Au commencement étaient les pulps, bande dessinées bons marché narrant des récits d’aventures exotiques de série Z, et qui faisaient fureur dans l’amérique des années 30. Puis vint Indiana Jones, enfant de Georges Lucas et Steven Spielberg, lequel puisa autant dans les pulps que dans les aventures de Tintin (par Hergé) pour imaginer ce personnage. Archéologue de renom, Indy était également un aventurier prêt à prendre tous les risques pour déterrer les vestiges du passé. Puis naquit Lara Croft, archéologue également, mais millionnaire, et trompant son ennui en affrontant les dangers des ruines du passé. Symbolisée par son short, ses deux flingues jumeaux et son opulente poitrine, elle marqua plusieurs générations de joueurs. Puis sa légende s’effrita. Incapable de réellement se renouveller, la belle perdit peu à peu de sa superbe tandis qu’un nouvel outsider venait lui prendre sa place : le chasseur de trésor Nathan Drake, héros de la série des Uncharted.
C’est alors qu’une décision fut prise : faire table rase du passé et recréer Lara Croft, en repartant de zéro. C’est bien de cela qu’il s’agit ici. Tomb Raider, tel qu’il est sobrement intitulé, constitue le reboot d’une des plus célèbres séries de l’histoire du jeu vidéo, remettant à plat les bases de la série, et réinventant complètement son héroïne. Désormais loin d’être la fille improbable d’Indiana Jones et Jessica Rabbit, la nouvelle Lara est un personnage crédible, dans sa personnalité comme dans ses formes, bien moins généreuses qu’autrefois, mais bien plus… humaines !
Jeune fille de 21 ans étudiant l’archéologie à l’université sous l’égide du célèbre professeur Whitman, Lara est la fille du célèbre chasseur de trésor millionnaire Richard Croft. Son père ayant disparu lors d’une expédition, Lara marchera dans ses traces, mais par ses propres moyens, refusant d’user de la fortune de sa famille. Elle ira à l’université et réussira brillamment ses études. C’est donc en troisième année qu’elle montera une expédition avec l’aide du Pr Whitman et de Conrad Roth, le meilleur ami de feu son père, et capitaine de navire. Embarquant avec quelques amis, Lara est décidée à percer le secret de la reine Himiko, une monarque japonaise morte il y a deux millénaires sur une île légendaire appellée « Yamatai », que personne n’a jamais pu trouver. Suivant son intuition, elle amène le navire de recherche jusque dans le triangle du Dragon, une zone réputée pour ses violentes tempêtes. Pris dans la tourmente, le bâtiment s’échoue violemment sur une île non répertoriée. Lara ne pourra rejoindre ses amis naufragés sur la plage, car elle sera assommée par un inconnu. Elle se réveillera pendue par les pieds, dans une grotte reconvertie en lieu de culte improvisé, en l’honneur d’une obscure déité préhistorique, et entourée de cadavres… Elle doit s’échapper, et vite !
Ainsi débute le jeu, quasiment in media res. On y découvre une Lara encore jeune, naïve et vulnérable. Et terriblement attachante. Elle apprendra dans la douleur à survivre, à se battre… et à tuer. L’évolution du personnage est palpable, et au cœur du jeu. On la verra successivement apeurée, perdue, indécise, résignée, résolue puis teigneuse et enfin, victorieuse. Le personnage est une incontestable réussite, et à chaque nouvelle épreuve, chaque nouvelle blessure, chaque nouvel outrage, on se prend à hurler devant sa TV « Vas-y ma fille ! Te laisse pas faire ! Tu peux y arriver ! Montre leur à tous ! ». Si l’ancienne Lara était un fantasme pour nerds frustré, la nouvelle est une jeune femme crédible, attachante, que l’on aimerait juste pouvoir serrer dans ses bras pour la soutenir et l’encourager.
Le jeu en lui-même n’est pas en reste. Et si Uncharted est parti des bases de Tomb Raider, cet opus-là ne se gêne pas pour puiser dans les bonnes idées des aventures de Nathan Drake. Pourtant, le jeu parvient à prendre ses marques et à imprimer une vraie personnalité au titre. A ce titre, l’utilisation intelligente du feu, et parfaitement géniale de l’arc, arrive en tête de liste des idées brillantes. Le reste du gameplay repart sur les bases plus classiques avec l’enchaînement exploration, énigme, gunfight désormais indissociables du genre.
Le jeu n’est toutefois pas exempt de défaut. Si la narration est impeccable et l’histoire très correcte, le titre souffre des défauts classiques du genre : des passages authentiquement grand-guignolesques, à base d’enchaînements de situations improbables. Exemple : je saute pour attendre la corniche en face, elle craque, je m’accroche de justesse à une paroi, elle cède, mais par chance, j’atterrie dans un filet tendu en contrebas, qui craque, mais par chance, je suis amorti par des branches d’un arbre et j’atterri sur le sol… ou pas ! car c’était un piège, je tombe dans un trou, j’évite les piques de justesse, et arrive dans un tunnel en toboggan, dans lequel je glisse en évitant des dizaines d’obstacle, avant de déboucher sur une rivière… Laquelle m’emmène précisément à ma destination. Tout est bien qui finit bien !
Amusant, certes, mais parfaitement bidon.
L’autre problème tient au combat. Si le début du jeu montre une Lara vulnérable et que le premier homme qu’elle « tue » donne lieu à une scène assez intense (à base de QTE), dés son premier mort passé, la jeune femme se transforme en machine à tuer, capable de dézinguer du mercenaire russe par paquets de douze. Le pire étant le combat contre les « garde-tempêtes », des sortes de samourais zombie qui avaient massacré une unité de soldats nazis pendant la guerre de 40. Et bien ces monstres qui ont bouffé tout cru les soldats de la première armée du monde de son époque, Lara s’en atomise une cinquantaine à elle seule à l’arc et au fusil à pompe. Et sans trembler des genoux. Pour une nana qui, à peine trois heures plus tôt, pleurait à chaude larmes devant le cadavre d’une biche qu’elle avait dû chasser pour manger, c’est un peu raide comme changement.
Bon, mis à part des petits défauts, dans l’absolus très classiques dans le genre, force est d’admettre que ce reboot de Tomb Raider est une réussite. Réalisation impeccable, gameplay riche et millimétré (l’arc bon sang ! l’arc ! pourquoi personne ne m’avait dit que ça pouvait être aussi fun à utiliser !), héroïne en béton, tous les éléments sont là pour faire de ce titre un pur moment de bonheur.
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