VVVVVV
7.2
VVVVVV

Jeu de Terry Cavanagh, Distractionware et Nicalis (2010PC)

*insérer un jeu de mot comportant 6 fois la lettre V*

Il y a quelques temps j'ai fini VVVVVV pour la première fois. J'étais heureux.


Pour un jeu que j'ai acheté une misère lors des soldes, la somme dépassant à peine un unique euro, j'ai été bluffé par la spontanéité qui traversait chaque ligne de code de ce titre.

Je l'ai bouclé en même pas deux heures, et pourtant j'étais déjà prêt à le recommander à n'importe qui. J'avais posté une critique à l'image du jeu : simple, courte, limpide.

Et puis entre temps il s'est passé un autre truc qui m'a définitivement convaincu que ça valait le coup d'en faire des caisses sur mon amour pour ce jeu. Mais pour cela il faut retracer vite fait ce qu'est VVVVVV.


Tout d'abord c'est un jeu simple. Pas facile, mais simple. Trois boutons sont nécessaires pour avancer dans le jeu : flèche directionnelle gauche pour aller à gauche, flèche directionnelle droite pour aller à droite, et le bouton de saut qui ici permet d'inverser la gravité. C'est tout.

Il y a aussi un bouton pour interagir avec certains éléments, mais ceux-ci n'ont aucune incidence sur notre traversée des niveaux.

Donc c'est un jeu très simple. Presque couillon. On avance en évitant de se manger les piques et on arrive à la fin du niveau.

Il n'y a rien de plus à savoir sur VVVVVV. Vraiment.

Une fois qu'on maîtrise ça, ce qui n'est pas très demandant, on peut aller jusqu'à la fin du jeu sans problème. Il faudra juste savoir se frotter à plusieurs salles assez corsées qui nécessitent un réel sens du timing et de la précision, mais ce n'est jamais insurmontable.

Les salles étant très petites, et presque chacune comportant un point de sauvegarde automatique, chaque mort nous fait réapparaître à peine 5 secondes en arrière plutôt que de tout se retaper jusqu'à en être punitif. Donc même si certains moments sont particulièrement durs, ça ne prend jamais très longtemps pour surmonter une petite dose de challenge.


Rien que ça, c'est une philosophie de jeu qui me parle totalement. Le défi dans la bienveillance, le malmenage sans surmenage. Une philosophie au cœur d'une autre de mes plus belles expériences de joueur qui s'inspire d'ailleurs probablement un peu de ce jeu, j'ai nommé Celeste...

Et même si je l'ai torché très rapidement, j'étais heureux de ma découverte. C'était une expérience courte, sobre, limpide, plaisante. Je n'en demande pas plus pour m'en extasier.

Mais le jeu a su me rappeler dans ses rangs à peine une nuit de repos plus tard.

J'avais déjà érigé ce titre comme un étalon de plaisir. Le genre de jeux si denses et directs qu'y revenir n'est jamais déplaisant. Surtout qu'après la découverte, en sachant à peu près où aller d'entrée de jeu, il est possible d'en voir la fin en vraiment peu de temps, une demi-heure grand maximum.

Mais plus que ça, j'étais quand même curieux, quitte à vraiment le boucler, de récupérer les Bidules Blings.


Dans la carte du jeu, dans les niveaux et parfois entre eux, on peut récupérer au total une petite vingtaine de ces machins. Ça ressemble à de très grosses pièces, et ce n'est vraiment pas difficile de les localiser (un membre de notre équipage s'en charge pour nous et les affiche même sur notre carte).

Donc j'ai commencé à refaire les niveaux pour les avoir. Parfois il faut savoir se repérer entre les différentes salles, parfois il faut un peu se creuser la tête, parfois il faut faire preuve de talent et de persévérance (celui dans les salles Vene, Vedi et Vici, une plaie...), mais au bout d'une petite session c'est facile de tous les regrouper.

Et là, le jeu m'a montré qu'on pouvait passer d'une philosophie à une autre sans que ça fasse tâche. Au contraire c'est là à mon sens que VVVVVV a réussi à se transcender en profondeur.


Car une fois tous les bidules obtenus, on débloque le labo secret. Et dans le labo secret on a les succès...

En temps normal, je me fous pas mal de réussir tous les succès d'un jeu, mais là le jeu m'a tendu une perche pour m'inciter à essayer pour voir.

On nous dit que c'est le vaisseau d'un équipage d'une autre dimension, qu'ils ne sont plus là mais que si on répare le vaisseau ils vont peut-être revenir.

Et les trucs à réparer, c'est la vitrine des succès à remplir.

Donc je peux quand même passer un peu plus de temps que prévu sur ce jeu, après tout je prenais toujours mon pied et à ce stade me tendre un peu plus de contenu suffisait à me rendre heureux.

Et le jeu a introduit le mode contre la montre.


Alors c'est un truc classique dans ce genre de jeux, pouvoir faire un niveau dans un temps record, et moins notre chrono est élevé mieux on est classés. En l’occurrence il y a le rang B, puis A, puis S et enfin le symbolique rang V. Et avoir un rang V sur un niveau débloque un succès.

Mais aller vite ne suffit pas. Ça nous permet juste, si on finit avant le temps imparti, de gagner un rang sur 4.

Si on veut avoir le rang V, il faut non seulement aller vite mais aussi récupérer les bidules dissimulés dans le niveau, ce qui implique parfois certains détours qui font perdre du temps, mais il faut surtout ne pas mourir. Une mort et un rang nous glisse des doigts.

La philosophie de pouvoir recommencer juste avant n'existe plus. Pour avoir le succès, il faut retourner le niveau, le connaitre et le maîtriser à la perfection sans droit à l'erreur, et souvent en ayant besoin de se précipiter un peu pour ne pas être en retard sur le temps imparti.


D'un coup, chaque niveau qui était un peu dur devient un challenge redoutable dès qu'on se colle à l'exercice. Pas le choix pour avoir le succès, il faut traverser tout le niveau rapidement, récupérer les bidules dont certains sont vraiment difficiles à obtenir, et ce sans mourir une seule fois.

Donc on se met à chercher comment optimiser les sauvetages de temps, savoir où on peut souffler pour reprendre nos esprits et où prendre des risques pour récupérer des bidules ou prendre quelques dixièmes de seconde d'avance, ce n'est plus du tout le même jeu.

Et pourtant ça a totalement marché sur moi.

Le fait de savoir qu'il y a un objectif derrière m'a aidé à m'y coller, mais surtout le fait de faire siens une dextérité et une assiduité certaines m'a complètement grisé.

Obtenir un rang V ne signifie pas être bon, ça signifie avoir conquis le niveau. Et certains niveaux sont vraiment, VRAIMENT difficiles à conquérir. Souvent à cause de salles très compliquées que l'on pouvait essayer en boucle dans le jeu de base sans revenir trop en arrière mais qui ont ici une valeur d'obstacles risqués car susceptibles de nous renvoyer à la case départ, avec déjà tout le niveau dans les pattes.

Donc on s'entraine. On meurt, on recommence, on se perfectionne jusqu'à en voir le bout sur un essai au milieu de dizaines d'autres.

Et voir le rang V s'afficher sur l'écran après avoir souffert un bon moment, ça n'a juste pas de prix.


Du coup j'ai combien de temps de jeu pour un truc dont j'ai vu les crédits en une petite centaine de minutes ? Ah, bientôt 25 heures...

Pas à dire, un jeu qui me pousse à ce point à le maîtriser j'en connais trop peu.

Surtout que cet apprentissage rigoureux de chaque niveau est l'occasion de se perfectionner pour les autres catégories de succès, comme refaire le jeu et le terminer en un nombre limité de morts, jusqu'à en découdre avec l'épreuve reine : le mode sans mort.


Ce succès, c'est le dernier qui me reste à débloquer avant de voir le mystère que renferme le labo secret. C'est aussi l'un des challenges les plus relevés qui m'aient été donnés de faire dans un jeu vidéo. Pourtant je m'y colle et je deviens meilleur après chaque essai.

C'est d'ailleurs le seul frein qui m'empêche d'accorder la note suprême à VVVVVV, le fait de savoir qu'il me reste encore un tout dernier truc à découvrir par moi-même avant d'avoir l'illumination finale et de pouvoir fermer un jeu que j'ai fini par connaître par cœur de mon plein gré uniquement parce qu'il a su se faire d'apparence simple et limpide pour renfermer en son sein toute une autre philosophie amenée de sorte à ce que je la maîtrise à son tour.

Car nul doute qu'un 10/10 serait totalement mérité pour ce jeu, je m'y refuse juste arbitrairement le temps que je surmonte cette dernière épreuve.


Mais en l'état je n'ai aucun mal à considérer le jeu de Terry Cavanagh comme étant une pierre angulaire de mon parcours de joueur.

C'est le titre que je cite le plus souvent quand je parle de jeux qui n'ont pas besoin de trop pour en faire beaucoup.

C'est le jeu que je ressors tout le temps comme exemple de jeu dénué de toute couche de gras pour aller à l'essentiel.

C'est l'œuvre de son média qui m'a le plus époustouflé par son immense aboutissement dans son humble sobriété.


Des jeux comme celui-là, on n'en fait pas tous les jours, même si toute sa réelle profondeur ne sera pas accessible au plus grand nombre à cause de sa haute difficulté.

C'est vache mais c'est voulu. Mais vendu vraiment pour une vétille, presque un vol, sa valeur peut se vanter d'être vertueuse. Ne voulez-vous donc pas voler dans son vent ? Un va-et-vient au point de vente pour faire vivre ses visionnaires inventeurs, vous ne vous verrez pas vexés !

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le 5 sept. 2024

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