Après après avoir contribué à la fin de Jak & Daxter sur Playstation 2, Amy Hennig prend le relais de game-director et dirige la troisième grande saga de Naughty Dogs pour Sony : Uncharted. On parle là d’une saga qui deviendra au fil du temps un véritable phénomène commercial et critique, l’une des licences majeures de Sony pendant une dizaine d’années et l’une des plus belles renommées du studio, mais est-ce que le premier épisode en avait déjà tous les ingrédients ? C’est la question à laquelle je vais répondre durant cette critique pendant laquelle je vous invite à écouter le thème de Nate.



RÉALISATION / ESTHÉTISME : 8 / 10



Nous ne sommes encore qu’en 2007, soit à la première année de vie de la Playstation 3, Sony manque clairement d’exclusivités capables de démontrer ce que la machine a dans le ventre, un peu comme pour Crash 1 et Jak & Daxter 1 en leur temps. Uncharted 1 a donc comme première grande force, et elle est loin d’être négligeable sachant que la console a vraiment besoin de pleinement se lancer, d’être une vitrine technologique pour son support. Uncharted 1 offre très vite des plans somptueux aux couleurs éclatantes démontrant toute la beauté que peut apporter la Haute Définition.


C’est à l’image de ce passage contemplatif très tôt dans le jeu où l’on peut admirer la jungle s’étendre à perte de vue en passant derrière une cascade éclairée par ce magnifique soleil, c’est tout bête mais c’est l’un des passages les plus mémorables du jeu à mon sens et autant vous le dire d’emblée : ce qu’il réussit le mieux. Inexploré ou non, le décor tropical dans lequel on sera amené à évoluer est magnifique et il sera mis en contraste en plus avec des cavernes sombres, des bunkers pleins de rouille... pour vraiment être une bouffée d’air frais très appréciable quand il réapparaîtra de nouveau.


Techniquement, le jeu n’est pas seulement joli puisque l’on peut retrouver aussi un soin du détail dans les animations des ennemis selon la localisation des dégâts, des transitions assez fluides entre les cinématiques et le retour en temps réel... Tout n’est pas parfait non plus, les tenues bonus ne sont pas pris en compte dans les cinématiques, il y a assez peu d’interaction possible avec les décors, peu d’abris destructibles, des sources de lumière ne pouvant être détruites ou altérées, des petits soucis de clipping, des skins recyclés pour les ennemis lambdas...


Néanmoins, nous sommes encore au début de génération donc ça se comprend, ce sont par contre beaucoup de problèmes qui ne seront même pas résolus dans la remasterisation sur PS4 pour la plupart, même si elle fera des efforts sur les visages pour les rendre moins lisses par exemple, donc elle n’est pas si fainéante que ça même s’il y avait mieux à faire. Sinon, pour le chara-design il est assez bien fichu pour les personnages principaux, Nathan Drake est peut-être un peu trop le beau gosse générique de service mais Elena est vraiment jolie sans être vulgaire, Sully marque par sa moustache et son cigare distinctifs... c’est plutôt pas mal.


Le sound-design est assez bien pensé au niveau des bruitages dont on ressent vraiment la faiblesse ou la puissance de par le rendu des détonations des armes utilisées, de la même manière une musique peut commencer à s’enclencher au moment où l’on s’approche de la solution d’une énigme pour nous faire comprendre qu’on est sur la bonne voie, détail très sympathique. De façon générale, la transition entre le compositeur historique du studio Josh Mancell et Greg Edmonson, issu du milieu du cinéma, se fait très bien avec un genre musical assez différent mais plutôt réussi, avec différents thèmes qui seront bien repris durant la franchise...



SCENARIO / NARRATION : 6 / 10



Naughty Dogs semble vouloir calquer leurs univers sur l’évolution en âge de leur public, plutôt cartoon déjanté pour Crash, un peu plus sérieux pour Jak & Daxter, et maintenant plutôt adulte pour Uncharted avec des personnages humains à l’époque contemporaine et des références historiques réelles. Pour rester dans une dimension assez grand public, ça sera un scénario à la manière d’Indiana Jones, très clairement avec un chasseur de trésor très sarcastique et à l’initiative de beaucoup de gags burlesques avec quelques compères en quête d’un trésor également convoité par des vilains.


Parmi ces compères, Elena Fisher incarne un acolyte féminin assez charismatique. Ils ont été jusqu’à présenter une quête dans laquelle Nathan va sauver la pauvre Elena pour qu’au final se soit elle qui le sauve avec intelligence et témérité, ce dont elle fera preuve à plus d’une reprise, c’est assez représentatif de la volonté d’en faire un personnage fort même si Nathan Drake reste la vedette. Pour moi, c’est le personnage le mieux écrit de cet épisode avec ce juste compromis entre sa force qui la rend charismatique et son retrait qui permet à Nathan de rester le héros de l’intrigue à part entière.


Les antagonistes sont en revanche d’un ridicule assez affolant, idiots et maladroits la plupart du temps, la seule chose qui en fait une menace c’est leur nombre et leur cruauté mais Nathan en rigolera toujours, même quand ce n’est pas nécessairement le bon moment. Les enjeux dramatiques, les situations anxiogènes et l’ambiance bon enfant ne font pas toujours aussi bon ménage que dans un bon Indiana Jones au cinéma dont le jeu s’inspire. C’est l’une des principales faiblesses d’écriture qu’Amy Hennig n’a pas su éviter, dans un genre qui s’éloigne bien du travail qu’elle a pu délivrer pour la saga Legacy of Kain.


Dès les premiers dialogues, le jeu justifie ses partis pris en expliquant pourquoi est-ce qu’on ne fait pas appel aux autorités et qu’on se retrouve seul face à une armée hostile, pourquoi est-ce qu’on a pas trop de remords à les tuer vu que ce sont des bad guys... ce qui rend le récit a minima cohérent en plus de mettre en scène des héros relativement cools dont on prend plaisir à suivre les aventures. Ça permet au scénario de ne pas être si mauvais que ça, voire assez plaisant en dépit de ses nombreux défauts, qui en limitent tout de même l’intérêt.


On a par exemple des raccourcis scénaristiques un peu grossiers qui apparaissent, Elena qui retrouve Nate sans jamais qu’on comprenne comment elle a fait concrètement, Sully qui révèle la position de la salle du trésor par hasard alors qu’il en avait aucune idée, un deus ex machina très improbable pour sauver un personnage d’une mort certaine... pour moi ce sont des preuves que la narration n’est pas encore très bien maîtrisée pour cet épisode, mais peut-être qu’il aura fallu en passer par ces erreurs pour que l’on est droit à la qualité du travail fournie dès sa suite, un peu comme pour le gameplay peut-être bien.



GAMEPLAY / CONTENU : 6 / 10



De façon très convenu, le gameplay se concentre sur les fusillades plutôt que sur l’exploration, la plate-forme ou la réflexion, en s’inscrivant comme un TPS avant tout autre chose et n’assure pas plus que ça même en s’y concentrant. Prévu à la base comme assez original avec un système de visée auto à base de combos, le maniement est finalement très générique avec un cover system au cœur du jeu. Ce dernier comprend une petite faute d’ergonomie qui fait qu’une roulade peut être foirée parce que le jeu va considérer, à tort, que l’on voulait en fait se plaquer face à l’ennemi en choppant le cover le plus proche plutôt qu’en faisant une esquive qui aurait pu nous mettre à l’abri, ça m’est arrivé plus d’une fois de crever à cause de ça.


L’IA est très simpliste, on a jamais l’impression qu’ils se coordonnent entre eux, soit ils ignorent complètement notre présence soit ils savent exactement où l’on est... Il faut attendre la moitié du jeu pour que les ennemis, et l’arsenal du coup, évoluent et il y a un total de 3 factions ennemies différentes mais le jeu attend vraiment sa fin pour les faire s’affronter les unes contre autres avec nous au milieu, ça aurait du arriver plus tôt à mon sens. On a assez peu d’armes différentes, au mode de tir unique et très peu personnalisables, ça manque de richesse mais ça manque aussi de maîtrise.


On sent un certain amateurisme du studio en la matière avec des abris parfois mal placés, des points de spawn ennemis dans notre dos, un manque de lisibilité de l’action ici ou là, l’absence de variation dans la visée quand on est statique ou en mouvement... En difficulté élevée, la seule technique à peu près efficace c’est d’attendre les ennemis dans un goulot d’étranglement, souvent celui au début de l’arène, ce qui veut donc dire se priver de l’arène en elle-même car y combattre induit de s’exposer très facilement sur ses flancs et de galérer à récupérer des munitions sur les cadavres ou en exécutant des attaques au corps-à-corps sans se faire canarder de partout se faisant, c’est assez symptomatique du problème.


Le level-design est excessivement étriqué et linéaire la plupart du temps même s’il y a quelques zones assez travaillées dans lesquelles on va devoir revenir par d’autres accès, débloquer des raccourcis, redécouvrir sous une autre perspective... mais c’est pas la majeure partie de l’aventure malheureusement. On a des phases de plates-formes très assistées dans leur exécution mais qui demandent une observation attentive de l’environnement pour repérer l’unique chemin à emprunter et une certaine anticipation des lourdeurs et approximations du maniement, ce que je ne trouve pas génial personnellement d’autant que les développeurs doivent encore s’améliorer alors sur comment indiquer le chemin sans faire appel à l’interface, une belle initiative qui manque encore de maîtrise.


Les énigmes sont peu nombreuses et peu complexes, elles ont presque plus d’impact au niveau de l’ambiance, parce qu’on est censé être un chasseur de trésor et pas un militaire à la base, qu’au niveau ludique où elles sont finalement assez anecdotiques. Il reste tout de même quelques phases originales, notamment en jet-ski avec quelques bonnes idées, le tout dans un contenu ni trop long, ni trop court. Le gameplay reste tout à fait fonctionnel et on arrive à s’amuser dessus bien entendu, mais ce n’est pas assez riche, diversifié et maîtrisé à mon sens.



CONCLUSION : 7 / 10



Très impressionnant techniquement et esthétiquement au point de faire décoller les ventes de sa console, Uncharted 1 reste assez modeste en ses dimensions ludiques et narratives qui comprennent des bases intéressantes et de bonnes idées mais un manque d’efficacité qui attendra ses suites qui sauront mieux exploiter le concept original de cet épisode. Ça reste assez intéressant de voir comment la saga a commencé, mais c’est clairement pas un épisode que je recommanderai autant que d’autres, notamment sa suite directe Uncharted 2 Among Thieves.

damon8671
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le 24 août 2013

Modifiée

le 14 avr. 2014

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damon8671

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