Churchill et Chaplin : deux célébrités de leur temps, dont on a du mal à imaginer qu'une amitié ait pu les réunir. Tout les séparait et d'abord les convictions politiques (à droite pour le premier, à gauche pour Charlot). Sauf que l'un et l'autre étaient dévorés par la même maladie : la dépression, autrement décrite sous l'expression "Le chien noir", et par un pacte secret passé entre eux en 1929, celle de s'appeler mutuellement quand ce cabot se montrerait trop mordant. Le point de départ du roman de Michael Köhlmeier, Deux messieurs sur la plage, est alléchant : les conversations entre ces deux monstres sacrés devisant sur la mort, et notamment la meilleure façon de se suicider, promettaient d'être passionnantes et drôles, forcément, avec ces deux personnages aussi doués pour l'humour, fût-il noir. Le livre, s'il nous fait entrer dans l'intimité de ces géants, ne tient pourtant pas tout à fait ses promesses. Leurs dialogues que l'on attendait en nombre sont rares et Köhlmeier digresse beaucoup en décrivant la pression qui les entourait : Hollywood, les rumeurs, la vie dissolue de Chaplin, d'un côté ; la mise à l'écart d'un Churchill devenu has been dans les années 30, de l'autre. Chacun des deux héros a droit à de longues pages qui évoquent toutes les raisons qu'ils avaient de subir les assauts du stress mais ce sont leurs échanges de points de vue sur la vie et sur la mort dont l'on espérait se délecter. Et, de ce point de vue, Deux messieurs sur la plage est plutôt chiche.