Tout comme Ryu ga Gotoku : Kenzan qui avait marqué l'arrivée de la série Yakuza sur la PS3, cet épisode intitulé Ishin ("Restauration") est un spin-off se déroulant à la période Bakumatsu (milieu XIXe siècle) et marque l'arrivée de la série sur la PS4.
Malheureusement, la série n'ayant jamais connu un énorme succès commercial en Occident, SEGA ne prend même plus la peine de les localiser. Ayant pu me procurer le jeu en import, je vais écrire ici mes impressions.
Au passage, pour ceux qui cherchent un moyen (laborieux certes) pour comprendre un peu l'histoire du jeu, j'ai trouvé ce site où le mec fait un gros travail pour montrer le walkthrough, expliquer les dialogues, la solution etc... : http://www.khhsubs.com/projectsrggishin.html (c'est en anglais par contre).
L'histoire du jeu s'appuie énormément sur les faits historiques mais apporte une petite touche d'uchronie : il mélange volontairement la vie de Sakamoto Ryôma (représenté ici comme un ancêtre de Kazuma Kiryu, le héros de la série principale) avec les prouesses du Shinsengumi qui s'assuraient de la protection de Kyôto. Avec ce mélange, le jeu parvient à la fois à rendre l'intrigue passionnante mais aussi enrichissante. J'ai appris un tas de choses sur le la situation compliquée du Bakumatsu. Encore plus astucieux, les développeurs sous-entendent constamment un parallèle avec la situation du Japon actuel qui n'est pas au mieux de sa forme que ce soit au niveau de l'économie ou de la morale de la population.
En dehors de la quête principale, on peut se balader dans la ville de Kyôto et y découvrir une avalanche d'activités. Non seulement les quêtes secondaires sont nombreuses et amusantes, mais il y a aussi tout un tas de mini-jeux, défis, arènes de combat, collectibles, donjons à explorer... de quoi vous occuper plus d'une centaine d'heures pour tout finir.
On peut aussi juste se balader pour visiter, car malgré quelques faiblesses techniques (après tout le jeu est aussi prévu pour PS3), c'est un vrai régal de découvrir Kyôto du temps des samouraïs, avec des quartiers bien variés tels que Fushimi et son marché rempli de vies, Gion et ses maisons closes ou encore le dangereux Mukuro-gai avec ses criminels, vagabonds et jeux d'argent.
Au niveau du combat, Ryôma utilise 4 styles différents : bagarre à mains nues, katana, revolver et une combinaison de katana et revolver. Il peut également utiliser en bonus des lances et même un canon (!) qu'il peut ranger dans son futal comme par magie. Chaque style a son lot de finish moves et attaques spéciales à débloquer au fur et à mesure.
Mais surtout ce qui est remarquable avec ce jeu et de manière générale dans cette série, c'est que tous les personnages ont une véritable identité et une histoire qui leur est propre. Ils sont pourtant nombreux, mais le jeu n'hésite pas à prendre son temps pour poser le contexte et développer.
Trop souvent les personnages des AAA sont des pantins génériques aux rôles formatés qui ne sont là que pour faire avancer l'histoire sans qu'il n'y ait aucune réflexion sur ses décisions, ses erreurs et sa vie en général. Ou bien s'il y en a, c'est souvent de manière très maladroite (du genre le héros qui se demande s'il doit tuer tel personnage, alors qu'on vient de trucider 452 ennemis juste avant). La faute probablement à la conception du game design qui oublie de lier le gameplay et le scénario, et fait avancer les missions sans prendre en compte les changements d'état psychologique du personnage. Bien entendu, je n'exige pas forcément qu'un jeu vidéo ait un bon scénario et des personnages riches si son gameplay est réussi. Mais le problème c'est qu'une grande partie des AAA se focalisent à mort sur le story-telling alors qu'il tombe trop facilement dans le piège des personnages stéréotypés et des histoires affligeantes racontées avec le plus grand des sérieux.
A l'inverse, quand on incarne Ryôma, on a l'impression de contrôler un être humain. Tout le long du jeu, on apprend à le connaître, on voit naître une certaine proximité entre nous et le personnage. On le fait évoluer tout comme il nous fait évoluer. On finit par adorer le personnage non pas parce qu'il cherche à nous impressionner en prenant la pose, mais parce qu'il est sincère. Il a sa propre philosophie sur la manière de vivre en tant qu'un samouraï, et on prend du plaisir à le découvrir.
Ryôma est toujours là pour aider les personnes en danger autour de lui.
Quand un groupe d'enfants lui proposent de jouer ensemble, il accepte.
Quand il rencontre un jeune homme qui manque de confiance, il l'encourage.
Quand il voit une vieille femme perdue, il l'accompagne jusqu'à chez elle.
Quand une fille se retrouve orpheline et recouverte de dettes, il décide de l'adopter et payer à sa place.
Quand il trouve des animaux abandonnés, il les adopte aussi pour les nourrir et jouer avec eux.
Et surtout, quand une personne qui lui est chère meurt, il n'hésite pas à pleurer, car il n'y a rien d'honteux à cela.
Combien de héros de jeux vidéo ont vraiment versé une larme ?
Bref, avec Ryôma on partage vraiment un moment de notre vie, ce qui est probablement l'ultime réussite pour l'écriture d'un personnage.
Alors pourquoi seulement 8 ?
Et bien tout n'est pas parfait. De nombreux dialogues sont là pour mettre en valeur les personnages, mais il y a aussi un gros paquet de dialogues légèrement soporifiques qui se fatiguent trop à vouloir tout expliquer sur les événements historiques de l'époque, et on finit parfois à ne plus savoir si on assiste à une vraie conversation entre deux personnages ou plutôt à un cours d'histoire. Pour les mêmes raisons, la trame principale perdait parfois en intensité quand l'intrigue s'éloignait trop de la quête personnelle de Ryôma et se concentrait davantage sur la politique.
J'ai été un peu déçu aussi de la conclusion. Pour résumer sans spoiler, en gros j'ai trouvé le grand méchant final un peu naze et la morale finale un peu... niaise (quelque chose du style "si le gentil a gagné et pas le méchant c'est parce qu'il avait le pouvoir de l'amour !!!" ouuuaaaaais...)
Et je l'ai déjà dit plus haut mais dés fois la technique fait quand même vraiment tache, avec des textures dignes du début PS3, les kimonos des personnages qui ont tendance à s'étirer bizarrement, des loadings entre les différentes zones et des PNJ qui disparaissent brusquement s'ils s'approchent trop du héros pendant une cutscene.
Néanmoins, Ryu ga Gotoku : Ishin est un excellent jeu de samouraï, probablement un des meilleurs dans cette catégorie. Riche en contenus, amusant et diablement bien écrits, il se présente comme un must have pour ce début de génération en manque de jeux. Et malheureusement, c'est vraiment dommage que SEGA semble avoir abandonné l'Occident concernant cette saga...