Y a pas à dire, la vie dans l'ouest, c'est pas toujours facile. Sans cesses menacés par le désert et les brigands, les pauvres habitants du coin doivent aussi survivre aux sorcières, loups-garous et autres horreurs fantastiques venues des profondeurs de la Terre, à se demander comment quelques hameaux ont pu survivre à cet enfer de sable et de sang. Heureusement que vous êtes là pour mettre un peu d'ordre à tout ça, ou du moins pour mettre fin aux tourments des survivants, d'une manière ou d'une autre.
A la tête d'un des cinq protagonistes du jeu (que vous serez amené à contrôler à tour de rôle), et muni d'un objectif relativement simple, vous voilà donc parti à la conquête de l'ouest six-coups à la main. Le jeu prend la forme d'un shooter en vue du dessus assez rigolo, où vous pourrez profiter d'un shootdoge à la Max Payne pour dézinguer du desperado en slow-mo. Détail sympathique, la gestion des munitions peut devenir assez importante dans pas mal d'affrontements, les pétoires d’antan ne se rechargeant pas à la vitesse de l'éclair. Mais c'est surtout l’interactivité du jeu qui permettent au combats de sortir du lot. Attention cependant, si les développeurs mettent bien en avant leurs CV remplis d'immersive sim, ne vous attendez pas à des sommets de complexité. La taille du projet a imposé une limite aux nombre de mécaniques, qui ont quand même le mérite d'être bien exploitées. De manière générale, tout est prétexte à provoquer une explosion, la flotte doit être le seul truc qui puisse pas prendre feu (mais heureusement, elle est électrisable), ajoutez à cela pas les capacités souvent destructrices des héros (pas toujours égales en terme d'efficacité ou d'intérêt), et vous obtenez un bon potentiel pour des moments particulièrement chaotiques, sans doute parmi les meilleurs du jeu (surtout si vous parvenez à en tirer parti), si ce n'est pas vous qui subissez le courroux d'une réaction en chaîne improbable. Vous aurez aussi l'option d'être un peu plus discret, mais la furtivité est très limitée, avec son IA un peu claquos et une toute petite poignée d'options, et servira surtout à affiner un peu les rangs ennemis, voler à l'étalage ou préparer une attaque. D'ailleurs, s'il est sans doute possible de finir le jeu sans tuer ou en se concentrant sur l'infiltration, le jeu ne l'encourage absolument pas et ça n'a que peu d'intérêt. Le tout reste solide, et s'il est sans doute plus amusant que véritablement tactique, le jeu sait récompenser la créativité.
Malheureusement, la répétitivité peut s'installer, le jeu ne bousculant pas vraiment sa structure (toujours un peu coincée dans ces petites maps), mais surtout à cause de l'exploration et du contenu secondaire. La lucrative activité de chasse à la prime se déroule la plupart du temps dans les 3 mêmes décors, et la plupart des missions secondaires se résument à aller chercher son cendrier à un type dans une ville infestée de saloperies. Les héros aux capacités différentes limitent un peu la casse, mais l'impression d'un étirage inutile se fait sentir. Il y a quand même des vraies quêtes secondaires, mais elles sont très peu nombreuses, et j'ai trouvé un peu dommage que l'exploration ne réserve que peu de surprises et de bizarreries, ce qui n'aurait fait que renforcer l'atmosphère. Mais le titre préfère garder le mystère pour son intrigue principale.
Intrigue divisée donc en 5 sections, aux protagonistes et enjeux différents, se regroupant dans une quête plus large dont les contours se définiront au fur et à mesure. L'écriture est réussie et fait honneur au Weird du titre, réussissant à faire planer une atmosphère mystérieuse et malfaisante sur le monde du jeu, soutenue par une ambiance sonore (et visuelle, mais un peu moins) très réussie. Mais c'est surtout la souplesse de la progression qui fait tout le sel de cette aventure. Les quêtes font offriront un choix final qui n'a rien d'anodin, puisqu'il vous faudra vivre avec dans votre incarnation suivante, la structure segmentée prenant ici tout son sens. Mais surtout, vous êtes libre de progresser tout à fait librement dans votre quête, et même bien encouragé à ne suivre que vos propres désirs. Bien sûr, cette liberté ne serait pas aussi intéressante si vos décisions n'avaient pas vraiment d'impact sur le jeu. Et Weird West est plutôt doué pour ça, les cadavres laissés derrière vous et vos choix auront systématiquement des conséquences, parfois esthétiques, parfois avec une vraie incidence sur le monde et les systèmes du jeu. Cette capacité à vous laisser une grande marge de manœuvre tout en prenant en compte la plupart de vos actions est la plus grande force du titre. On retrouve bien plus l'héritage immersive sim ici que dans les moyens d'aborder les affrontements. Après, tout ça a bien sûr un prix, la narration n'est jamais très complexe (y a d'ailleurs pas de doublages), on est loin d'un RPG très écrit, et l'échelle reste relativement restreinte, mais proposer une telle marge de manœuvre de manière aussi constante et pas mal de chouettes idées pour lui donner de l'impact reste impressionnant, surtout pour un titre de cette envergure. A noter quand même que si le tout fonctionne quel que soit votre style de jeu, jouer les chics types a l'air de rendre vos actions un peu moins marquantes dans le monde du jeu, mais c'est à vérifier.
Avec sa carte trop grande pour son propre bien, Weird West peut assez vite devenir rébarbatif si vous vous penchez un peu trop sur une exploration et du contenu secondaire qui se contente souvent du strict minimum. Cette envie de trop faire témoigne de l'ambition du studio, qui a néanmoins tenu les promesses les plus importantes: des affrontements systémiques, pas si profonds mais efficaces, et surtout une progression très libre, qui sait lier habilement narration et mécaniques de jeu. Imparfait mais rempli de bonnes intentions et de chouettes idées, Weird West mérite bien votre attention.