Comment envisager les relations entre colonisateurs et colonisés, au moment où la colonisation bat son plein, mais aussi à l’aube des indépendances ? Telle est la question que traient ces trois discours.


Jules Ferry développe en 1885 une justification bien connue du colonialisme : les « races supérieures » auraient le devoir de civiliser les « races inférieures ». Plus surprenantes sont les interventions de ses adversaires, le plus souvent à gauche, qui montrent qu’il était tout à fait possible de porter un regard sans illusion sur la réalité de la conquête coloniale, sa violence et sur la contradiction entre la prédation opérée par la Troisième République et les droits de l’homme dont elle se réclame.


En 1958, Sekou Touré revendique une indépendance totale de la Guinée, refusant le cadre de la communauté franco-africaine proposé par le général de Gaulle. C’est un discours très hégélien (ou marxiste, ce qui n’est pas très différent) : le rappel des épreuves de la Seconde Guerre mondiale laisse comprendre que la civilisation européenne n’est plus le moteur historique qu’elle était ; il est donc temps que s’affirme la civilisation africaine. Il manifeste ainsi un refus de l’universalisme promu, non sans hypocrisie, par le colonisateur. Sekou Touré fait donc le choix de la rupture avec le colonisateur.


La citation de Lumumba mis en exergue pour donner son titre au livre, « Africains, levons-nous ! », semble indiquer une même intransigeance ; or loin de la volonté de rupture de Touré, Lumumba, conscient sans doute du terrible sous-développement du Congo belge, conjugue à la fois la fermeté quand il réclame l’indépendance, et la volonté de se concilier l’Occident dont il demande plusieurs fois l’aide. Sa mort montre malheureusement ce que l’ancien colonisateur pensait de cet appel à la coopération sur de nouvelles bases. Sekou Touré, lui, règnera sans partage sur la Guinée jusqu’à sa mort en 1984.


Ascyltus
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le 5 mars 2024

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