Premier contact avec William Carlos Williams avant de lire sa poésie : son Autobiographie, publiée peu avant ses 70 ans. Né en 1883 dans le New Jersey de parents européens (un père anglais, une mère mi-française mi-espagnole), William Carlos Williams devient médecin avant de devenir écrivain.
Si sa vie, dans les années 1910-1920 qui sont le cœur du livre, n’est donc pas tout à fait une vie de bohème, elle ne manque pour autant pas de pittoresque entre le quotidien d’un jeune pédiatre dans des hôpitaux plus ou moins délabrés de New York et de sa banlieue d’une part, et les rencontres, aux Etats-Unis ou en Europe où Williams voyage longuement avec sa femme Florence, avec une foule d’artistes et d’écrivains d’autre part. On se situe entre les Carnets d’un jeune médecin de Boulgakov et Paris est une fête d’Hemingway.
Sur les deux tableaux, Williams se montre d’une grande humilité, et consacre l’essentiel de ses anecdotes à tous ceux qui croisent sa route - parmi lesquels on retiendra entre autres James Joyce, Sylvia Beach, Marcel Duchamp, Gertrude Stein et surtout Ezra Pound, sorte de frère ennemi dont les outrances sidèrent Williams dès sa jeunesse, et dont le parcours se termine, suite à des déclarations politiques trop radicales, par un internement forcé. Face à ceux-là et à quelques autres grandes voix du modernisme américain (Wallace Stevens, T.S. Eliot…), Williams reste, presque tout au long de cette autobiographie sans apprêt mais pleine de générosité, discret sur sa propre activité d’écrivain, ne s’autorisant finalement à en parler plus en profondeur que dans les derniers chapitres - soit à l’heure de la consécration tardive qui voit enfin le médecin accéder pleinement au statut de poète.