurrection de Neku et Compagnie ne repose que sur le fait que Neku ne tire pas sur Joshua à la fin, fait tomber à plat toute notion d’enjeu des sous-intrigues. On s’en fout finalement que Rhyme se soit faite bouffer par un requin fantôme, on s’en fout des états d’âme de Shiki qui se découvre une personnalité, on s’en fout des regrets de Beats, on s’en fout des rivalités et énervements des Game Masters et autres Reapers, tout ca n’a servi à rien (tout ça est pardonné et annulé à la fin), l’évolution psychologique de Neku elle-même ne vient pas expliquer son refus de presser la détente, car on ne sait pas ce qu’il aurait fait sans son pseudo parcours initiatique, cet acte (ou cette absence d’acte en l’occurrence) n’est pas le résultat d’une progression du personnage, ou alors c’est juste hyper mal raconté.


Enfin, pas que des défauts non plus.


Les décors sont... intéressants. Pas jolis (enfin si parfois). Pas moches (enfin si, souvent). Juste intéressants (avec des jeux de déformation des perspectives et un angle de vue généralement différent sur chaque écran). Mention honorable pour l’effort.


Le design des personnages est... Nomuresque. Ni cool ni ringard : rigolo, comme dans tout ce que Nomura a su créer par ailleurs. Les monstres sont cools par contre, pour la plupart, et de loin le truc le plus sympa à regarder dans ce gloubiboulga visuel.


La musique... bah, je suis pas fan de musique urbaine. Que dis-je ? J’aime pas. J’irais pas acheter un disque de scratch, de pop-soupe pour midinette, de hip-hop ou encore moins de rap. Dans le contexte de ce jeu, ça passe, ça colle au ton, et ça contribue à l’ambiance sympatoche du jeu. Le fait que la musique change chaque fois qu’on ouvre et ferme le menu contribue à éviter la lassitude trop rapide, mais comme je retiens très facilement les airs de musique, j’en ai vite eu marre quand même. Au bout de quelques heures j’ai quand même eu envie d’exploser ma console pour faire taire la crieuse pop qu’on entend en boucle dans les cut-scenes. Je vais devoir me faire une bonne cure de Beethoven pour me laver les oreilles !


Les bruitages vont de l’acceptable au désagréable. Pas de prouesse, globalement « ça va ».


Les menus sont pas dégueus et permettent même de réaliser (plutôt) simplement ce qu’on est venu y faire, on va dire que c’est un bon point... Youpi !


Bref, je ne me suis pas ennuyé mais presque, je ne suis pas certain d’avoir la motivation de trouver les rapports pour boucher les trous de l’histoire. Nous ne sommes pas face au meilleur jeu DS « de tous les temps » (ne serait-ce que le temps de la vie de cette console, soit quelques années), ni face à un RPG révolutionnaire. Nous sommes face à une expérience de jouabilité intéressante mais limitée enrobée d’une narration poussive plombant le cahier des charges du bon petit RPG qui ne se foule pas dans le choix des thèmes abordés.


Je peux comprendre que ça en amuse certains, je peux moins comprendre l’engouement généralisé autour de ce produit (même si je me doute que s’agissant d’un jeu de niche, l’avis « général » est d’office biaisé par le trop plein de joueurs prédisposés-préconditionnés à l’apprécier). En tout cas, c’est pas ma came.

homme_improbable
5

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le 13 nov. 2018

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