/!\ Attention spoiler /!\
Jouant de moins en moins, j'ai été et suis toujours écœuré par la tonne de jeux sans profondeur, au contenu de plus en plus insignifiant et toujours aussi chers qui sortent chaque année. Mais je dois bien avouer qu'ici, Obsisidan et Paradox ont frappé un grand coup avec Tyranny - qui montre à quel point des studios peuvent se défoncer pour faire un chef-d’œuvre.
Une incroyable richesse
Commençons déjà par les points positifs; et c'est dire s'il y en a! Tout d'abord, il est indéniable que l'univers du jeu - et je ne parle pas ici du scénario ou des quêtes secondaires - est extrêmement riche. Il faut tout de même quelques temps avant de pouvoir le comprendre car il y a bon nombre de faits historiques, de factions et peuples différents, de personnages passés ou présents qui influent sur le déroulement des faits ou le contexte dans lequel le royaume est plongé.
Et c'est ce qui donne un charme fou à l'histoire contée dans cet opus. Un pays médiéval-fantastique menacé de toutes parts par différents dangers, une équipe pour le sauver - un classique dans les jeux vidéos, certes, mais qui marche ici à la perfection -, la magie et des créatures imaginaire, etc.
Et le plus important pour moi, hors contexte, c'est de sentir dès le départ le travail colossal qui a été effectué dont on devine qu'il sera très certainement étoffé tout au long du parcours du héros et de ses partenaires. C'est ce qui me donne envie d'y jouer et qui me scotche derrière mon écran.
L'aspect visuel: «ouah!»
Parce qu'en plus de cette première impression, les décors sont magnifiques, très détaillés, réalistes et variés - aucune carte n'est un énième clone d'une autre. On retrouve une certaine interaction avec les décors - c'était déjà le cas dans les vieux rpg de ce genre, mais c'est d'autant plus important de pouvoir ajouter une touche supplémentaire de réalisme et d'impliquer un peu plus le joueur dans l'aventure sans qu'il soit un consommateur passif -, que ce soit en pillant des coffres et cachettes, en abaissant un pont ou même en montant à une corde.
S’ajoutent bien sûr les évènements du scénario qui ont une influence sur les cartes en fonction de nos choix, ce qui accroit, en fin de compte, mon intérêt pour ces décors très raffinés - j'ai une légère préférence pour ceux de Baldur's gate 2, mais ça ne rentre pas en ligne de compte dans ma critique.
Une histoire très complète
Du côté du scénario, aucun souci à se faire! La trame est très dense et les choix que l'on peut faire - en fonction de notre personnage principal, de son orientation (bonne ou mauvaise), des factions avec lesquelles on pactise ou non, de la situation - sont nombreux.
Cela augmente d'autant plus la durée de vie de Tyranny car on crée, selon le profil, une histoire alternative menant à des conséquences très variables. Je ne suis pas certain, n'ayant pas le courage de toutes les faire quitte à me lasser d'un bon jeu, qu'il y ait tant de possibilités que ça mais pour un titre pareil je pense que c'est déjà plus que suffisant.
Les scénaristes ont su bien rythmer l'histoire parce qu'on alterne efficacement entre combats, dialogues et scènes scriptées (pas si nombreuses que ça). Et ça c'est un réel soulagement de ne pas s'en prendre tout le temps plein la tronche et trucider à tout bout de champ pour rien.
Bon...et si on crachait (un peu) dans la soupe?
Tyranny possède certains légers défauts. Pas de quoi fouetter un chat, mais je préfère les mentionner pour faire un commentaire aussi objectif que possible.
Le «Paradox» de la richesse
Loin de me plaindre de l'abondance de faits, personnes en tout genre, lieux, peuples ou factions, il faut bien dire qu'il n'est pas si aisé de comprendre ce que notre héros fout là. Rien qu'avec la tonne de factions en place, je me suis demandé maintes fois quoi faire et que répondre à des groupes aux idéaux antagonistes. D'autant que j'ai dû un nombre incalculable de fois regarder de qui ces personnes parlaient - ouf, c'est marqué à chaque fois que ces noms s'affichent! - et pourquoi elles étaient réticentes. Bref, pas aisé de s'y retrouver dans cette pagaille!
Je regrette également que les dialogues n'aient pas une place plus importante et notamment en ce qui concerne les choix «pacifiques», car il y a toujours un clan qui ne peut pas en supporter un autre. Ce qui entraîne fatalement la colère de l'un d'entre eux (ou même d'un membre du groupe) à votre égard. A moins d'être dans un rôle "chaotique" (tout bousiller sur son passage), il est difficile de préserver un équilibre pour ne pas se mettre tout le monde à dos...
Interface et combats
Dans plusieurs rpg dits «old school» qui ont repris les bases des vieilles interface des jeux les plus populaires du type BG2, les erreurs de leurs «modèles» ont été aussi reprises! Un nombre incroyable de boutons, panneaux, onglets...c'est le foutoir!
Et encore, je parle ici de l'interface générale du jeu, parce que celle des combats hélas est loin d'être excellente - avec des icônes minuscules en bas à gauche de l'écran pour les sorts supplémentaires par exemple. Le panneau de création de sorts n'est pas non plus d'une clarté absolue, pouvant parfois combiner certains sorts à d'autres et des fois pas du tout (pourquoi?). Pour être honnête, je me suis presque passé de ce pan dont la logique est quelque peu obscure, préférant me concentrer sur le jeu en lui-même.
Sinon que les combats sont bordéliques! Nous donnant la possibilité de donner une formation au groupe (en carré, ligne, etc.), je suis étonné que tous les personnages de mon équipe aient le même réflexe débile de foncer dans le tas et ce quelles qu'en soient les circonstances! Un groupe de deux ennemis ou une grosse équipe qui nous attend pour en découdre...on démonte tout sans se poser de question! Sur ce point, l'IA de groupe (option intéressante mais dont on peut se passer) est franchement merdique.
D'autant que n'importe quel membre peut, à tout moment, s'avancer en pleine bataille quitte à être au contact de l'ennemi et ce même si c'est un mage ou un archer. Ce n'est pas, en soi, une tactique très maligne...«Mais pourquoi vas-tu au cors-à-corps avec un guerrier alors que je t'ai clairement demandé de balancer des sorts et tes javelots?!!!», je me suis souvent énervé face à ce type d'automatisme absurde.
Notons toutefois que les combats sont quand même bien dosés et que l'on affronte pas tout un camp dans la même bataille (j'ai vu ça dans plus d'un jeu), les ennemis étant combattus par "petits fronts" au lieu d'une grosse mêlée.
Remarques en vrac
Je me demande pourquoi il n'y a pas plus d'énigmes dans ce jeu. Les seules qu'on peut résoudre sont celles - très aidées tout de même car on nous donne un croquis - des combinaisons pour accéder au sommet des flèches! Quel dommage pour un titre qui aurait pu ajouter un aspect ludique supplémentaire (présent mais trop peu en définitive) et intéressant à un jeu qui a déjà bien des qualités!
Concernant les cartes, quasiment tous les coffres sont ouvrables et on peut déjouer l'immense majorité des pièges!De même, les cachettes recelant tel ou tel butin sont trop faciles à trouver, c'est presque du bonus et c'est possible avec n'importe quel personnage de l'équipe. Je trouve ça un peu idiot de ne pas avoir attribué cette particularité à quelques membres-clés selon leurs caractéristiques.
Pour finir, je suis légèrement déçu par la fin, même si le jeu ne perd rien quant aux faits qui sont relatés à la toute fin de l'histoire et qui découlent principalement de nos choix. J'aurais voulu affronter le «grand maître» qu'on décrit comme très puissant, mais non, on dirait que ce sera le cas dans un prochain opus étant donné le contexte dans lequel s'achève Tyranny. Remarque, si le travail effectué est de la même facture, je ne suis guère inquiet pour la suite.
Conclusion:
Tyranny est un excellent jeu d'aventure qui rivalise avec les vieux rpg-phares du même genre. Son histoire est complexe et fournie, les personnages intéressants, la durée de vie du jeu est bonne. Un excellent investissement si vous aimez ce type de jeu.