Virche Evermore -ErroR:salvation-
8.7
Virche Evermore -ErroR:salvation-

Jeu de Otomate et Idea Factory (2021Nintendo Switch)

Sorti en 2021 au Japon et en 2023 à l’internationale, Virche Evermore me tentait bien car il était récent et proposait des visuels qui me plaisaient. En effet, bien que j’apprécie de voir enfin certains jeux localisés, je trouvais qu’Otomate se reposait sur ces anciens succès (du style Hakuoki qui a droit à sa 25156526e réédition alors que le jeu date de 2008) et ne nous proposait pas assez de bons otomes récents, certains étant décevants sur le plan visuel (Paradigm Paradox et ses illustrations de jeu mobile), scénaristique… Virche apparaît ainsi comme un jeu avec du lore ou une vraie proposition esthétique, mais est-ce que ça vaut réellement le coup ?


Je me réjouis déjà de l’identité visuelle de l’otome, avec des personnages et des illustrations agréables à regarder. Une vraie personnalité se dégage, ce qui permet de sublimer les moments bien dramatiques ou doux.


Après une route commune agréable, il est obligatoire de faire les trois premières routes pour ensuite débloquer Yves, qui permet enfin d’accéder à la route que se partagent Adolphe et Ankou. L’otome est donc à faire dans son intégralité, arrêter une route qui ne nous plaît pas bloque notre progression ; ça représente ainsi un problème si l’on apprécie pas l’une des routes ! Suivre l’ordre est néanmoins pertinent puisqu’on en découvre de plus en plus sur l’univers au fil de celles-ci. Chaque route permet aussi d’en savoir un peu plus sur les personnages secondaires et s’attacher à eux, néanmoins certains d’entre eux sont là pour remplir une fonction (leurs actions négatives ont servi aux plans du vrai méchant) et n’en sont pas très attachants ni intéressants.


Le jeu possède beaucoup de lore qui se révèle parfois un peu lourd, on finit par être noyé par beaucoup d’éléments qui se rajoutent sans cesse, notamment vers la fin. La science montrée ici ne paraît pas vraisemblable, il ne faut définitivement pas y chercher du « réalisme » mais s’adapter à la logique de l’univers qui pose ses propres enjeux. Néanmoins la curiosité est là, le jeu a réussi à me donner envie d’en savoir plus sur les mystères derrière la technologie des Relivers ou les raisons derrière la condition de Ceres.


L’héroïne Ceres est appréciable mais frustrante. Sa condition lui donne une importance au centre du jeu. Mais elle n’est finalement que très peu maître de son destin et reste avant tout spectatrice des actions et des combats des personnages masculins qui se battent pour elle.

Elle est finalement très similaire à Cardia de Code Realize, les deux étant considérées comme des monstres et rejetées par les autres. Tandis que Cardia apprend à se défendre, fuir, et est définitivement plus utile à l’issue de sa route commune, les tâches que fait Ceres durant ses routes sont finalement assez réduites et nulles. Elle sert de domestique dans deux routes, d’assistante du professeur Lucas dans sa route…

Et c’est là que je me rends compte que c’est quelque chose de pas seulement propre à Virche Evermore, l’héroïne d’otome se retrouve bien souvent « restreinte » au sein de sa propre histoire. Son existence y est essentielle, mais ses actions restent pourtant totalement limitées. Les actions entreprises par l’héroïne sont souvent dérisoires par rapport à celles des LI qui semblent être les vrais « personnages centraux » et actifs, ce qui me paraît dommage.

Ici, Ceres est gentille, a ses insécurités et reste donc un personnage plutôt sympathique, mais pas mémorable.


Concernant Mathis, au début la route était appréciable, avec une relation assez innocente mais mignonne, les deux s’aidaient mutuellement etc. J’ai tout de même eu du mal à voir où était l’amour dans la relation entre les deux, et ça ne s’est pas amélioré vers la fin… Celle-ci part en révélations chocs où l’un des méchants part en cours magistral sur les raisons de sa méchanceté et ses actions pendant 10min. En fait j’ai trouvé que c’était tiré par les cheveux, déjà avec les actions de cet antagoniste, mais surtout le fait qu’il fasse toute sa story time à Ceres ? La première fin part en délire étrange qui indique la direction prise par ce jeu : pousser l’histoire vers des délires un peu darks, gores, dérangeants. Le ton est donné, et c’est pas forcément ce que j’aime car j’ai l’impression que souvent, les otomes tombent dans le sombre et macabre sans raison apparente, et ça s’est pas arrangé avec la seconde route...


Pour la route de Lucas, j’ai encore eu du mal avec l’apparition des sentiments amoureux. J’ai eu beaucoup du mal à y croire : Lucas appelle Ceres son « ange », laisse supposer qu’il aime Ceres depuis des années, et ça sort un peu de nulle part, il ne l’a pas vraiment montré avant et j’ai du mal à comprendre les raisons derrière cet amour. Je pense que ma difficulté à croire en leur relation vient d’un côté de l’histoire de Lucas qui le rend « moralement discutable » et difficilement appréciable. Pour le côté dramatique on y était : j’ai pleuré… de rire. Cette route elle-aussi possède un méchant qui part en cours magistral qui expose toutes ses actions. Comme pour la première route, tu sens que c’est pour apporter des éléments du plot nécessaires à la compréhension du dénouement de la vraie route, mais ça fait toujours forcé.

Lucas y tombe dans le désespoir et tue TOUT LE MONDE, c’est un véritable carnage bien dérangeant, et à la fin il garde le cadavre de Ceres et se marie à son squelette :)

J’ai trouvé que c’était abusé, qu’ils cherchaient à faire quelque chose de super sombre mais finissaient par tomber dans la caricature, résultat ça m’a surtout fait rigoler.

On constate donc que les deux premières routes ne m’ont pas plu, malgré une route commune intrigante. Ça pose problème dans un jeu où l’on ne peut pas skip les routes, puisque si j’allais me taper une troisième route pas appréciable j’allais péter un câble, mais un homme capable est arrivé en la personne de Scien !


On a dans sa route une vraie évolution du personnage (classique mais très bien faite ici) : Monsieur méprise d’abord les émotions, se montre stoïque mais s’ouvre à Ceres qui l’invite à devenir plus humain et à remettre en questions ses conceptions et son comportement. Au final, il la respecte/l’estime bien et leur dynamique est rigolote, ils se considèrent mutuellement et communiquent bien. Même si Ceres a ici un rôle assez restreint, celui de domestique, elle prend néanmoins de l’importance et exerce une réelle influence positive sur Scien.

Scien tire vraiment quelque chose de son expérience avec elle et en ressort plus humain, prend du recul sur lui-même. En fait c’était satisfaisant à lire, et bien qu’il y a eu de l’action, ce n’est pas tombé dans le bain de sang et de glauque dans lequel sont tombées les deux premières routes. Certains ont trouvé cela « ennuyant », mais perso’ j’ai largement préféré et trouvé cela bien plus vraisemblable et intéressant. Ici, on a pas vraiment de méchant « taré » qui révèle ses projets dans un long monologue : l’antagoniste principal est Scien lui-même, aveuglé par ses positions qu’il finit par reconsidérer, et on s’intéresse aux enjeux éthiques de la technologie des Relivers et des recherches de Scien.


La route d’Yves est plutôt agréable (mais bon j’en ai oublié la moitié) et la route finale honore son titre ! Cette route est spéciale puisque deux personnages masculins se partagent la route. C’est assez curieux et original, mais cette dynamique à trois crée des échanges rigolos, notamment avec la rivalité entre les deux hommes qui s’attachent cependant l’un à l’autre !

Ce choix prend son sens au cours de la route, mais c’est Adolphe qui ressort «vainqueur » de cette route qui tourne majoritairement autour de lui et sa relation avec Ceres, tout à fait appréciable. Les deux tiennent l’un à l’autre et apprennent finalement à mieux se connaître en dépassant cette relation ‘fraternelle’. Ankou construit aussi une dynamique intéressante avec Ceres, on en apprend plus sur ses origines et on constate que c’est quelqu’un de dévoué qui a toute son importance dans l’histoire. Globalement cette route prend une tournure intéressante avec quelques éléments que je n’avais pas anticipé, et qui bien que pouvant paraître un peu tirés par les cheveux, fonctionnent bien.


On y est confronté à l’antagoniste principal que j’ai bien plus apprécié que les petits antagonistes ! Celui-ci, bien qu’il expose aussi les raisons derrière ses actions bien tarées, ne m’a pas paru invraisemblable ni trop cliché. Je pense que c’est en partie car j’étais déjà émotionnellement investie à son sujet,

puisque c’est un personnage d’apparence secondaire que j’avais adoré au cours du jeu, auquel on a eu le temps de vraiment s’attacher grâce à différents événements dans plusieurs routes et qui a réellement un lien avec les autres personnages. (C’est ce qui avait d’ailleurs manqué à l’antagoniste NUL de Collar X Malice)

J’étais donc réellement curieuse d’en savoir plus. Ce méchant ne se montre pas taré du premier abord, expose plutôt calmement ses choix, sans trop blâmer les personnages qui s’opposent à lui. Il finit lui aussi par tomber dans le « désespoir » et faire des actions folles, mais je n’ai pas soufflé comme dans les premières routes. J’ai trouvé le combat pas mauvais, disons que c’était un final assez badass (ça change du final pitoyable de Collar X Malice) mais, encore une fois, le rôle concret de Ceres y reste restreint. Notre héroïne a du mal à s’illustrer d’elle-même, elle subit un peu ce qu’il se passe et observe les actions de ses alliés qui eux, savent se battre. Mais c’est le moment pour Adolphe et Ankou de s’illustrer et leurs moments de bravoure sont jolis à voir ! Cette route a quelques gros moments d’émotion qui restent plutôt mémorables, et offre une conclusion assez forte, à la hauteur. Après des Despair Ends et Salvation Ends bien désespérantes dont la conclusion est rarement heureuse, on a une conclusion plus heureuse et bien plus satisfaisante, à l’issue des nombreuses souffrances vécues par les personnages. On se sent récompensés !


En conclusion, Virche Evermore est un jeu qui éveille l’intérêt par ses enjeux et son univers, mais qui s’essouffle un peu au cours de son développement avec des excès de gore et une noirceur parfois forcée. Néanmoins, il sait se reprendre en se montrant plutôt original dans sa structure et dans certains de ses éléments scénaristiques. Il offre tout de même de bonnes routes et propose un dénouement dans lequel on reste investi. Bien que certains moments de « désespoir » soient trop caricaturaux, l’otome réussit à transmettre des moments d’émotion, nous attacher à des personnages et nous investir. Ça reste un jeu plutôt solide malgré ses défauts, que j’ai apprécié et dont je garde en tête certains moments et personnages.



NiNonNiOuiOui
7
Écrit par

Créée

le 10 juin 2024

Modifiée

le 12 juin 2024

Critique lue 218 fois

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